La Région confirme la suspension de ses subventions à la ville de Grenoble, annoncée après la délibération du conseil municipal autorisant le burkini dans les piscines municipales. Bien que le Conseil d'Etat ait retoqué cette délibération, le président de Région demande à Eric Piolle de signer sa "charte pour la défense des valeurs de la France et de la laïcité".
La décision du Conseil d'Etat n'y changera rien. La Région Auvergne-Rhône-Alpes a annoncé maintenir la suspension de ses subventions à la ville de Grenoble, décision prise à la suite de la délibération du conseil municipal autorisant le port du burkini dans les piscines municipales.
La plus haute juridiction administrative - saisie par la municipalité grenobloise - a annulé cette mesure, estimant qu'elle constituait "une dérogation très ciblée" destinée à "satisfaire une revendication religieuse". Et malgré cette annulation, l'exécutif régional ne revient pas sur sa décision.
"La Région Auvergne-Rhône-Alpes maintiendra la suspension de ses subventions à la ville jusqu’à la signature de cette charte ('pour la défense des valeurs de la France et de la laïcité', NDLR) par le maire de Grenoble", indique-t-elle dans un communiqué mercredi 22 juin. Cette charte a été adoptée par la Région en assemblée plénière en mars dernier.
Le texte, vivement contesté par les oppositions, autorise l'exécutif à suspendre ses aides "à des structures qui ne respecteraient pas nos valeurs républicaines". Cette charte promeut, pêle-mêle, "l’hymne national, le drapeau tricolore (…) la langue française", "s’attache à lutter contre les intégrismes" et "défend la liberté des femmes, notamment celle de pouvoir circuler librement dans l’espace public et de ne pas se faire imposer des choix en matière vestimentaire." Une référence à peine masquée à la délibération sur le burkini à Grenoble contre laquelle s'était insurgée le président de région (LR) Laurent Wauquiez.
1,5 million d'aides
Laurent Wauquiez avait dénoncé dans un post Facebook, le 20 février, "la folie islamo-gauchiste qui s’est emparée d’élus et d’intellectuels français et qui constitue une menace pour la République qu’on aurait tort de sous-estimer." La Région précise que la charte sera prochainement amendée pour y ajouter "l'argumentation du Conseil d'Etat".
Et de fixer une condition pour que les subventions régionales à la commune soient rétablies : la signature de cette même charte par le maire écologiste de Grenoble, Eric Piolle. Ce dernier avait estimé à 1,5 million d'euros la participation de la Région aux investissements municipaux.
Le président de région s'est félicité de la décision de la haute juridiction. Sur Twitter, il tacle le "séparatisme du maire de Grenoble". "Le burkini n'a définitivement pas sa place en France. Nous ne transigerons pas avec les valeurs de notre pays", écrit-il. Eric Piolle a pour sa part annoncé "prendre acte" de la décision du Conseil d'Etat, tout en regrettant que le juge administratif prête à la commune "des intentions qu'elle n'a pas".
"Ca fait deux ans que la Région a coupé tous ses financements", a estimé mercredi devant la presse le maire écologiste de Grenoble, réagissant à l'annonce du président de Région. "Nos désaccords politiques sur certains sujets - on en a énormément avec Laurent Wauquiez - ne nous empêchent pas de travailler en tant qu'institution municipale", a-t-il ajouté.
L'édile estime par ailleurs que la charte mise en place par la Région "s'assied sur la loi de 1905". "Pour nous, c'est un des fondamentaux de la République", dit-il, avant de conclure : "Il y a une volonté d'ostraciser une communauté (…) Je ne crois pas que cela soit bon pour la société française et je resterai solide sur mes valeurs."