Près d'un millier de personnes ont défilé ce samedi à Belfort pour réclamer une intervention de l'Etat face au projet de restructuration annoncé par General Electric, qui prévoit notamment la fin des activités liées à l'hydroélectrique dans la ville.
Le groupe américain, qui a racheté en 2014 la branche Energie d'Alstom, a annoncé courant septembre son intention de restructurer deux divisions en Europe : la branche "Hydro", installée notamment à Belfort et qui produit des équipements pour barrages, et l'activité "Grids Solutions" de réseaux électriques.
Le projet fait craindre la suppression de 753 postes en France, dont 89 à Belfort. Sous une immense banderole appelant à préserver "l'indépendance énergétique" et la "souveraineté industrielle" de la France, Philippe Petitcolin, délégué syndical CFE-CGC, a interpellé le gouvernement et dénoncé la stratégie "inadmissible" du groupe, transformant Belfort en "ghetto économique".
"Aujourd'hui, GE veut fermer l'entité hydroélectrique de Belfort, l'énergie renouvelable par excellence, qui peut être stockée avec les barrages",
a-t-il déploré. "Mais Belfort, c'est aussi la capacité d'installer des centrales électriques de tout type, gaz, charbon, nucléaire, renouvelables. Si on continue comme ça, demain ce seront des Chinois, des Indiens, des Turcs, qui vont maintenir notre parc" de centrales électriques, a-t-il mis en garde.
Avec Alexis Sesmat Délégué Sud General Electric Belfort Marie-Guite Dufay Présidente PS de la région BFC Reportage : A.Halpern, P.Arbez et S.Chevallier.
Devant la Maison du peuple, les interventions des délégués syndicaux ont été applaudies par les nombreux élus présents, de toutes tendances, parmi lesquels le maire (LR) de la ville, Damien Meslot.
"L'enjeu est national, il faut savoir si on veut une politique industrielle ou pas dans ce pays", a expliqué l'élu à l'AFP. "Nous demandons qu'un consortium autour d'EDF rachète la partie énergie d'Alstom qui a été vendue à General Electric, parce qu'on voit bien que General Electric va tout démanteler". "Il faut que l'Etat intervienne", a-t-il insisté.
Un élu de droite qui n'a pas hésité à signer le 22 octobre dernier "L'Appel de Belfort" publié sur le site Bastamag. Une soixantaine de personnalités dont de nombreux députés France insoumise, communistes, UDI, Génération.s, ainsi que d’anciens ministres socialistes ont signé cette tribune qui pointe la complicité de l’Etat et demande de « retrouver une souveraineté technologique, industrielle et énergétique ».
Présente cet après-midi à Belfort, la députée européenne Anne-Sophie Pelletier qui a, elle aussi, signer cet "Appel de Belfort".
À #Belfort, avec @mbompard pour soutenir les salariés de #GE
— Anne Sophie Pelletier (@ASPelletier) October 24, 2020
Stop au dépeçage de nos pépites industrielles, stop aux massacres des emplois #AppelDeBelfort pic.twitter.com/ISyak2n48G
Marie-Guite Dufay, présidente (PS) de la région Bourgogne-Franche-Comté, estime elle aussi que l'Etat doit intervenir. Elle n'a pas pour autant signé l'Appel de Belfort.
Pour défendre les emplois locaux chez General Electric, pour l’avenir du territoire et pour celui de la filière énergétique en France, j’ai participé ce samedi à #Belfort à la manifestation aux côtés des salariés de GE. L’Etat doit intervenir ! #ge pic.twitter.com/WassqKmBeD
— Marie-Guite Dufay (@MarieGuiteDufay) October 24, 2020
"Ma responsabilité, c'est de tout faire pour que cette compétence, ce savoir-faire industriel reste, et pas de négocier le mieux possible pour qu'il y ait le moins d'emplois qui disparaissent", a-t-elle déclaré. "Il y a besoin que l'État sorte du bois et qu'il dise comment il voit l'avenir industriel à Belfort, avec ou sans General Electric".
Plusieurs dizaines d'élus du Nord Franche-Comté se sont mobilisés pour soutenir les salariés de General Electric. Pour Bastien Faudot, animateur national de la Gauche Républicaine et Socialiste (GRS) et élu de Belfort et du Territoire-de-Belfort, il s'agit de mettre en place "une vraie filière nationale de l'énergie"
La GRS était cet après-midi auprès des salariés Hydro de GE Belfort pour défendre leur emploi mais au-delà, pour promouvoir la reprise en main par la puissance publique d’une vraie filière nationale de l’énergie. pic.twitter.com/q7dVblJf9U
— Bastien Faudot (@bastienfaudot) October 24, 2020
Au son d'une fanfare et derrière des banderoles "GE tue l'hydro", le cortège a traversé le centre ville de Belfort en direction de la Préfecture. Une autre banderole adressait un "merci" ironique à Jérôme Pécresse, le directeur général de la branche énergie renouvelable du groupe et mari de Valérie Pécresse, présidente (Libres !) de la région Ile-de-France. Une délégation de responsables syndicaux devait être reçue par les services de l'Etat.
Dans la foule, les salariés d'autres entreprises et de nombreux habitants ont apporté leur soutien aux employés de General Electric. "C'est important pour le bassin d'emploi que tous les salariés soient présents", a jugé Laurent Oechsel, délégué syndical central CFE-CGC pour le groupe PSA, venu de Sochaux, à une vingtaine de kilomètres. "Si General Electric s'en va, ça fait un gros déséquilibre dans la région, notamment pour les fournisseurs et les sous-traitants". Laura Jumenez, elle, est venue avec son compagnon, et son fils de 2 dans la poussette. "C'est un enjeu qui concerne toute la ville", assure la trentenaire, qui travaille à la Sécurité sociale. "Les difficultés des entreprises, ça impacte aussi tout le système de solidarité derrière, ce n'est pas un problème isolé".
Cette mobilisation n'a tout de même pas réuni le nombre de personnes escompté par les syndicats. Le 22 juin 2019, Entre 5.000 et 8.000 personnes avaient défilé à Belfort contre la suppression de 1.050 emplois en France, annoncée fin mai par le groupe industriel. 800 emplois étaient concernés dans l'entité belfortaine produisant des turbines à gaz soit près de la moitié des effectif de cette branche de General Electric. C'est la 3ème fois en 18 mois qu'un appel à manifester était lancé à la population par la plupart des syndicats de GE.