La cour d'Appel de Besançon vient de condamner PSA Peugeot Citroën à verser des dommages et intérêts à l'un de ses ex-salariés pour harcèlement moral. En 2013, l'Assurance maladie avait déjà reconnu la dépression de Farid Hamrioui comme étant d'origine professionnelle.
Une maladie que Farid Hamrioui attribue au harcèlement moral qu'il dit avoir subi pendant plus d'un an à son travail dans l'usine de Sochaux. Cette condamnation de son employeur à lui verser 40000 euros de dommages intérêts fait suite à un combat judiciaire de cinq ans. Tout commence par le licenciement du frère jumeau de Farid Hamrioui qui travaille lui aussi chez PSA. Tous les deux athlètes de haut niveau, les deux frères Farid et Karim ont été embauchés en 1997 par le constructeur automobile. Farid Hamrioui est agent professionnel de fabrication.
Tout bascule en 2010
Une vie sans histoire jusqu'en 2010. Le 2 août de cette année là, Karim est licencié pour faute grave. Son employeur le soupçonne de vol de pièces détachées. Le tribunal correctionnel de Montbéliard le condamne le 10 juin 2013 pour des faits de vol en réunion commis au préjudice de l'employeur. Karim Hamrioui dément les faits et obtient réparation devant la justice qui le relaxe trois ans après les faits. Au moment du licenciement de son frère, Farid déclare commencer à être harceler par plusieurs cadres de l'entreprise. Des faits confirmés par des salariés de l'usine dont des membres du CHST. Jusqu'à ce que son frère soit licencié Farid Hamrioui estime "avoir toujours été bien noté" et il rappelle qu'il s'était vu "confier des missions de sécurité". Des accusations de harcèlement que PSA juge calomnieuses et sans preuve. Dans une lettre, en octobre 2010, La direction de Peugeot a proposé à Farid Hamrioui de "changer d'environnement en prenant un poste de magasinier cariste" mais cette mesure est refusé par le salarié qui souhaite rester dans son secteur. La direction reconnaît que "les relations entretenues avec (sa) hiérarchie n'ont pas été correctes que les personnes se sont manquées de respect" mais la cour d'Appel souligne que "l'employeur n'a pris aucune mesure de nature à faire cesser ces agissements".Farid Hamrioui fait alors une dépression reconnue comme maladie professionnelle par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles puis, en mars 2013, par la caisse primaire d'assurance maladie. L'ex-salarié avait également entrepris une action en justice auprès des Prud'hommes de Montbéliard en septembre 2011 pour faire reconnaître les faits de harcèlement moral. L'ex-salarié fait appel de la décision des Prud'hommes. Un appel que PSA souhaitait voir irrecevable.
Dans son jugement de début juin, la cour d'Appel de Besançon estime que l'appel formulé par Farid Hamrioui est "recevable et bien fondé" et annule "pour excès de pouvoir" le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montbéliard le 15 octobre 2013. La cour d'Appel a estimé pouvoir statuer sur cette affaire sur le fond d'où la condamnation pour harcèlement moral de PSA Peugeot Citroën.
L'entreprise explique "n'avoir commis aucune faute dans l'exécution de son obligation de sécurité à l'égard de Farid Hamrioui, affirmant que celui-ci est seul à l'origine de la dégradation de ses relations professionnelles avec son responsable d'unité à qui il reprochait d'avoir dénoncé les faits à l'origine du licenciement et de la condamnation pénale de son frère Karim".
PSA ne souhaite pas commenter une décision de justice et elle a deux mois pour se pourvoir en cassation.
Pour Farid Hamrioui, cette décision est la "victoire du pot de terre". Après cinq ans de batailles judiciaires, il souhaite tourner la page. "J'espère que Peugeot apprendra de ses erreurs". Farid Hamrioui vient tout juste d'obtenir son diplôme de moniteur d'auto-école et souhaite travailler dans cette branche. Quant à son frère Karim, il a retrouvé du travail dans une usine du Territoire-de-Belfort. Pour l'avocat de Farid Hamrioui, cette condamnation d'un employeur pour harcèlement moral n'est pas unique dans les annales de la justice mais c'est important pour la reconstruction des deux frères Hamrioui.
Reportage Lucile Burny et Maxime Meuneveaux