Autour de 200 étudiants ont manifesté ce mardi à Cluny en Saône-et-Loire, où est installé un des campus de l'École nationale supérieure d'arts et métiers (Ensam) contre une hausse des frais d'inscription qui pourrait voir le jour à la rentrée prochaine.
Ils disent non à la hausse des frais de scolarité. Autour de 200 étudiants de l’École nationale supérieure des arts et métiers (Ensam) ont manifesté ce mardi 30 mars à Cluny, en Saône-et-Loire. Les frais d’inscription des nouveaux entrants pourraient augmenter à la rentrée prochaine de plus de 500 %. Cette hausse est justifiée par l’école par la mise en place de nouvelles installations pédagogiques dans le cadre d'un projet important baptisé "evolutive learning factories".
"L’idée est d'être des lieux de formation dans une réalité industrielle bâtie sur site. Et d'avoir accès à cette réalité industrielle à distance au travers des nouveaux outils numériques qu'on peut y rattacher", précise Michel Jauzein, le directeur du campus de Cluny.
"Ça remet en question les valeurs de l'école"
Mais Malik Bahloul, le président de l'association des élèves du campus de Cluny, s’inquiète surtout du sort des étudiants les plus modestes si cette hausse est mise en place. Les étudiants boursiers seraient toujours exonérés des frais d’inscription, mais ceux à la limite des seuils d’éligibilité feraient face à un important surcoût, passant d'environ 600 euros par an à 3 500.
"Ça remet en question les valeurs de l'école qui sont tournées autour de la diversité sociale", affirme le représentant étudiant. "Dans le contexte de précarité sociale qui entoure les étudiants, on trouve que c'est précipité", ajoute-t-il.
Michel Jauzein, le directeur du campus, a bien conscience de cette problématique. "L'écosystème Arts et Métiers nous permet d'avoir des dispositifs d'accompagnement qui sont pour partie déjà en place mais qui se développent aussi [...] L'idée est de tout mettre en œuvre pour que les étudiants qui ne seraient pas en mesure d'honorer ces droits de scolarité augmentés puissent suivre leur scolarité Arts et Métiers dans les meilleures conditions possibles."
Cette hausse ne ferait que mettre Arts et Métiers au même niveau que d'autres grandes écoles françaises, selon lui. "Des écoles d'ingénieurs comparables, en particulier les écoles centrales, sont passées depuis quelques années à des droits d'inscription qui sont compris entre 2 500 et 3 500 euros suivant les cas".
"Elles arrivent donc à fournir aux étudiants des services supplémentaires, des installations de haut niveau et les former dans des conditions qui leur permettent de gagner en employabilité et en compétences. On aimerait vraiment continuer à pouvoir le faire aux Arts et Métiers malgré notre situation multisite sur l'ensemble de la France."
Si on mettait en place des frais de scolarité de 2 500 euros par an, ils ne couvriraient que 12,5% du coût total des études des ingénieurs Arts et Métiers. On considère que c'est une demande auprès du ministère qui reste à la fois mesurée et comparable aux autres écoles du même type.
Si l'accompagnement est à la hauteur, ces frais plus élevés ne remettraient pas en cause la diversité des profils accueillis, selon lui. "Dans toutes les écoles où le cap a été franchi, aucun effet de ce type n'a été observé sur les promotions qui ont suivi. Par contre, la condition pour qu'il n'y ait pas d'effet, c'est que les étudiants soient accompagnés."
Au-delà de la question du devenir des élèves les plus modestes, Malik Bahloul, le représentant étudiant, reproche la manière de faire de la direction de l’école : "Le projet est très intéressant et attire tous les élèves. Il y a une notion de pouvoir travailler ensemble sur plusieurs machines simultanément [...] Mais ce qu'on remarque, c'est que ce projet est au stade d'embryon. Aucun cahier des charges n'a été posé. On réfléchit directement au financement sans chercher à structurer le projet. Est-ce que c'est vraiment nécessaire de solliciter le portefeuille des étudiants tout de suite ?"
Un "projet ambitieux"
Michel Jauzein rappelle de son côté que seulement 60% du budget de l’école est couvert par l’État. "Arts et Métiers assure à peu près 40% de son budget en propre, grâce au soutien des entreprises et des collectivités qui financent nos projets", indique-t-il. Les frais de scolarité permettent aussi d'assurer le fonctionnement de l’école.
Le projet "evolutive learning factories" est selon lui un "projet ambitieux" qui nécessite de "trouver les moyens de compléter nos ressources financières. Et cela sur la base de toutes les parties prenantes, y compris les étudiants."
"On n'a pas demandé de montant particulier à la ministre, on a demandé de pouvoir augmenter les droits d’inscription, poursuit Michel Jauzein. En règle générale, elle le fait de manière comparative à d'autres écoles du même type." L'école attend désormais le feu vert de la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal. Celle-ci avait affirmé le 10 mars que les droits d'inscription à l'université seraient gelés à la rentrée prochaine pour la deuxième année de suite pour aider les étudiants à faire face à la précarité.