Climats de Bourgogne à l’Unesco : l’expert demande le report de l'inscription

L’expert de l’Icomos - l'organe chargé de l’examen « scientifique » de l'Unesco - a rendu son avis consultatif sur la candidature des Climats de Bourgogne, ce vendredi 15 mai 2015: il s'agit d'un avis de renvoi. Mais ce dernier a reconnu la valeur universelle du dossier

C'est désormais officiel! L'expert de l'Icomos, passé cet automne en Bourgogne, demande un renvoi de la candidature des Climats de Bourgogne. Son avis est purement consultatif. La décision définitive sera prise en juillet par le Comité du patrimoine mondial de l'Unesco.

Les motifs de cet avis de renvoi

La principale critique concerne les moyens mis en place pour protéger la zone des Climats de Bourgogne. En fait, le vignoble inclut dans le projet est sous protection réglementaire à 90%. L’expert estime que cette couverture doit être de 100% avant de pouvoir classer. Un reproche qui n'a pas été fait au dossier de candidature du vignoble champenois. Tout est donc visiblement très lié à la personnalité et à la perception qu’a l’expert de ce qui doit y avoir dans un dossier.

L'expert souhaite également que soit finalisé « le plan paysager concernant le bassin carrier » avant l'inscription du site au patrimoine mondial. L'objectif est que la carrière de Comblanchien, notamment, n'engendre pas de nuisances.

Les bons points décernés par l'expert

En revanche, l'expert a bien reconnu la Valeur universelle et exceptionnelle des climats du vignoble. Les Climats sont des parcelles de vignes, une « mosaïque » de parcelles sur lesquelles sont faits des vins différents. Différents car le sol, le sous-sol, la pente, l’ensoleillement, l’influence du vent… y sont différents et que l’homme a identifié cela depuis longtemps. Ce modèle de vins de terroir n’existe, à ce point, qu’en Bourgogne. D’autre part, la notion de terroirs intéresse et concerne le monde entier, de plus en plus (exemple des thés de Chine ou de certains cafés ou cacaos...). Autant d’éléments qui, estiment les porteurs du projet, montrent que les climats ont bien une valeur Universelle Exceptionnelle du point de vue historique, esthétique, ethnologique ou anthropologique

Selon les porteurs du projet, les Climats répondent à deux des dix critères définis par l'Unesco et qui caractérisent l'aspect mondial du patrimoine. L'expert a effectivement abondé dans ce sens.
  • Le n° 3 : « un témoignage exceptionnel sur une tradition culturelle vivante ». Tradition culturelle : les multiples parcelles, les fameux climats, sont l’héritage de pratiques anciennes, transmises de génération en génération. Tradition vivante : les climats et le vignoble bourguignon en général évoluent encore aujourd'hui pour s'adapter aux contraintes actuelles
  • Le n°5 : « un exemple de l’interaction humaine avec l’environnement ». Interaction humaine : les climats ont été créés par l’homme. Interaction avec l’environnement : les hommes les ont créées en fonction de ce que l’environnement, la nature leur offrait (sol, sous-sol, pente, eau, vent…). Les climats ne sont donc pas un site  naturel comme le serait un beau paysage (le golfe de Porto en Corse ou le mont Etna en Sicile) mais issu d’une construction de l'homme dans un environnement particulier
Enfin, l'expert a reconnu que le périmètre et le plan de gestion du projet sont bien adaptés.

La candidature champenoise a, quant à elle, décroché un avis d'inscription

De son côté et dans le même temps, la Champagne a eu un avis d’inscription. C’est un beau dossier également. Bien documenté, construit, étayé. Peut-être que son avantage, par rapport à celui des climats, c’est qu’il concerne une zone restreinte. 1.000 ha en Champagne, les zones les plus emblématiques (la montagne de Reims, avenue de Champagne à Epernay, les plus belles maisons de Champagne…). En Bourgogne, le projet porte sur 13.000 ha, toute la zone entre Dijon et les Maranges au sud de Beaune. Sans doute que pour l’expert, le dossier aurait semblé plus facile à classer s’il n’y avait eu que des endroits symboliques dans le dossier, comme les Hospices de Beaune, le Clos de Vougeot, la Romanée-Conti…
Mais les porteurs du projet bourguignon avaient vraiment à cœur de montrer les spécificités du vignoble bourguignon dans sa réalité.
C’est une commission qui réunit des représentants de 21 pays et qui tiendra sa 39ème session consacrée à Bonn en Allemagne (pays qui tient le présidence cette année), entre le 28 juin et le 8 juillet. Elle y examinera 38 dossiers de tous les pays du monde. Là encore, les 4 scénarios (inscription, renvoi, différé, refus) sont possibles. Ce qui signifie que les membres du comité peuvent inscrire un bien ou un site sur lequel l’expert a émis un avis de renvoi ou qu’inversement ils peuvent décider de renvoyer un dossier que l’expert souhaitait voir inscrit.

Les Bourguignons ont-ils encore des chances ?

La décision appartient aux 21 états membres du Comité du patrimoine mondial. Ils la prendront en juillet, à Bonn en Allemagne. L’expert a d’ailleurs validé le dossier sur bon nombre de points comme on vient de le voir. Par ailleurs, il faut savoir qu’il arrive régulièrement qu’une décision de renvoi  aboutisse à une inscription. Tout va se jouer dans les semaines qui viennent. C’est l’ambassadeur de France auprès de l’Unesco, Philippe Lalliot, qui va avoir la tâche de convaincre ses homologues que le dossier est abouti et que si tout n’est pas encore mis en place, cela sera le cas très bientôt.

La réaction des porteurs de projet

Les porteurs du projet affichent un bel optimisme mais peut-il en être autrement ? Dans un communiqué de presse, ils se félicitent que « la France maintienne son objectif d'obtenir l'inscription des Climats de Bourgogne sur le patrimoine mondial ». Ils retiennent plutôt les points positifs du rapport de l'expert. Ce dernier a en effet validé l'essentiel du projet malgré son avis de renvoi. 

Le reportage de M. Gillot et R. Liboz avec:

  • Aubert de Villaine, président des Climats de Bourgogne

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©INA

 

La viticulture et l’Unesco

Plusieurs sites viticoles majeurs sont déjà inscrits au Patrimoine mondial : l’ancienne juridiction de Saint-Émilion (grand cru de Bordeaux), la vallée du Haut Douro (Porto), la côte de Tokaj (Hongrie), Lavaux (Suisse). Un autre vignoble français attend également une décision de l’Unesco : la Champagne qui souhaite inscrire ses « Coteaux, maisons et caves de Champagne ». C’est un dossier qui « concourt » dans autre catégorie que celle des Bourguignons, celle de « paysage culturel ». L’avis de l’expert de l’Icomos passé également à l’automne dernier en Champagne sera connu lui aussi demain vendredi.
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