La Convention citoyenne pour le climat vote jusqu'au 21 juin les mesures qui seront soumises au Président de la République. Certaines dispositions sur les transports, la consommation énergétique ou l'agriculture suscitent quelques doutes dans la Nièvre sur leur adaptation aux territoires ruraux.
Les 150 hommes et femmes, dont deux Bourguignons, qui composent la Convention citoyenne pour le climat votent à partir de ce vendredi 19 juin les propositions qu'ils soumettront au Président de la République.
Mais parmi les premières mesures envisagées rendues publiques, certaines suscitent des questions sur leur adaptation aux territoires ruraux. Dans la Nièvre par exemple, plusieurs acteurs attendent des précisions sur leur application, dans le cas où elles seraient retenues.
Les agriculteurs attendent un choix de société
Les propositions rendues publiques consacrent un large chapitre à l'alimentation et l'agriculture. Les préconisations vont d'une alimentation moins animale, à un objectif de 50% des terres en agro-écologie d'ici 2040 ou une réduction de l'usage des pesticides.
"Ce sont de belles demandes, j'y souscris, expose Emmanuel Bernard, président de la FDSEA de la Nièvre. Mais il faut avoir les moyens de ses ambitions, il ne s'agit pas d'aller s'approvisionner ailleurs ensuite. Aller vers l'ago-écologie ou moins d'utilisation de produits phytosanitaires, c'est notre vocation, donc cette démarche put être encourageante car il y a déjà des efforts qui ont été fait."
Pour que les propositions soient adaptées aux territoires ruraux, le responsable syndical plaide pour des orientations qui engagent toute la société et pas seulement les exploitants. "Aujourd'hui la loi économique pour nos exploitations fait que l'équilibre se fait par l'exportation. Si demain une économie plus circulaire fait que l'agriculteur peut vivre de son travail, pourquoi pas. Mais il ne s'agit pas que de fixer de nouvelles normes, c'est une question de choix de société et d'organisation."
Sur la route, ça coince
Parmi les mesures envisagées les plus clivantes, la réduction de la vitesse à 110 km/h sur autoroute inquiète les associations d'usagers de la route. "C'est toujours des histoires d'urbains, critique Jean-Philippe Real, coordinateur de la Fédération nationale des motards en colère pour la Nièvre. On a l'impression d'une proposition qui vient de Paris, qui convient peut-être aux gens des grandes métropoles mais qui n'est pas adaptée à notre territoire. C'est sûr que si on roule à 0 km/h on ne pollue pas, mais ici il y a des gens qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler."
L'incitation à la transition vers les véhicules électriques ne convainc pas non plus Jean-Philippe Real. "Ce ne sont pas des véhicules adaptés aux petites routes, comme dans le Morvan par exemple. Et puis on oublie qu'il faut des batteries qui contiennent des métaux lourds qu'on ne sait pas recycler. Sans compter que pour nous motards, on nous parle de moto électrique, mais aujourd'hui la moto électrique a 180 kilomètres d'autonomie puis il faut 8 heures de recharge, et ça coûte entre 25000 et 30000 euros. Très peu de gens peuvent se le permettre."
Accompagner plutôt qu'imposer
En matière de logement, la Convention citoyenne pour le climat propose notamment de "contraindre les propriétaires occupants et bailleurs à rénover" les habitations d'ici 2040, ou "d'obliger le changement des chaudières au fioul et à charbon d'ici à 2030 dans les bâtiments neufs et rénovés".
Des objectifs salués par Andrée Desvignes, présidente du Secours catholique pour la Nièvre. "Tout le monde est convaincu qu'il faut faire des choses. Mais ce qui m'importe, c'est qu'on ne fasse pas peser sur les plus précaires cette démarche. Certaines personnes ont acheté leur logement mais n'ont jamais eu les moyens de faire les travaux et se retrouvent avec des maisons délabrées. On ne les incitera pas à agir en leur imposant des choses, mais bien en les accompagnant."
Un "système progressif d'aides à la rénovation, avec prêts et subventions pour les plus démunis" est ainsi évoqué par la Convention. "C'est indispensable, insiste la bénévole. On a déjà tendance à pointer du doigt les personnes en sitaution de précarité sous prétexte qu'ils n'achètent pas bio, qu'ils ont des véhicules parfois anciens. Là encore on risque de les accuser de ne pas agir."
Qui sont les membres de la Convention citoyenne ?
Sélectionnés par tirage au sort, les 150 membres ont travaillé pendant neuf mois avec l'objectif fixé par le Président de "définir une série de mesures en matière de lutte contre le changement climatique permettant d'atteindre une baisse d'au moins 40% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale".Les critères de sélection visaient à obtenir un échantillon représentatif de la population française, sans oublier les territoires ruraux. Ainsi l'institution précise qu'"en se basant sur les catégories Insee, la Convention respecte la répartition des personnes en fonction du type de territoires où elles résident (grands pôles urbains, deuxième couronne, communes rurales…)."