L'avocat toulousain a plaidé ce mardi pour son client, pour qui il a demandé "une peine juste". Il a la particularité d'avoir été aussi l'avocat de Mohamed Merah.
C’est un peu pour l’un des plus anciens avocats du barreau de Toulouse (inscrit depuis 1978) une manière de boucler la boucle : celui qui avait défendu Mohamed Merah devant des juridictions de droit commun, bien avant les attentats de 2012, est l’un des conseils de Fettah Malki, devant la Cour d’assises spéciale qui juge depuis le 2 octobre les complices présumés de Mohamed Merah.
Quand il a appris en mars 2012 que c’est Mohamed Merah le terroriste de Toulouse et Montauban, il a d’abord cru à une plaisanterie. “Tiens moi aussi j’ai défendu un Mohamed Merah”. Puis il comprend que c’est le même individu que le petit délinquant qu’il défend depuis 2008 et qu’il défendait encore en février 2012 pour un accident de moto alors qu’il n’avait pas le permis.
La boucle est donc bouclée pour l’avocat toulousain, qui a ouvert mardi matin la séquence des plaidoiries de la défense, au lendemain d’un réquisitoire particulièrement sévère au cours duquel l’avocate générale Naïma Rudloff a requis la réclusion criminelle à perpétuité pour Abdelkader Merah et 20 de prison pour le client de Christian Etelin, Fettah Malki.
Et d’emblée, il a qualifié les réquisitions de “sanction terrible, disproportionnée, inhumaine, infligée à celui dont on sait qu’il n’a rien d’un terroriste. Il serait terroriste par “potentialité”, j’ai écouté cela avec un certain effroi”.
Il aurait dû voir le potentiel terroriste de Merah alors même que la DCRI et Bernard Squarcini n’ont rien vu ! (Christian Etelin)
Le Toulousain Christian Etelin, qui a défendu José Bové ou encore l’ancien d’Action Directe Jean-Marc Rouillan, et qui a, tout au long du procès eu à ses côtés son épouse, avocate également, Marie-Christine Etelin, a fustigé les paroles de l’avocate générale : “Après 4 heures de réquisitoire, on a signifié à mon client en 10 minutes, qu’il devrait exécuter 20 ans de prison. 20 ans contre quelqu’un qui n’a rien avoir avec toute volonté de jihad et que même il en est l’ennemi. Il est horrifié par ce que Mohamed Merah a commis, notamment en tuant les enfants. Ce petit “commerçant de quartier” n’a certes pas réfléchi quand il a donné une arme à Merah. Mais qu’il soit assimilé au terrorisme alors qu’il y est étranger et opposé, c’est extraordinaire”.
“Concernant Adbelkader Merah, poursuit Maître Etelin, on juge une intention. L’idée peut devenir matière. Ce que l’on peut deviner dans une intention, devient acte matériel. Fettah Malki a réalisé l’acte matériel, en fournissant l’arme et le gilet pare-balles, mais ou est l’intention ?”
Qui peut penser, poursuit l’avocat, qu’en fournissant le mini-Uzi, Fettah Malki pense, désire, adhère à la volonté de Mohamed Merah d’aller tuer des militaires et des enfants juifs, parce qu’ils sont juifs ? Personne !
Pour cet avocat militant, ce procès va au-delà des personnalités de Malki et Abdelkader Merah. “Il s’agit de s’interroger sur nous-mêmes : vont-ils servir de leurre ? Faut-il croire qu’en les offrant à la plus forte sanction possible, cela va stopper la production d’individus qui vont partir en guerre contre notre société ? Il faut s’interroger sur nous-mêmes, sur la faillite du système éducatif, de l’intégration. On ne peut pas faire l’économie de cette question”.
Christian Etelin a également fait, avant de débuter sa plaidoiries, un rappel personnel sur ces jours noirs de mars 2012 à Toulouse et Montauban : “En défendant Malki, je me sens totalement solidaire des parties civiles. Nous sommes avec vous, nous partageons les mêmes valeurs. Mais les droits de la défense sont essentiels”.