La bibliothèque patrimoniale et d'études de Dijon a numérisé et mis en ligne un remarquable ouvrage rédigé par un militaire en retraite pendant la Première Guerre mondiale. Du début des hostilités jusqu'à la ratification du traité de paix, il a rédigé un journal de 8 volumes de 300 pages chacun.
Presque chaque jour, de 1914 à 1919, le lieutenant-colonel Guillaume Cullard a écrit dans son journal ce qu'il fallait retenir de ce qui se passait à Dijon, mais aussi sur le plan national et international.
Cet homme né en 1838, ancien militaire de carrière, s'est fait un devoir de consigner le plus précisément possible tous les événements d'importance afin que cela reste à la postérité. Doué pour le dessin, il a illustré lui-même son journal par des aquarelles représentant des scènes de la vie dijonnaise ou encore des caricatures de personnalités de l'époque.
Samedi 1er août : Depuis 4 jours, notre ville est dans l'anxiété; des indices nous font pressentir que la guerre est menaçante. La proximité de la frontière, le souvenir de 1870, aggravant nos appréhensions. On sent que rien ne pourra plus nous éviter la terrible épreuve qui s'avance. L'attitude des Dijonnais est recueillie, calme, sans effroi; dans les rues, on s'aborde, à voix basse, on s'interroge. Les physionomies sont sérieuses; on a confiance dans l'armée et dans ses chefs, et on se dit que l'occasion est bonne de se venger de 1870, et des injures grossières que depuis 40 ans les Allemands font à la France.
Les premières phrases des éphémérides du journal du lieutenant-colonel Cullard sont précédées de quelques pages consacrées aux causes de la guerre. Il en explique le contexte puis à la date du 1er août, il écrit :
dès le jeudi 30 juillet, le 27e dragons et le 48e d'artillerie, tout deux en garnison dans notre ville, sont partis de nuit pour la frontière (...) Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, 58 trains se suivant à un quart d'heure, ont passé en gare de Porte-Neuve, transportant des troupes à la frontière (...) Les correspondances postales et les frontières de voyageurs et de marchandises sont suspendus.
Quelques lignes plus loin, il décrit la transformation de la ville aux premières heures de la mobilisation :
Lundi 3 août, le décret de mobilisation générale est affiché. Notre maire organise la commission de ravitaillement et divise la ville en secteurs. Des écriteaux sont placés dans la cour de gare indiquant le point de réunion des catégories de réservistes et de territoriaux. Les chevaux mobilisés sont réunis dans la plaine de la Maladière. La Croix-Rouge organise ses hôpitaux. Subitement, Dijon a pris l'aspect d'une ville militaire, place forte.
Le journal d'un Dijonnais, du Lieutenant Colonel Guillaume Cullard se lit comme un livre. Il raconte ce qu'il a vu, lu et entendu. Le lundi 17 Août il note :
Les blessés commencent à arriver". Samedi 22 août "les armes nouvelles produisent des effets terribles qu'on n'avait pu prévoir, de nombreux blessés arrivent (...) les ambulances de gare et les hôpitaux temporaires pourvus d'un personnel inexpérimenté sont débordés"(...) Le 16 septembre : "les blessés sont innombrables; on a créé des ambulances dans les campagnes, les hôpitaux temporaires étant insuffisants".
Le Journal d'un Dijonnais ne s'en tient pas qu'à la ville de Dijon. Le déroulement de la guerre sur les différents fronts, ainsi que les décisions militaires et politiques sont également notées. En octobre 1915, il parle du massacre des Arméniens :
A Contantinople, les atrocités contre les Arméniens ont été poussées à l'extrême, malgré les représentations de l'Ambassadeur des Etats-Unis; 85.000 Arméniens ont été massacrés au total, et les femmes et les filles ont été vendues aux harems turcs
Si vous souhaitez lire le Journal d'un Dijonnais dans son intégralité, c'est possible de le faire sans sortir de chez vous. Vous pouvez le feuilleter sur votre écran. Les 8 tomes (7 journaux + 1 atlas) ont été numérisés par la bibliothèque patrimoniale et d'études de Dijon.
Histoires 14-18 il y a cent ans : Les manuscrits Cullard
Equipe : Caroline Jouret - Alain Tixier ( Images) - Jean-Renaud Gacon (Lumière) - Francis Nivot (Son)
Remerciements à la bibliothèque patrimoniale et d'études de Dijon