Réchauffement climatique : pourquoi cultivera-t-on moins d’abricots, mais plus de pistaches en Provence en 2040 ?

Le changement climatique a un impact considérable sur les cultures françaises. En Provence, l'association Conséquences tire la sonnette d'alarme sur les répercussions de la douceur hivernale sur l'arboriculture. D'ici 2040, les arbres comme les abricotiers seront cultivés dans l'Est et dans le Nord de la France.

La douceur hivernale est alarmante. Avec un excédent thermique national de +4 °C, la première quinzaine de février s'inscrit comme la plus douce jamais enregistrée en France. Des conditions climatiques exceptionnelles qui posent un défi majeur pour les agriculteurs de la région, en particulier ceux spécialisés dans l'arboriculture. Dans un rapport paru le 19 février dernier, l'association Conséquences alerte sur la nécessité d'une transition progressive des filières agricoles.

Un changement de paysage

Pour Serge Zaka, l'agroclimatologue à l’initiative de l'étude menée par l'association conséquences, "le changement climatique va provoquer des modifications profondes des aires de compatibilité de certaines cultures avec certaines régions, ce qu’on appelle la biogéographie".

Le Sud de la France se positionne comme la nouvelle terre propice à des cultures telles que le pistachier, l'olivier, les nèfles et les agrumes. Les arboriculteurs sont déjà nombreux à ouvrir la voie à une adaptation de leurs cultures. L'abricot Bergeron par exemple, sera cultivable dans l'Est et dans le Nord de la France dès 2040 tandis que le Sud lui sera propice à la culture de nouvelles productions.

La pistache, une filière en pleine émergence

Face au bouleversement climatique, les arboriculteurs se tournent progressivement vers de nouvelles cultures. Michel André, agriculteur à Cavaillon, a déjà introduit des pistachiers dans ses champs, une alternative qui nécessite du temps avant de donner pleinement ses fruits. Néanmoins, ces arbres particulièrement résistants face à la sécheresse représentent une alternative porteuse d’espoir pour l’avenir.

En France, plus de 96 % des fruits à coque consommés sont issus de l'importation. La culture de la pistache avait été abandonnée sur le territoire depuis le 19e siècle. En 2018, elle reprend peu à peu sa place dans les champs avec une première filière plantée dans le Vaucluse. Depuis, près de 400 hectares de pistachiers ont vu le jour, dont 250 en Provence.

Une transition nécessaire face au climat actuel

Depuis quelques années, les arboriculteurs sont confrontés à de nouvelles problématiques dans les cultures traditionnelles de la région. Le premier défi : faire face aux "faux printemps" qui nuisent gravement à l'agriculture. Les floraisons précoces s'ajoutent à l'angoisse des agriculteurs qui voient le risque de gel tardif augmenter. Ce dernier pourrait être la cause de dégâts importants avec des risques estimés à plusieurs milliards d'euros, comme ce fut le cas en 2021.

La fatigue végétale et la vernalisation compromise menacent également la survie des arbres. La diminution des jours de gel favorise la multiplication des ravageurs et accentue les défis agricoles. "J'ai peur des gelées tardives et du manque d'eau pendant l'été. S'il gèle dans quelques semaines sur mes bourgeons, c'est la catastrophe", s’inquiète Michel André en vue de la douceur hivernale croissante.

Une adaptation sur la durée

Face aux obstacles rencontrés, la nécessité d'adapter les cultures devient impérative pour assurer une production continue. Cependant, la transition doit être soigneusement organisée et progressive. Elle implique des défis tels que la gestion des revenus et la nécessité d'infrastructures d'irrigation. Pour Marc Fauriel, arboriculteur dans la Drôme, "pour s'adapter au changement climatique, ce qu'il nous faut, c'est de la marge de manœuvre, au niveau des revenus".

Selon Sylvain Trottier, directeur de l'association Conséquences, "l'adaptation au changement climatique des décennies à venir nécessite une mobilisation et un changement de logiciel. Sans compter qu'au-delà d’un certain niveau de réchauffement, cette adaptation a aussi ses limites." L'enjeu dépasse la simple adaptation, le rapport souligne l'impératif d'une transition progressive des filières agricoles pour assurer la souveraineté alimentaire française pour les années à venir.

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