Le collectif ALERTE Paca se mobilise mardi 17 octobre à Briançon pour dénoncer "les carences des politiques publiques" dans l'accueil des migrants et alerter "sur la crise humanitaire qui se joue" dans la région.
"On a au moins 300 personnes en permanence en ce moment à Briançon", estime Guillaume Debrie, coordinateur régional de Médecins du Monde, et un des portes-paroles du collectif Alerte Paca qui se mobilise le 17 octobre pour alerter sur "la crise de l'accueil des migrants" dans la région.
Le collectif Alerte Paca pointe que les associations ont de plus en plus de mal à pallier seules les carences de l'Etat, sur les axes de passage des migrants, à Briançon, ou aux points de fixation des personnes éxilées comme à Marseille.
"Une absence totale de prise en charge"
"L'objectif, c'est de dire 'attention', on est dans une situation qui risque de dériver vers une crise humanitaire, parce qu'il y a une absence totale de prise en charge, et on a des personnes qui se retrouvent avec des risques très forts sur le plan médical, mais aussi psychique", explique Guillaume Debrie.
"On ne va pas pouvoir tenir très longtemps, avec un milieu associatif en tampon qui assure ce qu'il peut avec des moyens assez limités, ça risque de craquer.
Guillaume Debrie, coordinateur régional de MDMFrance 3 Provence Alpes
Une situation moins tendue que cet été
A Briançon, la situation est particulièrement tendue depuis cet été. Avant même la crise de Lampédusa, la commune des Hautes-Alpes proche de la frontière italienne, a dû faire face un afflux migratoire inédit, avec 2000 arrivées pour le seul mois août, "l'équivalent du cumul des six mois précédents" selon Constance Tricard, conseillère technique "Lutte contre les exclusions" à l'URIOPSS Paca, un réseau régional d'acteurs privés non lucratifs de solidarité. Elle souligne par ailleurs que sur ces 2000 migrants, 46% se présentent comme mineurs.
Face à cet afflux, le centre d'accueil des Terrasses solidaires, d'une capacité de 80 personnes, submergé, a dû fermer ses portes Les migrants qui arrivent n'ont plus de toit pour s'abriter. En septembre, les contrôles militaires ont été renforcés pour refouler les migrants aux points de passage. Mais ils continuent de prendre des risques pour passer la frontière depuis Turin.
"Ça continue, pas dans la même ampleur qu'en août, mais on a eu un mois de septembre très haut, et on attend l'hiver avec inquiétude", confie Guillaume Debrie.
Inquiétude avant l'hiver
"S'ils n'y arrivent pas une première fois, ils tentent une deuxième fois et ainsi de suite", fait simplement remarquer Guillaume Debrie. Avec l'arrivée du grand froid, les risques vont encore s'accroître pour les candidats à l'exil. "On a des équipes bénévoles qui organisent avec Tous migrants, un des acteurs solidaires locaux, des maraudes médicales pour récupérer les gens en montagne, parce que l'hiver, la traversée du col de l'Echelle (NDLR : 1 762 mètres d'altitude) est très périlleuse."
Créé en 1904, le collectif Alerte Paca, qui rassemble une vingtaine d’associations régionales engagées contre la précarité et l’exclusion, dénonce "les politiques publiques fondées sur une approche répressive/sécuritaire au détriment des droits fondamentaux et du vivre ensemble". Il a choisi le mardi 17 octobre, journée mondiale du refus de la misère pour sa prise de parole à Briançon.
"On demande qu'il y ait un accueil digne qui soit organisé pour les personnes, qu'on respecte leurs droits, à la santé, à l'hébergement, et on attend qu'une réponse soit apportée", indique Constance Tricard.
Fermeté à la frontière
Le maire LR de Briançon, Arnaud Murgia, juge difficile de chiffrer le nombre de migrants présents sur sa commune actuellement, mais c'est selon lui bien moins que les chiffres avancés par les associations. A la fermeture des Terrasses Solidaires, le 30 août, le maire avait écrit dans un tweet "je m’oppose à la réouverture du site. Tout cela n’a que trop duré, et j’emploierai tous les moyens de droits en ma possession".
Aujourd'hui, l'élu estime que la situation a été "jugulée", "même si elle n'est toujours pas satisfaisante", depuis le déploiement d'une centaine de militaires et fonctionnaires ces trois dernières semaines pour "étanchéifier la frontière", selon les mots du préfet du département, Dominique Dufour.
Des passages en baisse mais qui restent en forte hausse par rapport à l'an dernier. 343 interpellations ont eu lieu entre le 9 et le15 octobre, contre 84 aux mêmes dates en 2022. Ce qui porte à 4743 le nombre d'interpellations depuis le début de cette année, soit 1348 de plus qu'à la même période l'an dernier. Parmi les migrants interpellés, 3800 ont fait l'objet d'une procédure de non-admission et ont été remis aux autorités italiennes, c'est 39,3% de plus qu'en 2022.
Selon les derniers chiffres publiés par l'Union Européenne, 194 269 arrivées irrégulières ont été enregistrées depuis le début de l'année, ce qui, à l'échelle de l'UE, ne représentent que 0,05% de la population, rappelle le collectif Alerte Paca.