Pour la première fois en France, un médicament à base d'extraits de chanvre obtient une autorisation de mise sur le marché. Le Sativex pourra être prescrit à "certains patients souffrant de sclérose en plaques, pour soulager les contractures sévères résistant aux autres traitements"
De nombreux pays d'Europe ont déjà autorisé ce produit et la France était l'un des derniers sur le continent où il n'était pas possible de le prescrire en raison d'une législation interdisant l'usage de produits à base de cannabis.
Ce verrou a sauté en juin dernier avec la publication d'un décret autorisant la vente ou fabrication de tels médicaments, puis tout récemment avec la première autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par l'ANSM, l'Agence française du médicament.
Le professeur Thibault Moreau, chef de service de neurologie au CHU de Dijon, milite depuis longtemps pour l'introduction de ce médicament. Selon lui, le Sativex est une réelle avancée pour les patients. Il est préconisé pour les malades atteint de la sclérose à poussées (85% des cas) qui souffrent de spasticité. "La spasticité, explique le professeur Moreau, se manifeste par des contractures musculaires, parfois très douloureuses, avec une raideur et des spasmes au niveau des membres inférieurs. Chez certains patients, c'est très pénible, car cela peut gêner la marche ou perturber le sommeil."
Le Sativex se présente sous la forme d'un spray buccal à base d'extraits de plantes et de cannabis, et sa délivrance est très encadrée. La première prescription devra obligatoirement être faite à l'hôpital, par un neurologue ou un médecin de réadaptation. ce spécialiste devra revoir le patient tous les six mois. la prescription ne sera valable que pour 28 jours, le patient devant à chaque fois obtenir son renouvellement chez son généraliste.
Une autorisation trop restrictive
En France, beaucoup de médecins et d'associations s'agacent des critiques à l'encontre de cette AMM, suspectée par certains d'être un premier pas vers une dépénalisation du cannabis. "Cela fait des décennies que nous utilisons en médecine des produits à base de morphine, cela n'a jamais entraîné la dépénalisation de l'héroïne" estime ainsi le professeur Patrick Vermersch, chef de service de neurologie du CHU de Lille.
A l'inverse, des praticiens jugent "trop restrictive" l' AMM délivrée pour le Sativex. Addictologue à l'hôpital de Montfermeil, le docteur Bertrand Lebeau estime que "les médicaments à base de cannabis peuvent se révéler utiles pour d'autres usages, notamment la diminution des nausées et des vomissements chez les malades du cancer ou la stimulation de l'appétit. Ils peuvent aussi avoir un intérêt pour soulager les patients vivant avec le VIH-sida ou une myopathie."