De Breil-sur-Roya à Tende, dans la vallée de la Roya, les commerces "essentiels" se relancent peu à peu. Et les habitants répondent présents.
Ce mardi matin, les Tendasques font la queue sur le trottoir enneigé, devant la boulangerie de Tende (Alpes-Maritimes). L'établissement a rouvert le 5 novembre dernier, après cinq semaines d'arrêt forcé, et s'est même diversifié. "On s'est mis à vendre du Coca, des chips, du vin, ce qu'on ne vendait pas avant", explique Manon, la vendeuse.
Une boucherie, le marché, la pharmacie, la banque... La vie sociale et économique de cette commune de 2.000 habitants reprend progressivement. "Il ne faut pas se plaindre !", dit une Tendasque. Mais, pour l'heure, il manque toujours un commerce : une épicerie "pour les gens qui n'ont pas de voiture pour descendre à Breil-sur-Roya", ajoute Serge, un autre habitant.
À la recherche d'une épicerie
Sylvie Olivari était la gérante depuis neuf ans du "P'tit marché", un magasin situé au bord de la route principale. Elle a dû fermer une semaine après la tempête Alex, le 10 octobre, faute de pouvoir se réapprovisionner.
Je n'avais plus grand-chose à vendre et je ne pouvais pas me ravitailler. Je travaillais toute seule et je ne me sentais pas de faire 5 heures de route sur des chemins forestiers pour me réapprovisionner. C'était trop lourd pour moi.
Avant la tempête, elle avait mis en vente son commerce et trouvé des repreneurs, qui ont depuis abandonné leur projet.
Quelques mètres plus loin, une autre supérette avait été reconvertie en lieu de distribution des dons alimentaires. Les propriétaires négocient aujourd'hui avec un repreneur pour une réouverture dès le 1er janvier. Pour les plus démunis, le Secours populaire, la mairie et le département continuent de distribuer nourriture et produits d'hygiène.
?? Avec l'arrêt de la distribution alimentaire gratuite généralisée, un dispositif relais va être mis en place afin de...
Publiée par Ville de Tende sur Lundi 28 décembre 2020
"Je suis convaincue que Tende va repartir, mais ça va prendre plusieurs années", poursuit Sylvie Olivari. À la boucherie, l'activité, elle, est déjà bien repartie. Le chiffre d'affaires de Bernard Broutin a augmenté de 30% par rapport à l'an passé. "Je travaille mieux que l'année dernière", affirme l'artisan.
C'est incroyable ! Mais ça vient peut-être des horaires de la route : comme on ne peut pas remonter de suite, beaucoup d'habitants se servent dans le village et ils ne peuvent pas aller non plus en Italie.
Pour aller jusqu'à Breil-sur-Roya, via Fontan et une piste provisoire, il faut effectivement jongler avec les horaires des convois mis en place par le département : trois créneaux sont ouverts matin, midi et soir.
Des horaires précis, fixes, qui entraînent de nouveaux comportements, comme dans le supermarché de Breil-sur-Roya. "On a parfois pas mal de monde vers 16h30 qui vient faire des courses juste avant de remonter à Tende avec le convoi [de 17h30, NDR]", reconnaît Alex Ipert, le patron du Carrefour contact.
Donner ou vendre
Son commerce avait dû fermer cinq jours après la tempête Alex. Dans les semaines qui ont suivi, l'activité a parfois eu du mal à reprendre, concurrencée par les nombreux dons acheminés pour les sinistrés.
Les produits qui sont repartis en premier, ce sont les produits frais (surtout les fromages et la viande) qui ne pouvaient pas être donnés. Pour les produits secs et ménagers (épicerie, papiers toilette, produits pour bébé...), ça a mis du temps : il a fallu un mois et demi.
À Breil-sur-Roya, la boulangerie a également repris du service. Sur la place Biancheri, qui fut entièrement inondée de boue par la tempête, la vie redémarre. Le marché du mardi est revenu et un commerce de réparation de vélos a même ouvert ses portes. Après plusieurs travaux, le tabac voisin, lui, rouvrira lundi prochain. Quant au Spar, qui a subi de nombreux dégâts, l'activité ne reprendra pas avant mars.
Zone franche de montagne
Pour l'instant, les commerçants ne peuvent compter que sur les habitants pour continuer de fonctionner. La reconstruction des axes de circulation -et le retour des touristes- prendra encore de nombreux mois, voire des années. En attendant, les entreprises et les mairies des cinq communes de la vallée de la Roya vont demander l'instauration d'une "zone franche de montagne".
"Cela permettra d'exonérer de charges sociales les entreprises de l'ensemble de la vallée", précise Renaud Lefebvre, en charge du développement économique à la mairie de Breil-sur-Roya. Objectif : accélérer le plus possible la reprise d'activité pour éviter l'exode des habitants. Depuis début octobre, plusieurs centaines de personnes ont déjà quitté la vallée.