Manuel Valls engagera dès mardi la responsabilité du gouvernement, via l'article 49-3 de la Constitution, pour permettre l'adoption sans vote du projet de loi Macron en nouvelle lecture, a-t-on appris lundi auprès de plusieurs députés.
Un nouveau 49-3, après février
Le gouvernement avait déjà eu recours à cette arme de la Constitution en février lors de la première lecture du texte du ministre de l'Économie, face à l'opposition
attendue de 30 ou 40 députés PS hostiles notamment à l'extension de l'ouverture des commerces le dimanche. Mais cette fois, le gouvernement va engager sa responsabilité dès le début, en s'épargnant des débats dans l'hémicycle.
Jusqu'alors, le projet de loi "pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques" était prévu à l'ordre du jour mardi à 21H30 pour une semaine de débats avant un vote solennel le 24 juin. Mais son examen va être avancé à 16H15, après la séance des questions au gouvernement, ont indiqué plusieurs députés à l'AFP. Emmanuel Macron devrait prendre la parole, suivi du rapporteur général, Richard Ferrand (PS), et éventuellement des autres rapporteurs du texte. M. Valls devra ensuite annoncer qu'il engage la responsabilité du gouvernement.
Le projet de loi sera considéré comme adopté, à moins que le gouvernement ne soit renversé par une motion de censure d'ici la fin de la semaine. La décision a été prise lors d'un déjeuner lundi à Matignon en présence des rapporteurs et de présidents de commissions parlementaires.
La droite va déposer une motion de censure
L'opposition déposera une motion de censure en réponse à l'utilisation mardi du 49-3 par le gouvernement sur le projet de loi Macron, a indiqué lundi à l'AFP le chef du groupe Les Républicains, Christian Jacob. "C'est la panique générale au gouvernement. Le Premier ministre est en perdition, c'est un acte de défiance vis-à-vis de sa propre majorité", a réagi M. Jacob.
"On va déposer évidemment une motion de censure. Ce sera une censure de la politique du gouvernement depuis l'arrivée de Manuel Valls: aucune réforme de structure, des coups de mentons dans tous les sens..." a-t-il dit. "On peut légitimement se demander si l'expression +démocratie parlementaire+ est encore d'actualité. Le Sénat est à droite, l'Assemblée avec ses frondeurs n'est pas assez docile... Ah si le gouvernement pouvait légiférer uniquement par décret-loi ou par ordonnances..." a réagi de son côté dans un communiqué le sénateur Roger Karoutchi, délégué "riposte" du parti Les Républicains.
Quid des frondeurs ?
Quelle sera la position de Christian Paul et des frondeurs, face à ce 49-3 ? De leur côté, les dix députés Front de gauche eux vont tenter, comme ils l'avait fait sans succès
en février, de déposer une motion de censure contre le gouvernement. Pour être déposée, une motion de censure contre le gouvernement doit être signée par un dixième des députés, soit 58 parlementaires.
Le gouvernement recourt au 49-3 "pour échapper à toute discussion sur le projet de loi Macron et ne pas affronter les véritables opposants
au texte", s'insurgent les députés FG dans un communiqué. "Sans conteste, cette procédure est dirigée contre la gauche. C'est pourquoi nous adressons à tous les députés progressistes une motion de censure que nous leur proposons de cosigner", poursuivent-ils. Selon eux, "il est temps que la gauche s'insurge contre ces artifices de procédure
et mette fin aux postures qui voudraient laisser croire que la politique du gouvernement est différente de celle que mènerait la droite".
"Le gouvernement va nous priver de discussion sur un texte, qui symbolise à lui seul la dérive libérale d'une majorité pourtant censée incarner une alternative à la politique de Sarkozy et mener une guerre contre la finance. Sans compter toutes les mesures régressives introduites par la droite au Sénat et par le gouvernement, au cours de cette nouvelle lecture", ajoutent-ils.