Depuis début 2020, le département et la préfecture de Côte d'Or ont mis en place un nouveau protocole pour évaluer l’âge des jeunes mineurs étrangers non accompagnés. Un enjeu humanitaire mais aussi financier. En 2019, à peine 20 % des demandeurs ont été reconnus effectivement mineurs.

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C’est un nouveau protocole signé le 8 janvier 2020 entre la préfecture, le département de la Côte d’Or et les services du ministère de la justice. Il met en place un éventail d’outils et de procédures pour le contrôle de l'âge des jeunes migrants qui arrivent en France.

Le nouvel outil se nomme AEM, Appui à l'Evaluation de Minorité, basé sur les empreintes digitales et une photo. Car pour le président du conseil départemental, l’âge de ces jeunes gens est sujet à caution. "L’objectif, il est clair, détaille François Sauvadet. C’est de nous permettre, ensemble, d’identifier dans de bonnes conditions les jeunes issus de l’immigration qui relèvent de la protection de l’enfance, parce qu’ils ont moins de 18 ans et sont mineurs. Et d’identifier ceux qui sont majeurs et qui relèvent des services de l’Etat et des politiques conduites par les services de l’Etat. » En clair, identifier ceux qui doivent être pris en charge par ‘aide sociale à l’enfance et ceux qui peuvent faire l’objet d’une procédure d’expulsion.

Des tests osseux qui font polémique


Aujourd’hui, cet âge est  évalué par divers moyens, depuis les documents d'identité présentés par les demandeurs jusqu' à des tests osseux, une méthode critiquée pour sa marge d'erreur importante. Un texte  précise d'ailleurs que le doute doit être au bénéfice d'une présomption de minorité. C’est un sujet qui doit susciter de « l’empathie » ajoute François Sauvadet. « Partir comme cela à 15-16 ans, c’est souvent l’âge qu’ils ont. Ce sont des jeunes qui ont traversé un parcours de vie très compliqué. »  

En 2019, 108 jeunes ont été pris en charge en Côte d'Or et  de nouvelles places ont été créées. C’est le cas par exemple au foyer Blanqui à Dijon. Une  cinquantaine de mineurs isolés y vit provisoirement en attente d'une décision et d'une orientation. La plupart sont scolarisés et suivent un apprentissage accéléré du français, parfois avec l'aide extérieure de familles d'accueil.

L’âge des jeunes, un enjeu financier


Mais pour les Conseils départementaux, la prise en charge des mineurs isolés représente un coût  financier. La Côte d'Or, par exemple, y consacre 7 millions et demi d’euros par an. L'Etat compense à hauteur de  680000 euros seulement.

Conséquence,  l'évaluation de l'âge des jeunes migrants est aussi un enjeu budgétaire. En 2019, sur les 523 jeunes qui  se sont présentés devant le Conseil Départemental, seuls 21% ont été déclaré mineurs. Selon les associations, l'évaluation de leur âge se fait souvent dans un climat de suspicion.

La véracité de leurs documents d’identité est par exemple souvent mise en doute. « On ne peut pas avoir en permanence une présomption de bonne foi des personnes qui se présentent et de véracité des documents qui sont présentés » justifie François Sauvadet.

"Protéger les mineurs oui. Accepter la fraude, il n’en est pas question !"


Le représentant du ministère de la Justice assume le caractère dissuasif des contrôles. « Il y a un risque d’appel d’air, avance Eric Mathais, procureur de la République de Dijon. La mise en place de filière régulière d’un flot massif, on l’a connu à une époque. Cela encourage la fraude. Protéger les mineurs oui. Accepter la fraude, il n’en est pas question ! »

Des évaluations expéditives


Mais selon les associations, l'évaluation de l'âge des jeunes migrants est pratiquée de manière expéditive. « La majorité, après les avoir vu une demi-heure, on leur dit « vous êtes majeur. Partez ! », s’indigne  Paul Garrigues de la Ligue des droits de l’Homme de Côte d’Or. « Les circulaires prévoient qu’il faudrait 5 jours d’examens par une équipe disciplinaire, ce n’est pas fait. »  Les décisions de la préfecture concernant l’âge des demandeurs seraient aussi parfois contredites par la justice. « Il y a deux cas stupéfiants en Côte d’Or. Deux jeunes filles qui ont pu prouver [leur âge] ensuite avec tous les documents et ont été reconnues par la justice comme mineurs de 15 ans quand au conseil départemental, en une demi-heure, on leur avait trouvé 18 ans. »

Plus largement, c’est la politique globale d’accompagnement des mineurs étrangers non accompagnés qui pose question. Et notamment leur avenir après 18 ans. Même engagés dans une  formation ou un emploi, beaucoup de jeunes se retrouvent excusables une fois majeur. La raison de leur présence en France ou la validité de leurs papiers est alors contestée par la Préfecture.

Un "gâchis" assumé


Fin 2019, dans la Nièvre, un jeune apprenti togolais de 18 ans était ainsi menacé d’expulsion avant même la fin de son apprentissage. La mobilisation de ses patrons qui voulaient l’embauche avait finalement poussé la préfecture de la Nièvre à lui accorder un délai de 6 mois.

"C’est un peu un gâchis par rapport à ce qu’ils auraient pu apporter. Mais l’impératif de l’Etat civil l’emporte."


Les exemples sont multiples dans la région. Une fermeté assumée par les services de l’Etat. « Je reconnais les conséquences dommageables pour ces jeunes et pour leurs employeurs, admet Christophe Marot, secrétaire général de la préfecture de Côte-d'Or. C’est un peu un gâchis par rapport à ce qu’ils auraient pu apporter. Mais l’impératif de l’Etat civil l’emporte. »

Ces derniers mois, les mobilisations d’associations, de professeurs et de camarades se sont multipliées en Bourgogne pour dénoncer les procédures d’expulsions contre ces jeunes ressortissants étrangers.

 

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