Procès en appel de l'attentat de Nice. "Je ne suis pas terroriste, pas violent... laissez-moi une chance !" supplie Mohamed Ghraieb avant le verdict

Depuis le 22 avril 2024, Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud comparaissent devant la cour d'assises spéciale à Paris pour association de malfaiteurs terroriste. Ils ont écopé de 18 ans de réclusion en première instance. L'avocate générale a requis 20 ans. Le verdict est attendu en fin de journée.

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Après huit semaines d'audience, de dépositions, de témoignages, c'est le dernier jour de ce procès en appel. Un procès-fleuve, un dossier hors norme, à la mesure de cet attentat de masse survenu le 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais à Nice.

Le terroriste a causé la mort de 86 personnes et en a blessé plus de 400 avec son camion transformé en arme de guerre.

Pour les parties civiles, qui suivent la retransmission des débats à Nice, la fin du procès, c'est presque un soulagement. Même si le verdict est autant attendu que redouté. Les associations et les proches des victimes craignent que la peine des deux accusés soit diminuée, voire annulée. Ce jeudi matin, à Nice, certains voudraient qu'ils s'excusent, qu'ils prononcent un mot pour les victimes. Ils seront exaucés, au mois pour l'un d'entre eux. 

"Je suis innocent !"

Comme il est d'usage, le président du tribunal, Christophe Petitau, propose aux deux accusés de prendre la parole. "Mohamed Ghraieb, avez-vous quelque chose à ajouter pour votre défense ?" lance le président.

L'accusé répond, poli et compatissant : "Bonjour Monsieur le président. Mes paroles c'est pour les victimes je leur souhaite de tout mon cœur de se reconstruire, je suis de tout cœur avec elles. Je n'ai rien à voir avec cet attentat, c'est très important pour moi qu'ils comprennent que je suis innocent ! Cette fois-ci j'ai été très clair, j'ai dit que la vérité cette fois-ci. Je n'ai rien à voir avec l'attentat. Je ne suis pas terroriste, je suis innocent. J'espère que vous serez juste avec moi.

Il poursuit, en suppliant, désespéré : 

Je souffre pour quelque chose que je n'ai pas fait, je suis pas radicalisé. Laissez-moi une chance, je suis réinsérable. Je suis un homme de parole, je vous jure, je suis pas dangereux, je cherche la paix.

Mohamed Ghraieb.

Sur le projet d'attentat, il tente de se justifier : "Monsieur le président, je n'ai rien vu venir vraiment, j'insiste sur ce point. Je suis pas terroriste, je suis pas violent, je suis laïc. (...) Il (Mohamed Lahouaiej-Bouhlel) m'a traîné dans la boue, il a tout fait pour me casser ma vie. Je suis de tout cœur avec les victimes, je souhaite qu'ils se reconstruisent et qu'ils comprennent que je suis innocent, j'ai pas fait de mal."

"Laissez-moi une chance, soyez juste avec moi", supplie une dernière fois Mohamed Ghraieb. 

Intime conviction

C'est au tour de Chokri Chafroud de s'exprimer. Ce sera plus court. Il répond en arabe. "Je n'ai rien à rajouter." Les débats sont actuellement terminés. 

Les accusés sont-ils coupables d'avoir participé à Nice jusqu'au 14 juillet à un groupe terroriste ? Ce groupe avait-il pour objet l'atteinte aux personnes ? Connaissaient-ils le projet d'attentat ? 

Les juges vont maintenant devoir répondre à ces questions en fonction de leur intime conviction. 

En première instance, les deux accusés ont écopé de 18 ans de réclusion pour association de malfaiteurs terroriste. Ils ont décidé de faire appel de ce verdict. 

18 ans, 20 ans ou l'acquittement ? 

Mais faire appel est toujours une opération risquée, comme l'a souligné l'avocate générale. La peine peut être diminuée, identique ou plus importante. 

Naïma Rudloff, l'avocate générale, a demandé la peine maximale : 20 ans de réclusion. Dans son réquisitoire, elle a tenté d'établir les liens entre les deux accusés et le terroriste, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, abattu par des tirs de policiers le 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais.

À l’opposé de la démonstration de l'avocate générale, les avocats de Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud ont demandé eux l'acquittement de leurs clients.

Mohamed Ghraieb a tenté de clamer son innocence et de se faire entendre pendant son audition. 

Maître Jim Villetard, qui assure la défense de Mohamed Ghraeib a soutenu pendant sa plaidoirie : "Il n'y a rien dans ce dossier sinon des amalgames". Mohamed Ghraieb "n'est pas lié à l'arme" détenue par Mohammed Lahouaiej-Bouhlel, "il n'a pas participé à la location du camion" qui a servi à l'attentat, a soutenu son confrère Vincent Brengarth. "Il n'avait aucune connaissance de ce que Lahouaiej-Bouhlel projetait", a-t-il insisté.

Même ligne de défense pour Chokri Chafroud. Ses trois avocats ont essayé de démontrer l'absence de liens et de preuves matérielles entre le terroriste et leur client pour la préparation de l'attentat. Les avocats redoutent un verdict "émotionnel", qui reposerait sur la compassion avec les proches des victimes et la nécessité de trouver un coupable en l'absence du terroriste. 

Le verdict sera prononcé ce jeudi 14 juin par des juges professionnels à la cour d'assises spéciale de Paris, en fin de journée.

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