Dimanche 19 septembre, les buralistes des Alpes-Maritimes se retrouvent pour échanger sur les enjeux de leur profession. Pierre Romero, président départemental de la Confédération des buralistes, alerte sur la contrebande de cigarettes et insiste sur la nécessité de transformer les bureaux de tabac.
"C'est la première année que le nombre de buralistes n'a pas baissé dans les Alpes-Maritimes", se réjouit Pierre Romero. Le président départemental de la Confédération des buralistes se veut optimiste, quelques heures avant l'assemblée générale qu'il tient à Cagnes-sur-Mer, ce dimanche 19 septembre.
Ce rassemblement est l'occasion pour les 329 buralistes du département de faire un point sur leur situation et les enjeux que subit la profession. S'il insiste sur la "chance" qu'on eut les bureaux de tabac d'être restés ouverts pendant la pandémie de Covid-19, Pierre Romero rappelle qu'"il y a de réels problèmes". "Le tabac reste une activité forte, mais de plus en plus menacée".
La menace des marchés parallèles
Les "progressions fabuleuses" des ventes de tabac en 2020, entraînées par les confinements et la fermeture des frontières avec l'Italie (30 % sur l'ensemble du territoire français, mais, à Menton, ces hausses étaient de l'ordre de 400%), n'ont pas tenu, souligne le président départemental. Dès la réouverture, les paquets italiens aux prix attractifs (5 €, contre 10 € en France) ont retrouvé leurs acheteurs français.
"Mais ce n'est plus le problème", balaie Pierre Romero. "Avant, on avait une cible claire", ajoute-t-il en parlant de ces clients transfrontaliers, "mais depuis 2020, on est en train d'observer une augmentation de la contrebande et de la contrefaçon de la cigarette".
Des cigarettes vendues à la sauvette, dans des épiceries de façon clandestines, ou produites dans des usines clandestines... De 2019 à 2020, ce marché parallèle a augmenté de 619 %, selon le président départemental de la Confédération des buralistes. "C'est énorme", commente-t-il.
Sur les 30 % de cigarettes consommées en 2020, nous ne sommes plus qu'à 7,3 % d'achats transfrontaliers. Les 23 % restants proviennent de la contrebande et de la contrefaçon.
Ce qui représente, pour toute la France, six milliards de cigarettes.
C'est d'ailleurs en région Provence-Alpes Côte d'Azur que l'on consomme le plus de cigarettes de contrefaçon : en 2020, 16,8 % des cigarettes fumées sont issues de ce marché parallèle, selon une étude de la Société d'exploitation industrielle des tabacs et des allumettes (Seita) (contre 1,9 % en 2019).
"Les trafiquants de cigarettes ont saisi l'opportunité de s'adresser aux fumeurs français parce qu'ils ne pouvaient plus passer les frontières et se fournir comme ils le faisaient auparavant", explique Hervé Nathalie, responsable des relations territoriales de la Seita, interrogé par RTL. "Cela représente un manque à gagner, de recettes fiscales non perçues, pour l'État français de l'ordre de cinq milliards d'euros par an".
La contrefaçon est désormais bien implantée en Europe. On retrouve des usines clandestines en Pologne, en Slovaquie, aux Pays-Bas, mais aussi en Belgique. "Acheter en France des cigarettes de contrefaçon, c’est grave", soutient Pierre Romero. "Cela met en péril notre profession, mais aussi les consommateurs", car les cigarettes de contrefaçon ne font l'objet d'aucun contrôle.
Du CBD dans les bureaux de tabac
Pierre Romero pointe aussi du doigt le "buzz du moment" : le CBD.
Le CBD ou cannabidiol, est un principe actif de la plante de chanvre, une sous-espèce de cannabis. Le CBD est légal lorsqu’il est dépourvu de la molécule de THC, un autre cannabinoïde aux propriétés psychoactives. Il peut être fumé, et est apprécié pour ses effets relaxants.
Selon le président départemental de la Confédération des buralistes, il y aurait une centaine de boutiques qui vendent du CBD dans les Alpes-Maritimes. "Un marché considérable", qui serait estimé à 1 milliard d'euros dans la France entière selon Challenges.
Pierre Romero souhaiterait que ce produit soit taxé par le gouvernement et vendu dans des bureaux de tabac. "Il n'y pas plus adapté qu’un buraliste pour vendre un produit qui se fume".
"Faire évoluer le buraliste d'avant"
Contre ces nouveaux enjeux, la nécessité de "se diversifier". Epicerie, librairie, presse, point relais... "On se transforme pour être de plus en plus en adéquation avec les demandes de nos clients", affirme Pierre Romero.
C'est ainsi que, depuis juillet 2020, il est possible de payer les factures de cantine, de crèche, d'hôpital, des amendes ou les impôts dans les bureaux de tabac partenaires partout en France, rappelle le ministère de l'Economie sur son site internet. Il y aura même bientôt des distributeurs de billets dans les bureaux de tabac, assure Pierre Romero.
#Diversifier leur activité, une question de survie pour les #buralistes ♦️
— Les Buralistes (@LesBuralistes) September 17, 2021
? "Le buraliste peut recevoir 30 % de subventions à hauteur maximum de 33 000 €. Face à la #crise qui touche le réseau, il faut saisir toutes les #opportunités." @PHILIPPECOY
? @le_Parisien pic.twitter.com/LLbASJqOtS
Les buralistes peuvent bénéficier d'un "Fonds de transformation" pour les aider à repenser leurs points de vente. Cette aide financière prend en charge 30% des dépenses nécessaires à la transformation du commerce. Ce montant est plafonné à 33 000€ mais peut être cumulé avec d'autres dispositifs d'aides, indique le site Transformation buralistes.
On est en train de faire évoluer le buraliste d’avant.
Nouveau chantier en prévision pour Pierre Romero : travailler sur les territoires et la ruralité en 2022. Arpenter les villages et l'arrière-pays "pour connaître leurs besoins en bureau de tabac". Il s'est d'ailleurs rapproché de la mairie de La Brigue pour un projet d'ouverte de bureau de tabac.
Il ajoute : "Je ne désespère pas de voir une progression des buralistes sur le territoire l’année prochaine".