Inondations mortelles de Biot en 2015 : un an de prison avec sursis contre l'ancienne maire Guilaine Debras

Le tribunal correctionnel de Grasse a relaxé lundi le groupe Orpea et deux autres prévenus pour la mort de trois pensionnaires d'un Ehpad en 2015 à Biot dans les Alpes-Maritimes, lors d'inondations, mais a condamné l'ex-maire de la commune à un an d'emprisonnement avec sursis.

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Les 16, 17 et 18 janvier derniers, trois prévenus et une société comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Grasse (Alpes-Maritimes) suite aux inondations de 2015. Ces dernières avaient entraîné la mort de vingt personnes, dont trois résidentes d'une maison de retraite sur la commune de Biot.

Il s'agit de Guilaine Debras, qui était maire (SE) de Biot à l'époque des faits, Yann Pastierik, son responsable des risques naturels, Anaïs Gledel, la directrice de l'Ehpad "Le clos Saint-Grégoire", et la société anonyme Orpea (elle s'appelle désormais Emeis) qui gérait cette structure dans laquelle sont décédées les trois victimes.

Le tribunal correctionnel de Grasse vient de rendre son jugement : Guilaine Debras est condamnée à un an de prison avec sursis pour homicide involontaire. Elle a dix jours pour interjeter appel. Les deux autres prévenus sont relaxés, de même que la société Orpéa/Emeis.

Le Parquet souhaitait la condamnation de la société Orpéa. Il se réserve le droit d'interjeter appel de cette décision.

Dans le détail, voici les précisions du jugement du tribunal correctionnel :

  •  Concernant Guilaine Debras, "elle ne pouvait ignorer l'importance d'un plan communal de sauvegarde (PCS) [...] ; À cet égard, aucune des explications livrées par Madame Debras au tribunal en ce qui concerne les points nombreux de violations des prescriptions du PCS n'ont convaincu, pas davantage que n'a été comprise sa méconnaissance totale du PCS. Madame Debras a bel et bien commis une faute grave et qualifiée en sa qualité de maire de la commune de Biot, qui a exposé autrui à un risque d'inondation connu et qu'elle ne pouvait pas ignorer et qui, si elle n'a pas été la cause directe du dommage, a favorisé sa réalisation dans son ampleur telle que constituée par le décès de trois résidentes de l'Ehpad".
  •  Concernant Anaïs Glédel, "sa prise de poste à la direction de l'Ehpad un mois plus tôt seulement et la concordance des témoignages sur la réalité des consignes qu'elle a délivrées aux équipes d'astreinte ce soir-là n'ont révélé aucune faute de sa part permettant d'engager une déclaration de culpabilité".
  • Concernant Yann Pastierik, "son positionnement dans l'architecture du PCS de la commune était particulièrement imprécis et en tout état de cause manifestement très secondaire en ce qui concerne précisément une quelconque responsabilité qui aurait été mise à la charge de ce fonctionnaire dans la gestion d'une crise. De fait, la preuve d'une faute grave et qualifiée et la démonstration qu'il savait que son comportement exposait le cas échéant autrui ) un risque qu'il ne pouvait pas ignorer n'a pas été rapportée".
  • Concernant la société Orpéa, "à aucun moment, depuis 1991, l'Ehpad n'avait fait l'objet d'une mention spécifique de risque mortel d'inondation par l'une ou l'autre des autorités administratives en charge des contrôles, vérifications, inspections et accréditations ; [...] par ailleurs, dans aucun document public l'Ehpad n'était situé en zone roue inondable [...] ; enfin, l'action menée ce soir-là par les deux personnels d'astreinte à l'Ehpad a confirmé que les salariés d'Orpéa maîtrisaient pleinement les règles à suivre en cas de survenance d'une inondation du bâtiment dont il leur avait pourtant été assuré par les autorités de commune qu'elle ne pouvait plus survenir".

Quant aux dommages et intérêts demandés par les familles des victimes : la faute grave retenue à l'encontre de Guilaine Debras ayant eu lieu dans le cadre de ses fonctions de maire, le tribunal s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties civiles à saisir une juridiction administrative.

"Chacun s'est défaussé !"

Après les trois jours de procès en janvier, durant lequel l'ancienne directrice de la maison de retraite a fondu en larmes, les trois familles des victimes s'étaient dites déçues et indignées. "Tout ce que j’ai entendu, c’est que personne n’est responsable", avait lancé Me Anne-Sophie Roche, conseil de la famille de Jacqueline Colombier, 91 ans.

"Huit ans d’instruction pour trois familles brisées, pour en arriver à cette audience où l’on n'a pas d’explication. Chacun s’est défaussé !", avait enchaîné Me Emilie Farrugia, avocate de la famille de Josiane Chaix, 82 ans.

Pour (re)lire les débats devant le tribunal correctionnel de Grasse :

Il y a deux responsables de cette noyade : les responsables directs en charge de l’évacuation, Orpea, et les responsables indirects, qui n’ont pas mis en œuvre ce qui était nécessaire pour que l’évacuation se réalise, la mairie.

Alain Guimbard, procureur de la République

À l'issue de l'audience, le procureur de la République avait requis 18 mois avec sursis contre Guilaine Debras, 12 mois contre Yann Pastierik et Anaïs Gledel, et 50.000 euros d'amende contre Orpea.

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