Le sport amateur est en grande souffrance. Avec la crise sanitaire et un nouveau confinement, les clubs voient leur nombre de licenciés chuter et s'en trouvent extrêmement fragilisés économiquement. A quand le rebond ?
Trouver et surtout garder des licenciés, c'est le crédo des clubs de sport amateur en Bourgogne et dans toute la France. Le monde sportif amateur compte près de 17 millions de licenciés, mais durant cette rentrée 2020 la saignée a été importante : un quart d'adhésions en moins à la rentrée, une perte chiffrable "autour du milliard d'euros", assure Denis Masseglia, le président du CNOSF.
Le premier confinement a fait des ravages dans les clubs qui ont perdu beaucoup d'adhérents, le deuxième avec la fermeture des stades met un voile sur cette nouvelle saison. Dans un club de tennis à Auxerre, ce sont cinquante licenciés qui sont partis, une baisse d'environ 25% des effectifs, "beaucoup de parents ont hésité à remettre les enfants à l'école de tennis" explique Christian Bouveau, le président du Stade auxerrois tennis.
il n'y a plus de compétition, pourquoi reprendre une licence ? Fabrice Dubuisson (athlétisme)
Même ressenti dans les clubs d'athlétisme en Côte-d'Or comme l'explique Fabrice Dubuisson, le président du comité. "On a perdu 20% dans les clubs. Mais ce sont plutôt les adultes qui n'ont pas repris de licences. Les clubs de running tirent la langue, il n'y a plus de compétition sur route, pourquoi reprendre une licence" s'interroge-t-il ?
L'absence de compétition est aussi frein et un grand sujet d'inquiétudes dans les clubs comme l'avoue Daniel Planche, membre du bureau de la ligue de Bourgogne de natation. "Les jeunes, ils font du sport souvent pour la compétition, il n'y en a plus, le championnat régional prévu la semaine prochaine est annulé. Il y a un grand risque de démotivation et d'abandon. S'il y a un troisième confinement, ça va être la catastrophe totale".
Dans le club d'escrime de Quetigny, qui a mis en place des visios pour garder le lien et les entraînements à distance, on remarque aussi une baisse de la pratique mais plus particulièrement chez les seniors. Nicolas Regnard, le maitre d'armes, explique : "les parents ont été très hésitants, on a eu beaucoup d'abandon en cours de saison dernière. Au niveau fédéral, il y a des baisses de 40 à 50% !" Le pic d'adhésion se fait souvent en novembre, or cette année, c'est un mois blanc pour tous les clubs.
Les licenciés, 25% d'un budget d'un club
Le problème, c'est que le licencié, c'est le nerf de la guerre pour ces clubs. Les cotisations et les cours représentent souvent 25% du budget. Au club de natation d'Auxerre, les licenciés sont tombés de 900 à 600. "Ces licences en moins, ça paie mon salaire" explique Thomas Pinel, un des trois salariés, "ça met en danger la vie associative du club" conclut-il.
Autres craintes, celle de voir des adhérents réclamer un remboursement de leurs adhésions, ou de voir chuter la mobilisation des bénévoles qui représentent près de 85% du personnel des clubs amateurs. Beaucoup de licenciés paient leur cotisation en trois ou quatre fois, la plupart ont donc arrêté, d'autres demandent des remboursements.
Dans un rapport, le Comité olympique analyse : "à ce stade, sur un échantillon représentatif de 36 000 clubs, on constate déjà un déficit de recettes d'un montant de 376 millions d’euros, dont 260 millions de pertes de cotisations et 116 millions de pertes "autres" (subventions, partenariats, billetterie…)." Beaucoup plaident pour une aide d'urgence de l'Etat, en plus des 120 millions d'euros débloqués dans le cadre du plan de relance, dont 30 millions pour les clubs et les fédérations.
Les sports de contact les plus touchés
Les situations demeurent très différentes selon les disciplines. Les arts martiaux sont souvent les plus impactés car ils sont à la fois sports de salle et sports de contacts. Exemple le plus frappant : – 44,08 % pour la Fédération française de lutte, – 23,62 % pour celle de karaté ou – 29 % pour celle de judo. Les sports de salle accusent une baisse plus marquée que ceux outdoor : basket-ball (– 11,27 %), handball (– 15 %) et volley (– 14,9 %), gymnastique (– 12,23 %), le badminton (– 19,84 %) alors que le football (– 2,78 %) ou le tennis (– 3,85 %) résistent.
Président de l'omnisport Stade Auxerrois, Thierry Renault est à la tête de 17 sections et de près de 3000 licenciés. Pour lui, le pire reste peut-être à venir : "si on a pas de rentrées financières, ou des aides de l'Etat, on ne pourra pas vivre, des sections vont disparaitre. Peut-être même plus" tranche-t-il. Déjà au bord de l'asphyxie, le sport amateur se cherche bien un nouveau souffle.