À Fontaine, près de Belfort, des voisins s’opposent. Des coqs nains chanteraient un peu trop souvent. Cinq voisins ont signé une pétition. Après le coq Maurice d’Oléron, cette affaire pourrait bien se terminer elle aussi devant la justice.
C'est un conflit de voisinage pour le moins inhabituel, et qui n'est pas sans rappeler l'histoire du coq Maurice sur l’île d'Oléron, devenu malgré lui en 2019 le symbole de la ruralité française.
A Fontaine dans le Territoire de Belfort, un couple du village est en froid avec ses voisins depuis plusieurs semaines. L’objet de la crispation, des coqs nains qui vivent devant une maison dans leurs poulaillers. Laetitia et Olivier Hemberger élèvent quelques coqs, ils sont dans les règles. Ils ne s'attendaient pas à ce qu’un voisin se dise gêné par les chants des animaux. La mairie a fait intervenir un conciliateur. En vain.
Des chants à toute heure de la journée
Pour Roland, 78 ans qui vit à côté, l’affaire aurait pu se régler à l’amiable. Il a été proposé de déplacer les coqs sur un autre terrain dans le village, ou de couvrir les cages pour que les coqs chantent un peu moins la journée. Le septuagénaire regrette la tournure que prend ce conflit, la famille a en effet lancé une pétition à son tour sur les réseaux sociaux et récolté plus de 35.000 signatures. Ils font partie également du groupe facebook gallinacées en folie.
“Ces voisins ont fait un élevage de coqs de concours, avec des bruits et des chants répétitifs toute la journée, à n’importe quelle heure et c’est pénible…Quand on a commencé à être gêné, je leur en ai parlé, et ils m'ont répondu que si je n'aimais pas entendre chanter les coqs, je n’avais qu’à partir dans une maison de retraite” explique Roland à notre équipe de reportage Emilien Diaz et Alexandre Rémond.
Le village de Fontaine, 612 habitants, est désormais sous la lumière des médias, l’affaire ayant pris de l’ampleur via les réseaux sociaux. Laetitia et Olivier Hemberger, n’en démordent pas. Ils sont dans les règles. “Ici, c’est la campagne… nous pensons que notre cause, est une cause juste. Dans toute la France, il y a des cas comme le nôtre. La loi était censée régler ce genre de problèmes, et enfin de compte ça n’a rien changé, alors oui les réseaux sociaux, sont là pour faire bouger les choses” affirme Olivier. Un coq ça chante. Et un coq nain moins puissamment qu'un autre. "Un coq ça n'a pas de télécommande, il chantera le matin quand il a un concurrent dans les parages pour protéger son territoire, il chantera quand une de ses poules va faire un oeuf, il va être content" assure le propriétaire.
Dans le village, Pierre Fietier, le maire qui habite aussi dans la rue des coqs nains est bien embêté. La conciliation a échoué. “Tout le monde campe sur ses positions… je pense malheureusement que ça ira devant les tribunaux” regrette-t-il.
Une loi protège bruits et odeurs de nos campagnes
La loi sur le patrimoine sensoriel promulguée le 29 janvier 2021 est partie du constat que les maires étaient de plus en plus confrontés à des conflits de voisinage provoqués par de nouveaux habitants.
Elle introduit dans le code de l’environnement "les sons et odeurs" comme caractéristiques des espaces naturels. Ces sons et ces odeurs font désormais partie du patrimoine commun de la nation, aux côtés des paysages, de la qualité de l'air ou des êtres vivants et de la biodiversité.
Objectif réduire devant les tribunaux, les conflits sur ces thèmes. Ce n’est pas encore gagné, dernièrement dans le Morbihan, le coq Marcel a fait la une des journaux. À Etel, un couple de retraités a reçu un courrier de la municipalité, leur demandant de mettre fin aux nuisances sonores causées par le chant du coq. Le retraité n’a pas envie de tuer son coq pour qu’il se taise. Il invoque lui aussi la loi sur le patrimoine sensoriel, et a déposé des "bons de soutien à Marcel" dans les boîtes aux lettres des environs. Il promet à chaque défenseur du gallinacé un œuf, ainsi qu'une assiette du coq au vin en décembre prochain, en souvenir du coq Marcel si l’affaire devait se terminer ainsi !