Témoignage. "C'était l'apocalypse", témoignent les victimes au procès de l'incendie d'août 2016 à Rognac

Publié le Mis à jour le Écrit par Annie Vergnenègre, Marie-Agnès Péleran, Valérie Bour

Un homme de 40 ans est jugé par le tribunal correctionnel pour avoir déclenché un vaste incendie en jetant son mégot en août 2016 à Rognac. Le feu a détruit 2.600 hectares jusqu'aux portes de Marseille. Deux victimes qui ont perdu leur maison témoignent.

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Sylvie Vallès et Claude Gazano font partie des 250 victimes de l'incendie qui se sont portées parties civiles. Depuis lundi, elles participent au procès de Mostafa El Fathi, un maçon de 40 ans, jugé pour avoir jeté son mégot mal éteint sur un chantier de rénovation de maison à Rognac le 10 août 2016. 

La maison de Sylvie Vallès, elle, est partie en fumée ce jour-là. Quand le feu gagne Vitrolles, vers 16h30, elle essaie de partir en voiture. Mais il est trop tard.

Piégée dans sa maison

"Le chemin où j’habite est bouché par d’autres véhicules, donc je suis revenue chez moi", raconte Sylvie Vallès, qui s’enfuit par le parc de Griffon.

"Avec le vent, il y a une boule de feu qui est tombée deux ou trois mètres devant moi, donc j’ai rebroussé chemin. Je ne pouvais plus avancer il y avait un mur de feu devant moi".

Seule avec ses chats, elle se calfeutre dans sa maison. Elle voit "les flammes, les fumées qui traversent les volets".

"Je pensais mourir", confesse-t-elle. Pendant plus de deux heures, Sylvie Vallès attend que quelqu'un vienne la "délivrer" de cet enfer.

Je ne voyais personne qui venait me sauver, je ne pouvais plus respirer, j’ai appelé mes enfants, Aurélie et Laurent, et je leur ai dit au revoir.

Sylvie Vallès, victime

Sylvie Vallès en fait encore des cauchemars aujourd'hui. "Si je vois des feux en Californie ou en France, j’éteins la télé, je ne peux pas". 

La Vitrollaise n’a pas voulu déménager. "Maintenant, tout a brûlé, il n’y a plus rien à brûler".

Claude Gazano se souvient très bien de cette "belle journée d'été" dans sa résidence secondaire sur les hauteurs des Pennes-Mirabeau, avec vue imprenable sur la plaine de Marignane à Martigues. 

"Dans l'après-midi, on a vu des panaches de fumée à Fos, raconte-t-elle, on a commencé à s'inquiéter".

Les Gazano savent qu'un feu, en plein mois d'août par jour de grand vent, peut parcourir des kilomètres en un rien de temps.

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Un homme de 40 ans est jugé par le tribunal correctionnel pour avoir déclenché un vaste incendie en jetant son mégot en août 2016 à Rognac. Le feu a détruit 2.600 hectares jusqu'aux portes de Marseille. ©FTV

Des heures de cauchemar inoubliables 

Claude monte aussitôt avec sa fille sur un promontoire pour suivre la progression des flammes. "Et là, on a vu le feu qui s'intensifiait de façon terrible".

L'incendie se dirige vers Vitrolles. Sur les hauteurs, Claude Gazano ne se sent pas menacée. Le répit est de courte durée.

"Et puis le feu s'est dédoublé, il a tourné avec le vent, il est revenu vers nous, il est remonté vers notre maison."  Cinq ans après, l'émotion est toujours aussi forte pour Claude quand elle évoque ce cauchemar.

"On est rentrés, on a mis les animaux à l'abri dans la maison, parce qu'on s'est dit : va falloir partir!"

L'urgence se confirme quand une patrouille de police vient presser la famille de quitter les lieux. 

Claude Gazano se résout à abandonner sa maison aux flammes. Elle part donc avec son mari, sa fille et son fils, n'emmenant avec elle que ses animaux. "On réagit pour sauver sa vie, c'est le principal".

Depuis Marseille où elle s'est réfugiée, la famille suit la situation d'heure en heure. "A 23h, notre alarme nous a envoyé un message d'intrusion sur nos téléphones, c'était le feu qui était chez nous".

Malgré le danger, les Gazano tentent par tous les moyens de regagner les Pennes-Mirabeau dans la nuit.

"A 1h du matin, on a essayé de prendre les petites routes, pour se rapprocher le plus possible".

C'était une vision de cauchemar, il y avait des pompiers de partout, des gens au bord des routes sortis de leur véhicules, et cette lumière, cette odeur, c'était l'apocalypse.... 

Claude Gazano, victime

Claude revit ses heures d'angoisse comme si c'était hier. "Je nous revois, tout ce qu'on a fait, à la minute près", assure-t-elle. 

Avec ce procès, Claude Gazano espère une prise de conscience des fumeurs. "J'espère qu'ils comprendront qu'il faut arrêter de jeter des mégots le long des routes, n'importe comment, lorsqu'on habite une région comme la nôtre, avec la chaleur, la sécheresse l'été... ce sont des assassins en puissance". 

L'examen des indemnisations renvoyé en 2022

La maison des Gazano a été réduite en cendres. A l'audience face aux victimes, Mostafa El Fathi a exprimé ses regrets.

Mais pour obtenir réparation, elles devront attendre. 

"On nous annonce que peut-être que le présumé coupable n'était pas assuré, lâche Claude Gazano un peu sonnée par ce coup de théâtre à l'ouverture du procès, c'est quelque chose qui se rajoute aux souffrances des gens". 

"Même si l'argent ne remplace pas tout ce qu'on a pu perdre, ça aide à faire passer les difficultés financières qui se rajoutent aux autres", conclut-elle.

L'examen des demandes d'indemnisation a été disjoint du procès pénal. Il sera tranché lors d'une audience civile le 5 mai 2022.  

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