Ils sont, eux aussi, en première ligne, celle de notre alimentation. Les agriculteurs de Bourgogne Franche-comté continuent à produire en pleine épidémie de coronavirus pour nourrir les Français pendant leur confinement. Entre inquiétude et conscience de l'importance de leur travail...
« Nous comptons sur vous, ne lâchez rien », leur a écrit leur ministre de tutelle Didier Guillaume. Et les agriculteurs de notre région ont bien reçu le message, ils sont indispensables à la vie des habitants, malgré l'épidémie, ils doivent faire face.Craintes autour de la vente directe
La principale inquiétude est aujourd’hui en direction des producteurs de légumes. Ils sont nombreux à développer de la vente directe et certains font les marchés. Les syndicats surveillent attentivement la situation, avec notamment la crainte d’une possible fermeture des marchés dans les prochaines heures. Si c’est le cas, il faudra trouver d’autres débouchés et mettre une autre organisation en place pour éviter les pertes et les difficultés économiques pour une profession déjà à la peine.
"Si les marchés sont interdits, on va être très, très mal" - Emilie Bereyziat
Pour Emilie Bereyziat, productrice de fromages de chèvre à Cuiseaux en Saône-et-Loire la situation devient compliquée. Elle a vu ses deux plus importants marchés du week-end annulés, ceux de Cuiseaux et Cousance. Une perte sèche de 600 à 700 euros de chiffre d’affaires en seulement deux jours. Pour elle, « les maires devraient réagir, on est sur des petites communes avec des fois 3 ou 4 vendeurs en alimentaire. Il faudrait garder les marchés alimentaires de plein air car il n’y a pas d’interdiction pour le moment, si c’est interdit on va être très très mal ».
L’agricultrice, membre de la Conférérion Paysanne, s’inquiète aussi de la vente directe à la ferme car les gens ont peur de se déplacer : « les clients ont peur du fait qu’aller chercher du fromage ne passe pas pour de la première nécessité et s’inquiètent donc des contrôles de police ». Emilie Bereyziat note déjà une baisse de la fréquentation mais certains clients fidèles viennent tout de même. Elle a d’ailleurs mis en place un système de "drive" pour éviter trop de contacts et respecter les mesures barrières.
Même constat du côté de Alex Grozellier, éleveur à Blanot à Saône-et-Loire qui ajoute « on risque de jeter nos produits, c'est peut-être le pire : du gaspillage alimentaire au moment où on n'en a pas besoin ».
Tous les maillons sont importants
Au niveau de l’élevage, le lait est collecté et les abattoirs fonctionnent même s’ils tournent au ralenti. Mais il y plusieurs intermédiaires, et il faut que tous les intermédiaires travaillent. Aujourd’hui c’est le cas. En fait, tous les maillons sont importants : « Il faut que ca continue de fonctionner, sinon on va vers de gros soucis. Par exemple si on n’a plus de transporteurs pour le lait, il est perdu car les vaches il faut les traire tous les jours, on n’a pas le choix » explique Fabrice Faivre, le président de la FDSEA 21.
"Si on n’a plus de transporteurs pour le lait, il est perdu" - Fabrice Faivre
En effet, la problématique principale porte sur les perturbations qui touchent les logisticiens et les sociétés de transport. Les salariés de ces entreprises sont placés en chômage partiel pour limiter les déplacements ; dans d’autres cas, les chauffeurs routiers font valoir un droit de retrait pour éviter les risques de contamination liés à leur activité selon le syndicat d’agriculteurs.
Un secteur stratégique
« On est considéré comme un secteur stratégique donc on doit continuer à produire » explique Fabrice Faivre, président de la FDSEA de Côte-d’Or. Pour le céréalier installé à Varanges « ça ne change pas grand-chose dans le quotidien car l’agriculteur travaille souvent seul, comme sur mon tracteur, même si on fait attention à limiter nos déplacements. Les moyens de communications nous permettent, ensuite de garder le contact avec les intermédiaires et les clients mais aussi avec les autres agriculteurs ».
Dans notre région, il n’y a pas de vrai problème de main d’œuvre comme ca peut être le cas dans le sud de la France avec la période de récoltes des fruits et légumes mais les paysans doivent s’adapter. Pour fournir engrais et produits d’entretien, les coopératives se sont organisées en proposant un service minimum qui se restreint pour cette deuxième semaine de confinement. « Pour respecter les règles, ils nous préparent nos commandes et les déposent en libre-service, c’est un peu comme un drive » précise Fabrice Faivre.
Même chose pour le matériel et la réparation des machines, « avant on rentrait dans le magasin, on fréquentait les gens » désormais tout se fait avec le plus de distance possible, le magasinier prépare la commande et la met à disposition mais rien qui empêche, pour le moment, le travail des agriculteurs.