Présidentielle 2022 : Arnaud Montebourg serait sur le point de renoncer

A moins de 100 jours du premier tour de l'élection présidentielle, Arnaud Montebourg serait sur le point d'annoncer son retrait. L'ancien ministre a lancé sa campagne en septembre 2021, sous le signe d'une "Remontada" industrielle, démocratique et écologique.


Arnaud Montebourg, ancien ministre de l'Economie et du Redressement productif sous François Hollande, lancé dans la campagne présidentielle début septembre, tourne autour de 1 % à 2 % des intentions de vote, à moins de 90 jours de l'élection (sondage réalisé par internet du 10 au 11 janvier, auprès d'un échantillon de 1.465 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus, dont 1.356 inscrits sur les listes électorales, selon la méthode des quotas.)

Dans son entourage, on évoquait également mardi 11 janvier, le fait qu'il n'atteindrait pas le quota des 500 signatures pour le parrainage de sa candidature. L'ancien élu de Saône-et-Loire devrait donc annoncer prochainement son retrait.

Pour la suite de la campagne, le choix reste ouvert, va-t-il afficher son soutien à Fabien Roussel (PCF) dont il est proche, ou se rallier à la candidature de Christiane Taubira ?

En attendant, qu'est-ce qui n'a pas fonctionné pour Arnaud Montebourg depuis sa déclaration de candidature ?

Un positionnement risqué et une campagne qui n'a pas décollé

Crédité de 1 % d'intentions de vote à la mi-janvier, Arnaud Montebourg est au plus bas actuellement, alors que les premiers sondages le créditaient de 3 à 4 % fin septembre 2021, au moment où il lançait sa campagne dans son fief, à Frangy-en-Bresse en Saône-et-Loire.

A cette occasion, France 3 Bourgogne avait rencontré Arnaud Montebourg pour l'émission "Dimanche en Politique". Gabriel Talon, présentateur et journaliste, évoque "un homme qui est constant dans ses convictions, depuis au moins 15 ans. Il est resté droit par rapport à ses idées." 

Une des explications de la désaffection des électeurs de gauche serait son positionnement des deux côtés de l'échiquier républicain. Gabriel Talon résume l'entretien avec Arnaud Montebourg : "sur le programme économique, il est clairement de gauche, avec une forte intervention de l'Etat, la relance économique. C'est une politique de la demande mais pas de l'offre.

Par contre, il a voulu se démarquer à gauche, sur le maintien de l'ordre, en affichant sa volonté de "punir plus " et "être prompt à blâmer systématiquement". Tous ceux qui ont tenu ce discours-là jusqu'à présent, ils ont perdu sur les deux tableaux : les gens qui se disent clairement à gauche ne souhaitent pas voter pour lui, car l'idée de l'exigence républicaine ne leur est pas acceptable et ceux qui sont favorables à ce que la loi soit respectée véritablement et strictement, ils sont toujours méfiants sur les personnalités s'affirmant de gauche." Cela rappelle la candidature de Jean-Pierre Chevènement en 2002, qui avait échoué en se positionnant sur les deux rives de la République.

L'homme de la 'Remontada'

Arnaud Montebourg avait annoncé officiellement sa candidature à Clamecy, sa ville natale, avant la désignation d'Anne Hidalgo comme candidate du Parti Socialiste le 15 octobre. Lors du lancement de sa campagne à Frangy-en-Bresse, il affiche un programme ambitieux de reconquête industrielle, démocratique et écologique, mais ne va pas réussir à décoller dans les sondages. 

"Scénario catastrophe"

"Il a eu une carrière politique honorable dans une conjoncture qui ne lui est pas favorable"

Jean-Vincent Holeindre, politologue

Le politologue Jean-Vincent Holeindre explique l'absence d'engouement pour Arnaud Montebourg, dans la multiplicité des candidatures à gauche : "il y a un problème d'éclatement des candidatures à gauche, qui a été amplifié par la possible candidature de Christiane Taubira, qui affaiblit aussi bien Anne Hidalgo, candidate du parti socialiste, qu'Arnaud Montebourg, issu du PS, mais qui n'a pas été investi par ce parti. Arnaud Montebourg souffre de ces deux éléments, l'éclatement de ces candidatures et le fait d'être un candidat hors-parti. Ce qui, à gauche, est problématique.

On voit que les candidatures qui percent aujourd'hui sont des candidatures de personnalités fortes, comme Jean-Luc Mélenchon, mais qui bénéficient aussi d'un groupe parlementaire relativement visible; ou, à défaut d'être visible, au moins qu'on entend dans l'arène médiatique. Arnaud Montebourg apparaît à l'inverse comme un homme seul, certes entouré de quelques fidèles, mais à l'échelle de la Saône-et-Loire. Sur le plan de l'appareil politique, il ne parvient pas à percer ailleurs. 
Un autre élément, c'est que l'électorat anticipe sur le fait qu'Arnaud Montebourg, qui s'est déclaré favorable à une primaire, est le seul qui a donné une suite favorable à l'appel d'Anne Hidalgo, tout le monde sait qu'au final il ne sera pas candidat. A la fois parce qu'il va se retirer en faveur de quelqu'un d'autre et aussi parce qu'il est peu probable qu'il dispose des 500 signatures. 
Dans l'électorat, on peut dire que la candidature est morte-née."

Le politologue va plus loin et analyse la position actuelle de la gauche dans la campagne : "Il est certain que la gauche est dans une impasse aujourd'hui. On parle d'unité et de primaire, mais il est trop tard, c'était quelque chose qui devait se décider avant. La primaire de la droite a été engagée bien avant, d'ailleurs les observateurs de la droite disaient déjà que c'était trop tard, ce qui n'est pas vrai, car on voit bien que Valérie Pécresse dispose du souffle de la primaire."

La candidature d'Arnaud Montebourg apparaît comme frappée d'une double peine : le contexte de campagne et l'incarnation, selon Jean-Vincent Holeindre :"Tout le monde estime que la seule solution de se sortir de l'impasse à gauche, c'est d'avoir une candidature unique. En même temps, les choses sont à ce point engagées pour les différents candidats que, au fond, personne ne veut se retirer. Sauf Arnaud Montebourg, qui a envisagé cette hypothèse. Christiane Taubira arrive dans le jeu au moment où on disait déjà qu'il y avait trop de candidatures. 
Sur les thématiques de la réindustrialisation, le patriotisme économique, le souverainisme, ce sont des thématiques qui sont déjà portées par Jean-Luc Mélenchon, qui arrive largement en tête des intentions de vote. Le terrain est déjà occupé par un autre candidat qui dispose d'une crédibilité présidentielle plus forte."

Des moments maladroits dans la campagne

Début novembre, le candidat Montebourg a par ailleurs fait une déclaration sur les exécutions des OQTF (Obligations de Quitter de Territoire Français) qui a eu pour effet immédiat le désengagement du mouvement des "Jeunes avec Montebourg", ne cautionnant pas ses propos. Quelques jours plus tard, le comité de soutien des Jeunes avec Montebourg reprenait son activité, certains membres ayant quitté le mouvement.

Début décembre, Arnaud Montebourg se met en scène, décidé à créer l'unité à gauche, en appelant au téléphone les quatre candidats de gauche : Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Anne Hidalgo, Fabien Roussel, pour une réunion dans la même pièce.


Pour le politologue Jean-Vincent Holeindre, "en termes d'image, c'est des choses qu'on entend à la radio, qu'on discute au café, qui contribuent à un mauvais narratif. Les propos sur l'OQTF, c'est certain que cela a contribué à la dé-présidentialisation d'Arnaud Montebourg. Les électeurs ont du mal à se projeter dans un candidat et surtout le prochain président à l'élection suprême. Il n'apparaît pas comme un candidat sérieux et ça le fait sombrer encore davantage.
L'électorat de gauche ne se trouve pas dans le spectacle donné par les candidats de gauche."

Le 11 janvier, des "discussions" étaient en cours en vue d'un possible ralliement du candidat de la "Remontada de la France" Arnaud Montebourg à la probable future candidate Christiane Taubira.
Le sénateur Mickaël Vallet, porte-parole de M. Montebourg, a cependant souligné mardi soir 11 janvier que son candidat ne "privilégiait absolument pas la piste Taubira", les discussions étant en cours aussi avec le communiste Fabien Roussel.

Pour Jean-Vincent Holeindre, ces tractations sont trop tardives : "les discussions entre Arnaud Montebourg, Christiane Taubira et Fabien Roussel ne seront pas de nature à bouleverser les équilibres de l'élection au second tour. Ces discussions arrivent trop tard dans la campagne."

Un personnage politique atypique

En 1985, Arnaud Montebourg adhère au Parti socialiste. Il y débute sa carrière politique en 1997 lorsqu’il est élu député de la 6e circonscription de Saône-et-Loire. Il a également occupé la fonction de président du Conseil Général de Saône-et-Loire.

Pour la présidentielle de 2007, Arnaud Montebourg soutient la candidature de Ségolène Royal et devient le porte-parole de sa campagne. Il se présente à la primaire du Parti socialiste de 2011 en vue de l’élection présidentielle de 2012 et finit à la surprise générale en troisième position.

En 2012, il est nommé ministre du Redressement productif sous la présidence de François Hollande. Il devient ministre de l’Économie, du Redressement productif et du Numérique en 2014 dans le gouvernement de Manuel Valls. 
C'est à ce moment qu'il lance le "made in France" en posant en couverture du "Parisien" en marinière.

Il fait partie des « frondeurs » du Parti Socialiste qui critiquent l’action du gouvernement de Manuel Valls. Il perd ses fonctions de ministre lors du remaniement du gouvernement en août 2014.

En vue de l’élection présidentielle de 2017, il se présente à nouveau comme candidat à la primaire du Parti socialiste (PS). Il termine une nouvelle fois dans le trio de tête, sur la dernière marche du podium, derrière Benoît Hamon et Manuel Valls. Cette même année, l’ancien ministre décide de se retirer de la vie politique et se lance dans la production de miel et d’amandes made in France. Il débute alors une carrière de chef d'entreprise avec les sociétés "Bleu, Blanc, Ruche", une coopérative de miel français de repeuplement; les glaces au lait de France "la Mémère" et la "Compagnie des Amandes" en 2018, pour produire des amandes "made in France".

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