"J'ai décidé de mourir en arrêtant mon traitement" - Le dijonnais Alain Cocq a rendez-vous avec l'Elysée le 25 août

Alain Cocq est Dijonnais. Lourdement handicapé à cause d’une maladie orpheline qui s’aggrave, il appelle Emmanuel Macron à légaliser le droit à l’aide active à mourir dans la dignité. Le 25 août prochain, il sera entendu par des conseiller de l'Elysée.

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C’est dans une lettre adressée au président de la République que le Dijonnais Alain Cocq a rendu publique sa décision de mourir sciemment en cessant ses traitements. La semaine dernière, Alain Cocq a reçu une réponse de l'Elysée. Il et sera reçu le mardi 25 août

"La balle est dans le camp de la présidence"

Le rendez-vous est donné le 25 août à 16h30. Initialement prévu au palais de l'Elysée, le rendez-vous aura lieu en téléconférence. Alain Cocq sera entendu par Anne-Marie Armenteras (conseillère en charge des solidarités et de la santé) et le Professeur Vincent Morel, en charge du plan national Développement des soins palliatifs et accompagnement de fin de vie.

"Ils attendent que je leur explique plus en détails ma démarche... Mais ma démarche est claire !" confie Alain Cocq. Il n'espère qu'une chose de ce rendez-vous : "qu'ils m'autorisent à être accompagné par le corps médical pour pouvoir partir tranquillement. La balle est dans le camp de la présidence maintenant."

A cette occasion, les représentants des associations ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité),  Ultime liberté et Handi mais que devraient pouvoir participer à la discussion. 

L'arrêt des soins repoussé

Alain Cocq avait décidé d'arrêter de s'alimenter et de s'hydrater pour mourir chez lui, comme l’y autorise la loi Léonetti, dès le 26 août. "Mais j'ai du respect pour nos institutions, et je ne vais pas à Paris en leur mettant le couteau sous la gorge." Alors Alain Cocq a décidé de repousser l'arrêt des soins au 4 septembre. "Soit je bénéficie d'un accord du Président pour partir dans la dignité et je pars apaisé, soit je pars dans la souffrance" explique-t-il. Dans ce cas il promet d'arrêter les traitement et de filmer son agonie en direct sur les réseaux sociaux. 



Interview réalisée le 3 août dernier :

Pourquoi avoir décidé de mourir, dans ces conditions, le 26 août prochain ?

Alain Cocq : "J’ai une maladie orpheline, avec de plus en plus de complications depuis quatre ans. Tous mes organes vitaux sont atteints, j’ai quatre anévrismes au cerveau, et si je ne prends pas mon traitement je convulse. Je suis pourtant devenu quelqu’un de résistant à la maladie, mais là, je n’arrive plus à sortir de mon lit sans hurler de douleur. Me consoler avec une vie virtuelle sur internet ne m’apporte aucune satisfaction, je suis confiné dans mon lit, ce n’est plus une vie. La date en revanche, elle n’a aucune signification. Elle s’est imposée à moi."
 

Allez-vous respecter la loi en mettant fin à vos soins ?

"Oui, la loi Leonetti autorise l’arrêt des soins, c’est donc ce que je vais faire. Dès le 26 août, mes auxiliaires de vie seront à mes côtés, nous allons arrêter les sondes et les perfusions qui m’hydratent et qui m’alimentent, et je n’aurai qu’un traitement sédatif, pour mourir petit à petit.

Mais la morphine est un anesthésiant progressif. J’aurai préféré une vraie loi pour mourir dans la dignité, en m’endormant d’un coup, sans souffrir. On est dans un pays qui laisse les gens face à leurs maladies, à leurs souffrances, pour moi cela s’apparente à de la torture ou de la barbarie. Demander aux malades de stopper leurs traitements pour souffrir jusqu’au bout ce n’est pas humain. C’est pour cela que j’ai voulu écrire au président de la République."
 

Pour alerter le président sur votre situation ?

"Cette lettre c’est un dernier combat pour moi, pour continuer de demander le droit à mourir dans la légalité. Je voulais surtout que le président de la République se rende compte à travers mon témoignage que la loi Léonetti n’est pas suffisante, qu’elle ne correspond pas à l’ampleur des souffrances de certains malades.

Il faut que les autorités entendent que mourir dans la dignité c’est encore autre chose qu’un suicide, c’est réclamer un soin ultime face à la maladie. Pour l’instant, je n’ai reçu aucune réponse d’Emmanuel Macron. Je sais juste que la lettre est bien arrivée à l’Elysée. On m’a dit par téléphone qu’elle avait été lue avec attention par le directeur de cabinet du président."
 

Cela représente quels sentiments de programmer sa mort ?

"Je suis serein. J’ai hâte d’y être maintenant que ma décision est prise. J’ai des amis qui viennent me dire au revoir petit à petit. J’aurai mes auxiliaires de vie à côté de moi ce jour-là. C’est tout ce qui m’importait. Je laisse une sœur, à qui cela fait beaucoup de peine, certes mais j’ai tout prévu administrativement, elle n’aura que les certificats de décès à envoyer.

Mon dernier rendez-vous médical au centre anti-douleur de Dijon se fera le 20 août prochain, et ensuite, à partir du 26 août, tout sera retransmis en direct sur ma page Facebook. Il faut que les citoyens sachent que l’on n’arrive pas encore à mourir dans la dignité de nos jours, et que l’on est obligé de passer par une lente agonie. La maladie touche 70% de nos concitoyens, il faut médiatiser nos souffrances pour que la loi change un jour."
 
Extrait de la lettre, du 20 juillet 2020, adressée à Emmanuel Macron :

"Monsieur Emmanuel Macron,
Si je me permets de vous écrire, c’est au regard de la violation caractérisée de mon droit à l’auto-détermination et du droit à disposer de soi-même et donc de son corps. […] Depuis plus de 34 ans je me bats pour la vie dans la dignité.  […]
Je tiens à vous préciser à ce jour que je me trouve dans la situation d’un esprit sain, confiné dans un corps dysfonctionnel et perclus de douleurs.

Je me retrouve dans la situation où le corps médical est impuissant à soigner ma pathologie orpheline. […] Pour moi à ce jour, je ne suis plus dans une situation de vie digne ! Me maintenir en vie coûte chaque année entre 200 000 et 500 000€. Je demande simplement à partir dans la dignité, avec une assistance active du corps médical.

Certains utilisent le terme "d’euthanasie active" ou de "suicide assisté", mais pour moi le terme le plus adapté est "fin de vie dans la dignité". "Euthanasie" rappelle le programme d’extermination du peuple juif, des tziganes, des militaires russes et des opposants politiques, par le nazisme.

En l’état actuel, la loi Claès-Leonetti m’imposer une agonie de 3 à 7 jours dans des souffrances atroces, par l’arrêt de l’alimentation, de l’hydratation et de l’ensemble des traitements médicaux. […] Je vous sollicite pour pouvoir bénéficier à titre compassionnel, du droit à une fin de vie dans la dignité, avec une assistance active du corps médical.

Alain Cocq"
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