Les personnes extérieures aux Ehpad sont interdites de visite dans ces établissements depuis mercredi pour limiter la propagation du coronavirus. Les familles de résidents, partagées entre compréhension et inquiétudes, font part de leurs doutes.
C'est l'une des nouvelles conséquences de l'épidémie de coronavirus, les visites dans les établissements d'hébergement des personnes âgées (Ehpad) sont suspendues jusqu'à nouvel ordre. La décision annoncée mercredi 11 mars par Emmanuel Macron est comprise, mais appréhendée par les familles de résidents.
"Quand on rentre en Ehpad, on n’en sort pas debout. C’est trop cruel de laisser une personne qu’on sait en fin de vie sans famille", estime Françoise Dubreuil dont la mère est résidente à l'Ehpad de la Barre à Saint-Jean-de-Bournay (Isère). En temps normal, elle allait rendre visite plusieurs fois par semaine à sa maman qui connaît parfois des jours difficiles dans cette structure, malgré l'implication du personnel soignant.
Doutes et inquiétude
"Quand maman ne veut pas se lever, les aides-soignantes n’arrivent pas toujours à la convaincre mais quand on est là, c'est différent. Quand je lui parle, je lui fais des câlins, ses yeux s’éclairent et je vois que ça va mieux", témoigne-t-elle, affirmant que sa mère a besoin de cette "présence familière" pour supporter l'isolement de la vie en Ehpad.
Pour les familles, l'inquiétude et le doute dominent. Combien de temps cette mesure va-t-elle durer ? N'est-elle pas disproportionnée ? De son côté, Françoise Dubreuil "comprend" mais se dit "triste", inquiète que sa mère qui ne parle déjà plus beaucoup "sombre complètement dans la léthargie".
Quand les visites étaient réduites au strict minimum, Françoise Dubreuil prenait déjà toutes les précautions pour ne pas infecter les personnes âgées. "Mes enfants rentrent tout juste d'une zone à risque, donc j'ai décidé de ne pas les voir pour ne pas risquer de contaminer les résidents."
Maintenant qu'elle ne peut plus passer la porte de l'Ehpad, impossible même de décrocher le téléphone pour avoir des nouvelles de sa maman qui ne répond jamais. "Je ne vais pas non plus déranger les aides soignantes, elles vont déjà devoir gérer tout l’étage avec une cinquantaine de patients", désespère-t-elle.
Possibles exceptions
Fini aussi le loto du lundi qu'elle animait avec plusieurs membres de son association des familles et des bénévoles de l'Ehpad. "On avait pris en charge quelques animations pour maintenir de la vie (...) maintenant ça va être compliqué pour l'animatrice qui va devoir tout faire toute seule", poursuit Françoise Dubreuil, co-présidente de cette association.
Ces activités étaient déjà suspendues depuis lundi, ajoute Thérèse Blanc, présidente de l'association de bénévoles, jugeant cette mesure "difficile pour les résidents et les familles". Malgré l'interdiction de visite, des exceptions pourront être décidées pour des cas déterminés par le directeur d'établissement, en lien avec l'Agence régionale de santé (ARS) et la préfecture, a indiqué le gouvernement mercredi soir.
Cette exception risque d'être appliquée uniquement aux résidents en fin de vie, craint Françoise Dubreuil qui se questionne : "Entre l'épidémie de grippe saisonnière où on ne fait presque rien et l'épidémie de coronavirus où on fait beaucoup, n'y a-t-il pas un juste milieu ?"
En Auvergne-Rhône-Alpes, 262 personnes ont été testées positives au Covid-19 dont 39 cas supplémentaires entre les journées de mardi et mercredi. L'épidémie se propage et l'inquiétude monte en Isère, département un temps épargné qui compte désormais quatre cas de coronavirus.