Le président Macron s'est dit favorable à l'inscription du consentement dans le droit français. Une évolution de la législation qui s'inscrit dans le combat mené par Gisèle Halimi dans le "procès du viol" en 1978 à Aix-en-Provence.
Faire évoluer la définition du viol en la fondant sur le consentement. Depuis le choc #MeToo, de nombreuses voix se sont élevées pour modifier la législation. Emmanuel Macron y est favorable, c'est ce qu'il a déclaré lors d'un entretien filmé avec une représentante de l'association "Choisir la cause des femmes", fondée par Gisèle Halimi, le 8 mars dernier, en marge de la cérémonie organisée autour de l'inscription de l'IVG dans la Constitution. Une décision qui s'inscrit dans la lignée d'un combat engagé en 1978 dans ce qu'on a appelé "le procès du viol", un moment fondateur pour les droits des femmes.
Une continuité du combat de Gisèle Halimi
"Je vais l'inscrire dans le droit français", a déclaré le président de la République le 8 mars, jour de lutte pour les droits des femmes. Une "bonne nouvelle" pour la présidente de l'association "Choisir la cause des femmes", Violaine Lucas, "cela va nous permettre d'approfondir ce que Gisèle Halimi avait commencé à faire en 1978 lors du procès d'Aix-en-Provence", a-t-elle commenté auprès de l'AFP.
Avant ce procès retentissant, le viol n'était pas reconnu comme un crime. En portant la parole des femmes devant une cour d'assises, l'avocate a participé aux changements des mentalités.
'"LE" procès du viol
Les plaignantes, Anne Tonglet et Araceli Castellano, deux jeunes touristes belges de 19 et 24 ans, homosexuelles, ont été violées par trois hommes près de Marseille, en 1974.
Le soir du 20 août, le couple campe dans la Calanque de Morgiou. Un individu vient les importuner. Éconduit, il revient plus tard avec deux amis à la nuit tombée pour se venger. Les deux jeunes femmes sont battues et violées. Rapidement identifiés et interpellés, les agresseurs des deux jeunes femmes n'ont été poursuivis que pour coups et blessures et attentat à la pudeur. Des délits jugés en correctionnelle. Les plaignantes doivent attendre plus de trois ans pour finalement obtenir un renvoi des accusés devant une cour d'assises.
"L'enjeu est très important, avait expliqué Gisèle Hamili en 1977 sur un plateau de FR3, ce n'est pas un procès de viol, l'enjeu, ce n'est pas une condamnation ou un acquittement, l'enjeu,c'est changer les rapports fondamentalement entre les hommes et les femmes".
Un déferlement de haine et de violence
Avec Gisèle Halimi, les victimes de viol osent parler. L'avocate refuse le huis clos, comme elle l'avait fait pour l'avortement avec le procès de Bobigny. Le procès se tient le 2 mai 1978 devant les assises d'Aix-en-Provence.
Les deux jours d'audience donnent lieu à un déferlement de haine, à l'intérieur du palais de justice comme à l'extérieur. Dans cette France de la fin des années 70, l'homosexualité figure sur la liste des maladies mentales, elle n'en sera retirée que trois ans plus tard. Les victimes sont ciblées pour "leurs mœurs légères".
"C'était extrêmement violent. Il y avait des crachats, on recevait des insultes, Gisèle Halimi a été giflée. C'était inouï", a raconté en 2017, l'une des victimes, Anne Tonglet, à L'Express.
Mais la justice passe. Les violeurs sont condamnés. Six ans de réclusion criminelle pour le meneur de l'expédition punitive, quatre ans pour ses deux complices.
Le viol devient un crime en 1980
Ce procès mémorable est suivi d'une nouvelle législation le 23 décembre 1980. Le viol est redéfini aux yeux de la loi comme un crime, au-delà de la seule relation vaginale imposée. L'article 222-23 du code pénal définit le viol comme "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise".
Le viol est depuis cette date, puni en France d'une peine allant de 15 ans de prison ferme jusqu'à l'emprisonnement à perpétuité (en cas de récidive ou si le viol est accompagné de tortures).
"Seul un oui est un oui"
Depuis les années 2010, des associations féministes réclament l'intégration de la notion de consentement à la définition du viol. La France reste opposée à une définition commune du viol à l'échelle européenne basée sur l'absence de consentement. "Le viol n'est pas un eurocrime", a répété M. Macron dans la vidéo, réaffirmant la position de la France au niveau européen.
Plusieurs pays européens ont fait évoluer ces dernières années leur définition du viol comme étant une atteinte sexuelle sans consentement explicite. En Suède, une loi sur le consentement sexuel, qui considère comme viol tout acte sexuel sans accord explicite, même en l'absence de menace ou de violence, est en vigueur depuis 2018. En Espagne, une loi - surnommée "Seul un oui est un oui" - a introduit depuis octobre 2022 l'obligation d'un consentement sexuel explicite.