La chaleur extrême de ce début d'automne n'est pas sans conséquences pour les producteurs locaux. Les envies des consommateurs changent et les rythmes ne sont plus les mêmes pour les maraîchers notamment. Reportage à La Freissinouse, dans les Hautes-Alpes.
En ce début du mois d'octobre, difficile de se dire que l'automne est bien là. Sur le thermomètre, les températures sont bien au-delà des normales de saison. Et comme on s'en doute, cela a des conséquences sur les cultures. Résultats, dans les cuisines, la courge n'est toujours pas dans la marmite, tandis que la tomate et les aubergines, elles, sont encore au cœur de nos assiettes.
Des récoltes décalées
Dans les Hautes-Alpes, le calibre des aubergines est exceptionnel. En trente ans de maraîchage, Jean-Bernard Drion, maraîcher bio, n'a jamais connu d'aussi belles récoltes au mois d'octobre. "Ici, ce sont surtout les nuits qui nous pénalisent d’habitude. Et là, comme on est au-dessus de 10 degrés depuis le début de l’été, on a une production quasiment identique à l’été. C’est un légume qui se mange tout le temps, donc on le vend bien", explique Jean-Bernard.
Car sur le marché aussi, difficile de se croire en automne. Et les envies des consommateurs restent estivales. Courge contre tomate, le match est vite plié. "On préfère la tomate encore, la courge, c'est plutôt pour novembre", lâche une première cliente. "Tomate, parce qu’on a encore la chaleur, on mange des plats de frais avec des tomates, des belles salades. On se retrouve un peu en décalage avec les produits qu’il y a par rapport à la saison", déclare un autre client.
Repenser ses pratiques
Une différence qu’il faut gérer dans les champs. Maria Panitskas, maraichère bio, ne peut plus proposer les mêmes légumes qu’il y a dix ans. "Comme on est en zone de montagne, on est tenu par l’hiver et les températures négatives qui vont arriver. Même si elles se sont décalées de cinq ou six semaines, elles arrivent quand même. Et au moment où on doit semer le petit pois, il fait encore beaucoup trop chaud. Là, il y a sept ou huit ans, c'était encore réalisable. Cette année, on n'en a pas semé du tout".
Avec le climat, c'est donc tout un métier qui change. Mais les petits pois ne sont pas les seules victimes du réchauffement climatique. La carotte, elle aussi, en prend pour son grade, en se faisant dévorer par de nouvelles chenilles. "Quand on avait des températures négatives, des -10 ou -15 degrés, au minimum pendant un mois dans l’hiver, ça nettoyait un peu la vermine, s’amuse Maria, avant de revenir à la réalité. Maintenant, on n’a plus ça."
Désormais, chaque saison réserve son lot de surprises et de difficultés pour les agriculteurs, obligés de repenser leurs pratiques. En France, comme dans le monde, ce mois de septembre a été le plus chaud jamais enregistré.