Connaissez-vous l'effeuillage burlesque ? Cette pratique artistique encore peu connue consacre l'art de se déshabiller tout en racontant une histoire. Et elle a de multiples bienfaits pour celles qui l'exercent. Immersion avec la troupe "Les Turbulentes" lors de son tout premier spectacle, hier soir, à Dijon.
Samedi 11 février. Il est 18h. Rendez-vous a été donné au bar Le Cellier, rue Auguste Perdrix, à Dijon. Dans deux heures, l'établissement accueillera un spectacle du "Cabaret du scandale", un cabaret burlesque de la région. Petit événement, ce sera aussi l'occasion de voir la première représentation des "Turbulentes", la première troupe d'effeuillage burlesque dijonnaise.
L'effeuillage burlesque ? Cette pratique ne vous dit peut-être rien. Comment l'expliquer ? C'est Chloé Delafenestre, professeure et productrice burlesque, également créatrice des "Turbulentes", qui l'explique le mieux : "C'est un art qui vient du cabaret. Le fait de retirer ses vêtements de façon différente, pour raconter une histoire, avec un poil de transgression. C’est une sorte de striptease artistique, si ce n'est qu'on ne finit jamais nue".
Chloé Delafenestre a implanté l'effeuillage burlesque à Dijon, en septembre. "C'est une pratique peu connue, assez surprenante. Le fait de se déshabiller en public peut impressionner. Pourtant, dès le premier cours d'essai, ça a accroché. Les dix femmes venues essayer se sont inscrites".
On apprend à s’aimer telles que l'on est : avec nos poils, nos bourrelets, nos vergetures. On apprécie les formes que l’on peut avoir et qu'on ne retrouve pas dans les magazines. C'est important de se trouver jolie, drôle, artiste"
Chloé Delafenestre, professeure et productrice burlesque, également créatrice des Turbulentes
Ce sont d'ailleurs elles que l'on retrouvent au Cellier ce soir, en train de s'échauffer et de répéter une dernière fois leurs chorégraphies, avant le révélateur de la scène. Chloé Delafenestre donne de la voix. Entre deux consignes, elle nous révèle ce qui fait la force de son activité : "J’aime beaucoup l’idée que nous, les femmes, puissions transgresser les préjugés et injonctions qu’on peut avoir dans notre société, détaille-t-elle. On apprend à s’aimer telle que l'on est : avec nos poils, nos bourrelets, nos vergetures. On apprécie les formes que l’on peut avoir et qu'on ne retrouve pas dans les magazines. C'est important de se trouver jolie, drôle, artiste".
Pour atteindre ces objectifs, la coach entraîne donc ses ouailles une fois par semaine . "Comme pour tout art vivant, on travaille différentes choses. Les démarches, bien sûr, qu'on multiplie pour développer la créativité. On bosse souvent face à un miroir, pour se regarder et accentuer ce qui va bien, ce qu'on ne trouve pas beau chez nous. Enfin, pour la scène, on se concentre sur le regard, la gestuelle et l'harmonie avec la musique" énumère Chloé Delafenestre.
On a envie de se connaître un peu mieux, de se dévoiler aux yeux des autres à travers une performance artistique qui en plus nous fait gagner de la confiance personnelle.
Marion, membre des Turbulentes
Une discipline qui, pour les artistes, est pleine de bienfaits. "Ca m’apporte beaucoup de bien-être, explique Marion. On a envie de se connaître un peu mieux, de se dévoiler aux yeux des autres à travers une performance artistique qui en plus nous fait gagner de la confiance personnelle. Ce qui est le plus dur, c’est le regard, à la fois des autres et de soi-même. Mais on finit par apprécier cela, et même à en jouer".
Une sensation partagée par Marine, autre membre des "Turbulentes" : "Grâce à l'effeuillage artistique, on s'aime davantage. Je suis une femme ronde, et je voulais accepter mon corps. Cela m'a beaucoup aidée". La jeune femme retient également les liens tissés avec ses sœurs de scène depuis septembre : "On a créé une vraie sororité. On montre différents corps. C'est à la fois excitant et motivant. On se maquille ensemble, on fait tout ensemble, on se déshabille ensemble. Forcément ça rapproche".
Les minutes tournent, "Les Turbulentes" partent au maquillage. Et la boule au ventre apparaît, comme chez Lucie : "Forcément, le stress est présent : être sur scène, sentir les regards du public sur nos corps, oublier notre chorégraphie. Mais c'est aussi un défi. On s'est entraîné dur. On veut faire ressentir des émotions à ceux qui nous regardent, et en vivre nous-mêmes".
20h. Le caveau du Cellier se remplit. Les lumières s'éteignent alors que la musique se fait entendre. Les Turbulentes ouvrent le cabaret avec leur spectacle "James Bond Girl Revenge". Le stress glisse et laisse la place à un show sexy, drôle et sans complexe. L'aspect artistique est prégnant. L'harmonie entre les danseuses et avec le public, lui, est palpable.
Le public est conquis. "Faut le faire ! Je serai incapable d’y aller, avoue Nathalie. Mais je pense que ça peut faire bouger un peu les choses. Ça fait voler en éclat les canons de beauté que nous, les femmes, devons respecter pour être acceptées par la société. Il faut que ça se poursuive. Oser la différence, c'est important".
Cette prestation réussie pourrait même faire naître des vocations : "C'est très courageux de montrer son corps comme cela, devant un public inconnu. Elles s'assument complètement, chapeau, analyse Victoire. Je les ai déjà vues une fois, et depuis janvier, je m'entraine avec elles. Bientôt, j'espère que ce sera moi sur scène" conclut la jeune femme.