Après une bande dessinée sur l'incendie de Notre-Dame de Paris, Yvon Bertorello et Cédric Fernandez ont abordé un nouvel épisode douloureux de l'actualité : la tempête Alex. Plusieurs mois de documentation ont été nécessaires pour cette œuvre, qui relate minute par minute la catastrophe.
Des maisons arrachées, des familles endeuillées et des vallées défigurées, la tempête Alex du 2 octobre 2020 est encore dans toutes les têtes, dans les vallées des Alpes-Maritimes et au-delà.
Cette nuit-là, les crues ont tout emporté sur leurs passages dans la Roya, la Tinée et la Vésubie :
Yvon Bertorello, est un "enfant du pays", franco-italien, il a toujours habité près des vallées, depuis six ans il s'est installé à La Turbie dans les Alpes-Maritimes. Bouleversé par les terribles intempéries, cet historien, journaliste et auteur, décide de retracer "minute par minute" les événements :
Il m'était impossible de ne rien faire, cet épisode m'a traumatisé, j'avais des amis directement impactés
Pour retranscrire cette catastrophe, il s'oriente instinctivement vers la bande dessinée. Et il fait appel à Cédric Fernandez, un dessinateur varois, avec lequel il a déjà coréalisé "L'incendie de Notre-Dame de Paris" :
L'artiste Franck Perrot participera également au projet, c'est lui qui s'est occupé de la mise en couleur de l'oeuvre.
Une volonté d'être le plus réaliste possible
Cette bande dessinée s'attache à décrire de l'intérieur les longues heures du combat des pompiers contre les crues, mais aussi les coulisses des décisions politiques et l'émotion nationale devant les photos des vallées détruites.
Une véritable chronologie de la tempête Alex, depuis l'alerte méteo jusqu'aux élans de solidarités survenus après les faits.
Yvon Bertorello et Cédric Fernandez, ont réalisé un véritable travail de terrain et de documentation afin de ne laisser aucune place à la fiction :
Nous voulions que tout soit vrai, nous avons recoupé les témoignages que nous avions. Nous nous sommes rendus sur place plusieurs jours, pour échanger avec les habitants, les politiques et les pompiers présents sur le terrain
Néanmoins, par respect pour les victimes, les auteurs affirment avoir "supprimé certains passages ou certains témoignages."
Cédric Fernandez le dessinateur, a souhaité prendre du recul sur la situation et pour ne pas retranscrire de façon outrancière cette dure réalité. Il précise "il était important de conserver une forme de pudeur." Notamment pour parler de la mort.
10 personnes ont en effet péri lors des inondations et 8 sont toujours portées disparues.
Malgré leur volonté de prendre recul sur la situation, certains passages retracent tout de même des scènes très douloureuses étayées par des témoignages précis, des habitants des vallées.
Un personnage fictif a tout de même été dessiné pour servir de fil conducteur à l'ouvrage. Un visage a également été modifié par choix du protagoniste, mais l'ensemble des noms et prénoms cités sont bien réels.
Toutes les victimes ont également été évoquées.
Mais pourquoi la bande-dessinée ?
Yvon Bertorello souhaite toucher le public de la manière la plus large possible, il précise : "la bande dessinée se moque des classes sociales, de l'âge ou du genre, elle séduit tout le monde."
Ce choix est également un parti pris intellectuel, "il y a plusieurs grilles de lecture dans une bande dessinée", ajoute-t-il.
Ce support permet aussi de maintenir le recul nécessaire pour traiter ce sujet, car raconter et dessiner cette chronique, cela a demandé du temps. Un moyen de laisser plus de place à la réflexion que dans un "simple reportage factuel", confie l'auteur.
Cédric Fernandez ajoute : "afin de ne perdre aucun détail, je dessinais ce que j'avais vu ou ressenti le plus rapidement possible."
Si l'histoire suit un ordre chronologique, ce n'est pas le cas du processus de création.
Hommage et devoir de mémoire
Cette oeuvre s'inscrit dans une démarche historique, laisser une trace de cet incident pour la postérité. Mais elle sert également d'hommage aux victimes mais aussi aux héros.
Même si j'ai été choqué en me rendant dans les vallées dévastées, j'ai aussi été beaucoup ému par l'ensemble des élans de solidarité qui fleurissaient un peu partout pour ces gens-là, qui avaient tout perdu
Pour rendre également hommage aux pompiers italiens intervenus pendant la temête, l'oeuvre sera aussi traduite en italien.
Une date symbolique
Afin que la bande dessinée fasse pleinement sens, il fallait qu'elle sorte à une date symbolique. C'est pourquoi les auteurs ont dû travailler "vite et bien" selon leurs propres mots, pour assurer sa sortie fin septembre 2021, un an après la tempête.
Sur les 17 euros du prix, 4 seront reversés aux associations d'aide aux sinistrés.
Une oeuvre qui suscite déjà un engouement. De nombreuses institutions ont appuyé ce projet : la Métropole Nice Côte d'Azur, le département des Alpes-Maritimes, la région PACA, la Principauté de Monaco, la CARF Menton et l'entreprise ENEDIS.
Des personnalités publiques comme le journaliste Stéphane Bern, ont également soutenu ce projet.