Comment la lutte des pompiers contre les incendies s'organise et fait face au dérèglement climatique

En 2022, 72 000 hectares étaient partis en fumée en France, notamment en Gironde et Bretagne, traditionnellement moins exposées que le Sud. Après cela, le président de la République avait annoncé un grand plan de renforcement des dispositifs aériens et humains.

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Face à l'augmentation des risques d'incendies liés au dérèglement climatique, la France a renforcé ses moyens de lutte contre les feux de forêt.

Annoncé le 28 octobre 2022 par le président de la République lors d'une réunion à l'Élysée avec les acteurs de la lutte contre les feux de forêt, ce dispositif est déployé sur l'ensemble du territoire, et se traduit par l'augmentation du nombre colonnes de renfort de pompiers disponible, des moyens aériens plus conséquents même si les nouveaux canadairs se font attendre.

Les soldats du feu en France et plus particulièrement dans la région Provence-côte d'azur ont commencé à se préparer à lutter face à ces feux de grandes ampleurs. 

Le réchauffement climatique a comme conséquence directe sur les feux, l'allongement de la durée, les lieux de départ (ils se multiplient en montagne aussi) et l'intensité due à la sécheresse et l'augmentation des températures.

Un dispositif aérien et humain renforcé

Depuis 2023, la France peut mobiliser près d'une trentaine d'avions bombardiers d’eau, soit 10 de plus qu’en 2022, ainsi que trois avions de reconnaissance. Ces moyens aériens, essentiels pour attaquer les feux rapidement, sont désormais gérés au niveau national via un centre avancé du Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle des Crises (COGIC) basé à Nîmes-Garons. Ce centre coordonne la répartition des moyens en fonction des besoins sur le terrain, permettant une intervention rapide et adaptée.

Du côté des forces humaines, jusqu’à 2 500 sapeurs-pompiers et sapeurs sauveteurs sont prêts à intervenir en renfort tout au long de la période estivale, et au-delà si nécessaire. En complément, 650 militaires des formations militaires de la Sécurité civile (ForMiSC) viennent renforcer ce dispositif, capables d’intervenir en France et à l’étranger.

Sur des journées à risques comme ce fut le cas ce week-end du 17 et 18 août, où une alerte extrême risque incendie a été émise par Météo-France pour la zone sud, par le biais de la météo des forêts ; des moyens supplémentaires sont requis. "D'abord sur place avec le recours massif aux pompiers volontaires, mais aussi avec l'arrivée de colonnes de pompiers venues de toute la France", précise le colonel Besson.

Il y en a jusqu'à 51 mobilisables, "en étant prépositionnés, ils sont prêts et équipés, sensibilisés, pour être opérant et efficace de suite", indique le colonel Sylvain Besson, directeur départemental des sapeurs-pompiers du SDIS des Alpes-de-Haute-Provence.

Prévention et réactivité : les nouvelles clés de la lutte

Pour le colonel Besson, ce qui fait que peu de surface a été touchée cet été, "c'est l'attaque massive et rapide des services de secours, dans des endroits très difficiles d'accès, mais pour lesquels les moyens aériens en nombre ont montré toute leur efficacité".

Selon lui, "avec des effectifs prépositionnés, des arrivées d'eau en masse dès le départ de feu, cela permet une réaction rapide, et tout cela n'est possible que parce que les conditions d'inflammabilité et les conditions météorologiques sont très précises et permettent d'adapter le dispositif. En plus de la prévention, il y a l'anticipation et une réponse adaptée apportée rapidement".

Dans un temps plus lointain, il insiste sur l'importance aussi de "réaménager le terrain brûlé, et essayer, faire des pistes, mettre des citernes, pour prévenir d'autres incendies dans cette zone".

Avec l'expérience, les dispositifs ont évolués, "la possibilité de se faire submerger par les feux est très diminué par rapport aux années 1980, car on est prépositionné, en 1/4 d'heure des tonnes d'eau arrivent, ce qui permet de le contenir, et être en supériorité", détaille Sylvain Besson, directeur départemental des sapeurs-pompiers du SDIS  des Alpes-de-Haute-Provence.

Grâce à ces nouvelles pratiques, le colonel l'assure, "près de 80% des feux en France sont maîtrisés avant qu'ils atteignent la surface de cinq hectares ".

L'importance de la météo des forêts

Les pompiers de la zone sud travaillent en étroite collaboration avec Météo-France et l'Office national des forêts (ONF) pour anticiper les risques. 

Cinq prévisionnistes spécialisés feux de forêt à Météo France, basé à Aix-en-Provence, se relayent sur toute la période estivale. Chaque département de la zone sud est découpé en huit sous zones. Sur ces zones est étudié le risque météorologique avec la prise en compte de certains paramètres : la température, la vitesse du vent, l'humidité de l’air et les précipitations ainsi que les relevés hydriques de l'ONF.

Cela donne un niveau de sécheresse expertisé. Il existe six niveaux : faible, léger, modéré, sévère, très sévère et extrême. Évaluer le risque incendie au plus proche de la réalité. Ces relevés de sécheresse des végétaux permettent également de réguler, au mieux, les activités humaines.

Chaque fin de journée, à 17 heures, les pompiers de chaque département reçoivent le bulletin météo des forêts établi par Météo France. Et une réunion a lieu avec la préfecture, l'ONF et cela permet de mettre en place le dispositif adapté et de prépositionner correctement les renforts par exemple, ou d'anticiper leur venue comme ce fut cas samedi dernier.

Malgré les moyens renforcés, la prévention reste essentielle. Le colonel Besson insiste : "9 feux sur 10 sont d'origine humaine. Les jets de mégots, les barbecues sauvages et autres pratiques à risque sont responsables de la quasi-totalité des départs de feu." Pour prévenir ces incendies, des mesures comme la création de pistes et de coupe-feux sont aussi renforcés depuis 2023, avec le soutien des militaires déployés dans le cadre du protocole Héphaïstos, désormais opérationnel sur tout le territoire.

Plus de saisonnalité des incendies

"Dès 2040 les dérèglements climatiques perturberaient les conditions météorologiques", indique  l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), "puisqu’une sécheresse extrême conjuguée à une canicule intense pourrait avoir lieu durablement et régulièrement durant les étés dans les territoires méditerranéens".

La région Provence-Alpes-Côte d’Azur est une des régions de France les plus concernées par le risque de feux de forêts, en particulier sur la zone littorale (départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes).

Mais plus seulement, au cours des dernières décennies, environ 130 incendies ont été recensés par an dans les Alpes du Sud en France. La saison propice aux incendies s’est allongée de trois semaines dans cette zone aussi et n’est plus cantonnée à l’été.

"On a déjà adapté notre posture au changement climatique, avec l'allongement des saisons estivales et de plus en plus chaudes et plus longues, et la perte de saisonnalité des feux de forêts, pour être opérationnels toute l'année", explique Jean-Marc Roditis, lieutenant-colonel, chef du groupement risques naturels et feux de forêts au service départemental d’incendie et de secours des Bouches-du-Rhône (Sdis 13).

En renforçant à la fois les moyens de lutte, la prévention et l'anticipation, la France s'adapte aux nouveaux défis imposés par le dérèglement climatique, espérant ainsi contenir efficacement les incendies de forêt qui menacent désormais l'ensemble du territoire national.

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