Coronavirus : ces pièges du confinement qu'il faut éviter selon le psychiatre Guillaume Fond

Comment s'adapter au confinement ? Pour certains, les plus anxieux, le cap n'est pas facile. Et pour les autres, rien n'est évident non plus. Le psychiatre marseillais Guillaume Fond nous accompagne dans cette expérience nouvelle pour tous, et donne quelques recommandations.

C'est une période inédite... Nous nous retrouvons subitement tous confinés. Avec plus ou moins de bonheur selon la taille de notre appartement et sa situation géographique, selon qu'on est seul ou à plusieurs etc...

Chez les plus anxieux...

En tous cas, chacun va devoir vivre au mieux ce confinement.

"C'est compliqué à gérer pour les personnes angoissées de nature", explique le docteur Guillaume Fond, psychiatre et chercheur en santé publique au CEReSS (Centre d'études et de recherche sur les services de santé et la qualité de vie).

Particulièrement pour les gens sensibles aux mauvaises nouvelles. "Celle du Coronavirus est différente d'autres comme le dérèglement climatique. Car elle a un impact visible et immédiat dans notre quotidien, et la crise sera courte".

Il y aura un phénomène de pression pendant le confinement qui se terminera par une libération.

Parmi les nouvelles, il y a aussi des messages contradictoires, "anxiogènes" selon l'expert.

"Mes patients me demandent : est-ce que le virus disparaîtra avec la chaleur ou pas ? En tant que médecin, je ne peux même pas leur répondre, car des études contradictoires s'opposent sur cette question".

Autre "annonce anxiogène" dénoncée par le psychiatre : le nombre de morts et de cas avérés. 

"Là encore, on nous indique que la moitié des personnes décédées ont moins de 60 ans, mais on ne donne pas plus d'explications. Avaient-ils d'autres pathologies ? Dans quelle tranche d'âge ?"

Pour le Dr Guillaume Fond, ce genre de nouvelles rajoute à l'inquiétude des gens.

Le but est de faire peur. Et la peur génère des troubles psychiatriques.

Et augmente le nombre de patients chez les psychiatres et autres soignants psy, selon le praticien. 

"A partir du moment où l'on a une vulnérabilité, tous les facteurs de stress peuvent révéler un trouble anxieux. Il s'agit d'une pathologie connue qui rassemble ces symptômes : panique, crise d'angoisse (au moins d'un quart d'heure) accompagnée de sueurs, sentiment de mort imminente."
 

Certains vont découvrir qu'ils ne supportent pas l'enfermement.

Mais pour tous, il va falloir apprendre à mieux nous connaître nous-mêmes.

Attention aux addictions

D'un monde qui nous stimule en permanence, où des objets extérieurs nous sollicitent sans cesse, nous sommes passés subitement à l'isolement...

"D'un coup isolés de tout cela, nous nous retrouvons face à nous mêmes. Cela peut révéler qu'on ne supporte pas d'être face à soi-même."

Certains vont ruminer. Mais "la rumination est génératrice d'angoisse. Ils vont commencer à boire, ou à fumer", averti le spécialiste. 

Attention au piège ... de l'addiction. Le confinement n'est pas le bon moment pour augmenter le nombre d'apéros, et la boisson alcoolisée. Ni même sa consommation de tabac.

"Le tabac et l'alcool participent aux effets de la dépression", précise le psychiatre. "Plusieurs études le prouvent".

Eviter de grignoter

Ca n'est pas le moment non plus de se ruer sur la nourriture et de sacrifier au grignotage durant la journée.

Là encore, il y a un équilibre à conserver, que le Dr Guillaume Fond explique bien dans son ouvrage "Je fais de ma vie un grand projet", paru chez Flammarion.
 

L'heure à laquelle on prend nos repas détermine les rythmes hormonaux

"Si l'on grignote, on déséquilibre notre système hormonal. Et cela peut engendrer plusieurs conséquences", précise le psychiatre.

"Le cortisol, l'hormone du stress peut-être ainsi perturbé, ou la mélatonine, l'hormone de l'endormissement. Un repas trop riche et pris trop tard par exemple, aura un effet sur notre début de sommeil."

Des études montrent aussi qu'une mauvaise alimentation peut détruire l'équilibre de notre flore intestinale. Et provoquer des effets inflammatoires. Qui peuvent agir sur notre santé mentale... Rien de bien réjouissant. 

C'est ce qu'explique le psychiatre dans ce reportage de France 3 Provence, que nous avions tourné bien avant l'épidémie de coronavirus.

De bonnes raisons de positiver

Il y a malgré tout de bonnes de bonnes raisons de rester positif dans cette période particulière due à l'épidémie. 
 

Le confinement peut être une bonne occasion de trouver son bon rythme alimentaire

"On peut profiter de cette période disponible pour cuisiner. Ca n'est pas compliqué. Pas besoin d'avoir des aliments frais. Les conserves ou surgelés font très bien l'affaire", poursuit le Dr Guillaume Fond. 

"Le mélange céréales, légumineuses et légumes verts apporte le sucre nécessaire au cerveau pour son bon fonctionnement", insiste le psychiatre.

Autre exemple, du maïs mélangé aux haricots rouges et haricots verts, "un bon mélange, efficace aussi contre l'inflammation".

Le confinement... comme un entraînement

Pour le psychiatre marseillais, "le confinement peut être vu comme un entraînement pour réguler ses émotions".

Il existe déjà plusieurs techniques de méditation validées médicalement dans les hôpitaux.  Elles interviennent dans la prévention de la dépression et des troubles anxieux. 

"Elles permettent d'apprendre à identifier ses émotions, et à les accepter pour ne pas les laisser se déployer dans notre être".

Le Dr Guillaume Fond recommande ces techniques de Mindfullness, MBSR ou MBCT, en libre accès sur internet, durant le confinement. 

Le confinement en psychiatrie

Les services de psychiatrie font en sorte de traiter le plus possible les patients à domicile. En tous cas, ceux atteints de pathologies les moins sévères, comme la dépression et l'addiction. 

Pour les autres, hospitalisés dans les différentes unités, des dépistages intensifs du coronavirus ont été pratiqués.

Un premier cas a été détecté à Montperrin (Aix). Un pavillon de lits programmés a été dédié aux malades du Covid-19. 

Les patients stabilisés doivent poursuivre leur traitement "et ne surtout pas en changer pendant le confinement. Cela n'est pas le moment", précise le Dr Guillaume Fond.

"Toutes les consultations ont été transformées en téléconsultations", poursuit-il. "On appelle les patients à leur domicile et on leur envoie leur ordonnance par mail ou par la poste."

C'est l'avantage de la psychiatrie, on peut dématérialiser pas mal de choses, selon le spécialiste.

"Il y a beaucoup de débat à ce sujet. Une fois passé le confinement, on vérifiera si le nombre d'hospitalisations en urgence aura augmenté ou non".

En cas de décompensation (rechute), les services de psychiatrie travaillent avec les équipes du Samu. 

Pour les cas nécessaires, des équipes ambulatoires sont prévues. "C'est un virage vers lequel on tend depuis plusieurs années. Mais le système est difficile à mettre en place par manque de moyens".
 
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