À l'école élémentaire Maure de Grasse dans les Alpes-Maritimes, trente petits écoliers ont pu tester les futurs plats des cantines scolaires. Ils sont chargés de noter six assiettes de dégustation à l'aide de petits questionnaires ludiques.
La mission du jour de ces petits écoliers : six recettes à goûter, savourer et noter. L'entreprise Elior propose une sélection de "plats durables" à ces enfants âgés de 6 à 11 ans. L'objectif de ce "test convives" ? S'adapter aux envies culinaires des enfants tout en réduisant la valeur carbone des plats. Les obligations, mises en vigueur par le ministère de l'Éducation le 1ᵉʳ janvier 2024, imposent à la restauration collective de compter à minima 50 % de "produits alimentaires durables de qualité".
L'offre des géants Sodexo, Compass ou Elior tente à la fois de relever les défis de la transition alimentaire et de respecter l'apport nutritionnel dont un enfant a besoin.
À bas les préjugés
L'époque de la cuillère d'épinards qui s'abat brusquement dans nos assiettes avec un "splash" écœurant est révolue. Aujourd'hui à Grasse, les plats soigneusement dressés se distinguent de l'image souvent déplaisante que l'on garde des réfectoires scolaires. Une délicieuse odeur se dégage des premières assiettes, qui déambulent entre les rangées d'élèves affamés. Amaury, l'un d'eux, se lèche les babines alors qu'un plat atterri sur la table devant lui. "Hmm… très bon !", se régale son voisin, la bouche pleine. La plupart des écoliers sont plus que satisfaits.
D'autres font la fine bouche quand ils découvrent des aliments peu communs glissés dans leurs plats.
Entre haricots blancs, sardines et lentilles corail, la redécouverte de nombreux aliments devient aussi instructive qu'une leçon de mathématiques. C'est le but des "classes du goût", conçus par Jacques Puisais dans les années 1970, puis reprises au sein du Programme national pour l'alimentation (PNA) par le gouvernement dès 2012. L'enjeu des chefs cuisiniers est d'allier esthétisme, saveurs et sens, pour apprendre à s'alimenter plus sainement.
Chacun ses goûts
Mets en bouche, crayon en main, les petits critiques culinaires attribuent une note aux recettes qu'ils goûtent, sur leur questionnaire. "Les enfants ont, pour chaque plat qu'ils dégustent, des questions sur le visuel du plat, l'odeur, le goût et s'ils aimeraient ou non retrouver le plat dans leur cantine", explique Morgane Clément, apprentie en innovation culinaire chez Elior.
En ciblant les attentes de chaque enfant, ces retours permettent d'adapter les recettes, et d'éviter les "très mauvaise(s) note(s) !". L'objectif reste de faire valider gustativement les plats pour moins gaspiller. En janvier 2023, les pertes et gaspillages alimentaires en France sont estimés à 10 millions de tonnes de produits par an, selon le ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.
Le secteur des cantines représente à lui seul 8 % de ces pertes.
Pour le gâteau d'œufs, il nous a fallu un an et demi pour caler la recette
Sylvain Chevalier, responsable innovation culinaire
Encore faut-il que sept enfants sur dix approuvent le plat pour qu'il soit définitivement présenté dans les cantines françaises.
Avec Justine Meddah.