Ce sont les militaires qui le disent : "La population nous aime"

Après les attentats contre Charlie, des policiers et des Juifs, le plan Vigipirate a été renforcé. Les militaires sont encore plus sollicités pour assurer la défense de la population... Le regard des gens sur l'armée a-t-il changé ?

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En début de semaine, les Francs-Comtois de l’IHEDN (Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale) fêtaient la nouvelle année… Ces vœux réunissaient militaires et civils de la région. La Franche-Comté est une région militaire : avec 6 régiments, 2 Etats-Major et des bases de défense, pour un total d'au moins 7000 hommes.
L’occasion de demander aux uns et aux autres de parler du rôle de l’armée et du regard que porte la population sur ses militaires, après la série d'attentats sanglants.
Entretiens avec un civil et deux militaires...


Jean-Claude Jeune est le président de l'IHEDN (Institut des Hautes Etudes de la défense Nationale) pour la Franche-Comté.

Quand est né l’IHEDN et pourquoi ?
« L’IHEDN est né juste après la seconde guerre mondiale pour resserrer les liens entre l’armée et la nation, pour porter des valeurs et faire en sorte que civils et militaires se comprennent mieux. »
Quel est le regard de la population sur l’armée ?
« Les Français sont indifférents ou aiment leur armée. Un sondage disait il y a trois ans que 70 % d’entre eux souhaitaient voir le budget de la défense augmenter. On n’est plus dans les années 70 où l’antimilitarisme était important. La preuve : nous organisons des formations pour des enseignants sur la stratégie géopolitique intitulée « Planète sous tensions ». Nous avons plus de demandes que de places offertes ! »
Et ce sont des militaires qui donnent les cours ?
« Oui, principalement à des professeurs d’histoire-géographie. »
Depuis les attentats, le regard de la population sur l’armée a-t-il changé ?
« Les gens sont contents de savoir qu’une armée existe, qu’elle est là pour les défendre en cas de besoin. Mais je vois deux écueils : l’Europe et le financement. Déjà de Gaule disait qu’il fallait faire deux Europe, celle de la monnaie et celle de la défense. L’euro, c’est fait… Mais pour l’Europe de la défense, on en est loin… Il manque en Europe une volonté politique et en France, une volonté budgétaire. Le budget de la France pour la défense c’est 30 milliards d’euros, soit 1,3 % - 1,4 % du PIB. Dans les années 60, en pleine guerre froide, c’était 6 % du PIB. 30 milliards, c’est la moitié des aides sociales ou encore, toujours à titre de comparaison, la moitié de la fraude fiscale… A la suite des attentats et du déploiement des militaires sur le terrain, François Hollande a annoncé que les postes qui devaient être supprimés dans l’armée ne le seraient pas… C’est une bonne décision mais … je ne suis pas très optimiste pour le financement de la défense, dans l’avenir… »

Présents à cette soirée, des militaires, forcément. Deux d’entre eux ont répondu à quelques questions, le colonel Michel Ledanseur, adjoint du général de Lapresle, général de la 7ème brigade blindée et le colonel Stéphane Faudais, du 6ème régiment du matériel.
Ces deux militaires se félicitent d'abord de la rapidité avec laquelle des militaires ont été tout de suite sur le terrain.
«  En quelques heures, on était opérationnel et en 96 heures, 10 500 hommes (Hommes et femmes, près de 15 % des effectifs de l’armée sont des femmes, ndlr) étaient déployés sur le terrain. Il était prévu que 13 000  postes devaient être supprimés d’ici 2019… un chiffre à rapprocher des 10 500 actuellement mobilisés par Vigipirate. »

Après la mobilisation de l’armée suite aux attentats, le regard de la population a-t-il changé sur l’armée ?
ML : « Non, déjà avant les événement, on peut dire que 85 % des Français aiment leur armée. Ce sentiment est-il lié aux opex (opérations extérieures, type Afghanistan ou Mali, ndlr ), je ne sais pas. Mais quand on garde des édifices publics, les gens nous amènent des pâtisseries. Quand on était en train de faire un footing, cette semaine, un automobiliste s’est arrêté pour nous applaudir… »
SF : « Non, rien n’a changé dans le fond. La population éprouve de la bienveillance pour nous, militaires. Les marques d’estime sont simplement plus fréquentes, plus visibles. Les gens comprennent bien que nous avons qu’une seule mission : la protection de la population. Qui plus est, dans un cadre légal. Nous ne faisons pas n’importe quoi. 
ML « Quand nous sommes au Mali, nous protégeons la population, même si nous sommes loin. Notre action sur le territoire national nous rapproche de la population physiquement et affectivement.

Faut-il instaurer à nouveau un service national avec souscription obligatoire ?
ML : « Pour faire quoi ? Nous ne voulons pas faire l’éducation des gens. Depuis la chute du mur de Berlin, le cadre a changé. Il nous faut, non plus une armée de masse (avec des appelés, ndlr) mais une armée professionnelle et très bien équipée.
SF : « Nous participons à Vigipirate depuis au moins 10 ans. Nous sommes prêts, formés. On sait faire vite et bien. »

Dans l’armée, certains militaires sont musulmans, y a-t-il des difficultés ?
ML : C’est un soldat musulman est déjà soldat. Il accomplit la mission qui lui a été confiée.
SF : c’est un faux problème. La laïcité à la mode militaire fonctionne très bien. L’armée n’est pas un lieu de questionnement ou de débat. Des aumôniers de toutes les confessions cohabitent. Nous, c’est laïcité et autorité. Comme quoi, c’est possible… »


Quelques précisions :

Les militaires interviennent en renfort des effectifs de la gendarmerie et de la police depuis le 7 juillet 2005, suite aux attentats de Londres (Au départ, 1000 soldats).
Montant du budget de la défense en France : 31,4 milliards d’euros.
Dans le cadre de Vigipirate en Franche-Comté, les militaires sont déployés sur le terrain pour surveiller des édifices à Belfort ou à Besançon, comme par exemple, la gare ou la synagogue.

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