Une trentaine de jeunes femmes de Côte-d'Or ont vu leurs photos issues des réseaux sociaux, publiées par une de leurs connaissances sur des sites pornographiques, avec des propos dégradants. Une audience prévue ce lundi 11 octobre a été reportée.
Elles sont 39 à avoir créé un groupe Facebook pour se fédérer, il y a environ un an, quand les faits étaient avérés, en novembre 2020 : des photos "volées" de leurs réseaux sociaux, sans leur consentement, sont publiées sur des sites pornographiques, avec des propos dégradants.
Un membre actif sur des sites pornographiques
Il y a un an environ, Elise (* prénom d'emprunt) et ses copines, lycéennes sur Beaune, découvrent qu'un utilisateur actif "depuis des années" sur des sites pornographiques postait leurs photos "de nos vies, volées sur nos réseaux sociaux".
D'abord le signalement d'une de ses camarades lance l'alerte, puis d'autres découvrent l'ampleur du détournement : "on a commencé à trouver de plus en plus de photos de nous. Il avait plusieurs comptes sur plusieurs sites, des comptes ouverts depuis des années. Mais vraiment, depuis un an il était très actif sur un des sites, sur lequel il postait nos photos."
L'homme qui publiait les photos était une connaissance commune aux jeunes filles sur les réseaux sociaux. Elise précise : "pour certaines, on le connaissait de vue, on ne le connaissait pas toutes personnellement. Certaines le connaissaient depuis le collège. Il avait même posté des photos de filles alors mineures à l'époque."
Le choc a été grand pour les jeunes filles qui ont vu leurs photos de profils publiées sur le site pornographique. Elise se rappelle : "quand j'ai découvert ça, j'étais en pleurs : des intitulés dégradants, et des commentaires tout aussi sordides."
Avec l'aide de captures d'écran et les multiples plaintes déposées, une enquête va être ouverte. Elle aboutit à l'interpellation d'un beaunois de 21 ans, qui va reconnaître les faits.
Un pseudo et des fantasmes
Elise et le groupe de jeunes femmes ont découvert sur le site pornographique le "CV" du jeune homme, et en sont restées heurtées : "Sur son profil, il avoue complètement ses fantasmes, ce qu'il aimait faire. Il y avait aussi des vidéos dans lesquelles il se masturbait dans la lingerie de sa mère. C'est pas normal en fait, tout ça !"
La décision de justice demeure "incompréhensible" pour les victimes
Le Procureur de la République de Dijon, Olivier Caracotch a confirmé que le mis en cause "s’est vu notifier un rappel à la loi le 26 janvier 2021, pour des faits de "publication d'un montage non apparent avec les paroles ou images d'une personne non consentante". Ces faits punis d’un an d’emprisonnement et de 15.000€ d’amende."
Le mis en cause s'en sort avec un rappel à la loi uniquement. Ce qui attise la colère du groupe de jeunes femmes, ne comprenant pas la décision.
Le Procureur précise : "il n’est pas soumis à une obligation de soins (ce qui aurait été juridiquement possible), mais s’est engagé dans son audition à consulter un spécialiste pour comprendre les raisons de son geste, dont il admet la responsabilité.
La procédure est toujours en cours pour mettre en œuvre l’indemnisation des victimes qui solliciteraient des dommages et intérêts. Toutes ont été interrogées sur ce point."
Le Procureur de la République de Dijon ajoute la précision suivante : "une alternative aux poursuites n’est pas une décision définitive, mais si le mis en cause remplit les conditions fixées (dans cette affaire : ne pas réitérer et indemniser les victimes qui en font la demande), les poursuites ne sont pas engagées par le parquet."
"On ne va pas en rester là"
Elise précise que les jeunes filles ont fait appel à un avocat, afin "de ne pas en rester là." Pour elles, "la décision est incompréhensible. Il faudrait qu'il ait une obligation de soins, au moins pour qu'il ne recommence pas. C'est du grand n'importe quoi cette histoire ! Le fait que l'affaire soit classée sous condition d'indemnisation, c'est-à-dire qu'il n'y a aucune obligation de suivi, c'est clairement pas possible !"
Une audience était prévue ce lundi 11 octobre, mais elle a été reportée sine die. Les jeunes filles ne réclameront probablement pas de dommages et intérêts, ce qui conduirait au classement de l'affaire. "Nous réclamons justice avant tout !"
Elise résume la pensée de l'ensemble des jeunes filles victimes des publications de photos : "Nous, on ne comprend pas, on a envie de se faire entendre. C'est pas normal, on est en 2021, des choses comme ça, c'est plus possible que ça arrive !"
Et derrière le rappel à la loi pour le mis en cause, le spectre de la récidive : "À tout moment, ça peut recommencer, s'il a tous ces comptes sur les sites, il peut nous exposer. J'avais retrouvé ma photo au milieu du site pornographique, en tapant juste mon nom et mon prénom !"
A ce jour, les photos des jeunes filles ont été retirées des sites par le mis en cause.