Témoignage. "Avant chaque match, il y a des hommages" : Frédéric Bourdillon, basketteur franco-israélien, raconte son retour à Tel-Aviv

Publié le Écrit par Marianne Leroux
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Le basketteur Frédéric Bourdillon, originaire d'Antibes et jouant pour le championnat israélien, est de retour à Tel-Aviv, après un mois sur la Côte d'Azur. Il raconte son quotidien depuis le 7 octobre avec émotion.

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Le matin du 7 octobre, Frédéric Bourdillon se trouvait avec sa femme dans leur appartement près du marché, le "shuk", de Tel Aviv. "Je me suis levé tôt, vers 6h30, pour aller aux toilettes tout bêtement et là je suis tombé sur des dizaines d'alertes sur mon téléphone. J'en ai parlé à ma femme israélienne et je lui ai dit qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Deux minutes plus tard, la sirène a retenti dans toute la ville".

Le couple, en panique, s'est rapidement réfugié dans le café en bas de leur vieil immeuble qui ne possède pas de "mamad" (bunker). 

On a entendu une grosse explosion, elle était très forte parce que l’impact de la roquette s'est écrasé à un kilomètre de là où on était.

Frédéric Bourdillon.

Après une dizaine de minutes, ils ont couru chez des amis et sont partis dans le nord de Tel Aviv, à 40  km environ. Ils ont découvert peu à peu ce qu'il se passait : des terroristes du Hamas étaient entrés sur le territoire israélien pour commettre un massacre dans plusieurs kibboutz (villages).

"C'était un choc, on a eu vraiment très peur. Même si j'avais déjà vécu des attaques de roquettes, là c'était différent. C'était beaucoup de stress pour ma famille en France"

"Tout le pays était à l'arrêt"

Une semaine après l'attaque, Frédéric Bourdillon et sa femme sont partis avec deux sacs sur le dos à Antibes, dans la famille du sportif.

"Les équipes de mon club nous ont dit de rentrer chez nous parce que ça commençait à être trop dangereux pour qu’on puisse continuer les entraînements et commencer le championnat", confie-t-il. 

La première journée devait se dérouler le 7 octobre. Mais tout a été annulé précipitamment : "La Ligue de basket ne représente rien par rapport à la sécurité du pays, donc tout le monde s'est arrêté de travailler. Tout le pays était à l'arrêt".

Vivre cette guerre à distance, pendant un mois, était difficile pour Frédéric Bourdillon qui a beaucoup de proches en Israël : "Voilà 7 ans que j'habite là-bas donc j'ai énormément d'amis. Il y en a même qui sont partis à la guerre donc je suis très inquiet pour eux".

Au début d'un match, les équipes rendent hommage aux otages

Après un mois sur la Côte d'Azur, début novembre, le joueur de basket de 32 ans est revenu dans son club Bnei Herzliya en Israël.

Avec l'accord du gouvernement, les équipes ont rappelé les différents basketteurs pour continuer les entraînements et commencer le championnat, dans des conditions de sécurité maximales : "Les consignes de sécurité sont simples, dès qu'il y a une alerte, il faut se mettre dans des abris antimissiles, il faut y rester pendant 10 minutes, le temps que les éclats d'obus ne puissent plus nous blesser". Il était important pour le couple, qui attend un enfant pour le mois prochain, d'avoir un appartement où se trouve un "mamad", une pièce blindée, pour pouvoir se protéger en cas d'attaque.

Il y a deux semaines, le championnat de basket israélien a pu démarrer : "Lorsqu'on est arrivé, ça a été très vite. On s'est entraîné pendant un peu plus d'une semaine puis on a commencé les matchs. C'était un peu précipité, mais on n'avait pas le choix puisque ça avait déjà pris énormément de retard". Une jauge de 1 500 spectateurs a été mise en place pour éviter les gros rassemblements.

Au début de chaque match, les équipes rendent hommage aux otages, aux personnes décédées, lors de l'attentat du 7 octobre, et à leurs familles :

"Cette année, on fait le championnat, pas forcément pour la compétition, mais pour montrer qu’on a repris une vie à peu près normale"

Frédéric Bourdillon

Lors de ces cérémonies, des militaires sont invités : "On les remercie parce que ce sont eux qui nous protègent. S'il n'y avait pas l'armée, Israël serait un champ de ruines"

"Une bouffée d'oxygène"

Reprendre le basket dans son pays d'adoption est une "une bouffée d'oxygène" pour celui qui a joué quelques années dans l'équipe d'Antibes.

J'aurais pu reprendre en France, mais honnêtement avec tout ce que j'ai vécu depuis 7 ans là-bas, c'était évident que j'y retourne".

Frédéric Bourdillon.

Frédéric Bourdillon a retrouvé Tel Aviv sans touristes, une atmosphère particulière se dégage depuis qu'il est revenu : "Les gens essaient de revivre normalement et font en sorte que tout se passe bien. Mais il n’y a plus cette folie. Tel Aviv est une ville très excentrique où tout le monde sort d'habitude. Tout le monde fait la fête. C'est ce qui manque".

Le basketteur, bientôt papa, reste optimiste grâce à la nouvelle vie qui l'attend : "C'était ma volonté personnelle que notre premier enfant naisse en Israël comme c'était prévu à la base. Je n’éprouve aucun regret et je n'ai vraiment pas peur parce que je sais que tout est fait pour que ça puisse bien se passer".

Il espère quotidiennement que les otages du Hamas seront prochainement libérés et que le Moyen-Orient retrouvera la paix. "Ce sont des questions politiques qui sont tellement difficiles qu'on ne sait pas si ça arrivera un jour mais on garde espoir".

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