Avoir des poules est une bonne solution pour éliminer ses déchets alimentaires, tout en ayant des œufs frais. En Côte-d'Or, des poulaillers communaux ont même vu le jour pour le plus grand plaisir des petits habitants. Après plusieurs années d'existence, comment se portent aujourd'hui ces projets éducatifs et écologiques ?
Fourche à la main, Maëlle s'active dans le poulailler. Du haut de ses neuf ans, c'est avec énormément d'énergie qu'elle retourne la paille. "C'est surtout pour mettre les fientes vers le bas, pour que les poules soient mieux et pour vérifier qu'il n'y a pas d'œuf dans le foin", explique la petite fille avec beaucoup de sérieux, avant de retourner à sa tâche.
Travail d'équipe
Avec plusieurs camarades de classe, elle profite du temps de la récré pour s'occuper des poules de la commune. Depuis 2015, à Mâlain près de Dijon, un poulailler communal a été mis en place dans le parc, face à la mairie et à l'école publique. Et ce n'est pas une punition !
"C'est amusant, assure Paul en puisant dans le tonneau d'eau de pluie. On doit récupérer les œufs, remuer la paille, remettre de l'eau et des grains, enlever les cacas..." Avec une récompense à la clef : récolter les œufs du jour.
"J'aimerais leur faire des câlins"
La poule rousse et la poule blanche plongent leur bec dans la gamelle pour boire, tout en surveillant du coin de l'œil les enfants qui s'agitent dans leur enclos.
"Le plus difficile, c'est de les approcher, j'aimerais bien leur faire des câlins", confie Léo. Une fois ses tâches terminées, Maëlle prend du blé dans sa main et s'accroupit pour tenter d'attirer les poules et leur coq. "Ma cousine a trois poules, j'aime bien et je ne pense pas que le coq soit méchant", assure la petite fille.
À force de persévérance, ça y est ! La poule blanche, plus téméraire, commence à picorer dans sa paume. Mais il est temps de quitter l'enclos, le cours de sport va commencer.
On ne fait pas d'omelette sans casser d'œufs
En semaine, les élèves de CM1-CM2 de l'école de Mâlain prennent soins des volailles, chapeautés par leur professeur Nicolas Bénéton, également maire de la commune. "Pendant une semaine, à tour de rôle, ils les nourrissent, les soignent, ils s'organisent ça les responsabilise", se réjouit l'enseignant.
Si quelques œufs sont cassés sur le chemin de l'école ou en classe, les enfants repartent chez eux avec la collecte du jour. "Même si c'est moins rigolo l'hiver, reconnait l'enseignant. Il y a de la boue et moins d'œufs." Pas sûr que les petits écoliers de Mâlain trouveront la réponse à qui de l'œuf ou de la poule est arrivé en premier, mais ce qui est certain, c'est qu'ils savent d'où viennent les œufs !
Le week-end et pendant les vacances, la place est laissée aux habitants volontaires. Ils peuvent s'inscrire sur le tableau accroché à l'entrée du poulailler, pour venir s'occuper des poules et récolter les œufs. Ainsi, entre quinze et vingt familles se relaieraient selon la mairie.
Bientôt de nouvelles poules
Chiens errants, buses, maladie ? La vie d'une poule n'est pas toujours facile et plusieurs sont mortes ou portées disparues. Il va donc falloir trouver des copines pour le trio et ce sont les enfants de l’école qui les choisiront. “L’idéal pour un coq, c’est d’avoir entre six et sept poules, pour qu’il ait son harem et qu’elles soient un peu tranquilles pendant la période de reproduction”, détaille Bérénice Toutant, conseillère municipale.
Petit rappel : pas besoin de coq pour que les poules pondent des œufs, “mais il assure leur protection”. Animaux sociables, il vaut mieux ne pas avoir une poule seule.
Réduire les déchets
Les habitants peuvent aussi apporter leurs déchets alimentaires pour nourrir les poules. Omnivores, elles mangent de tout, à quelques exceptions : agrumes, pommes de terres crues, trognons de choux, céleri, os, aliments moisis… Sur l'enclos, un panneau indique ce que les volailles peuvent manger.
Une bonne nouvelle, car à Mâlain, le ramassage des ordures ménagères se fait une fois par mois, ou il faut payer pour des levées supplémentaires.
Chaque année, un Français produit 75 kilogrammes de biodéchets, qui sont compostables ou consommables par les poules. Ils représentent un tiers des ordures ménagères qui sont soit brûlées pour produire de l’électricité et de la chaleur, soit enfouies.
"On évite la multiplication des coqs"
Le besoin d'un poulailler communal étonne dans un village de 700 habitants, entouré de champs. On s’attendrait presque à trouver des poules chez tout le monde. “Beaucoup de maisons mitoyennes n’ont pas de jardin et les gens aiment bien partir en vacances et n'ont pas envie d'avoir des animaux. On évite la multiplication des coqs dans le village”, souligne avec malice la conseillère municipale.
Pour diminuer les déchets, en Côte-d'Or, Villers-les-Pots a aussi mis en place un poulailler municipal. C'est l'initiative de la commune de 1 000 habitants qui avait inspiré sa voisine Mâlain. En 2013, France 3 avait fait un direct dans la commune pour en parler.
Une décennie d'existence
Alors, dix ans plus tard, qu'est devenu ce poulailler ? "Il est actuellement en sommeil, prévient Cédric Vautier, le maire de la commune. On reprendra des poules cet hiver ou au printemps." La commune a réaménagé le terrain du poulailler et a ajouté plusieurs équipements : une ruche pédagogique, un jardin partagé et peut-être aussi une haie pédagogique. Une animatrice nature devra animer des ateliers pour les enfants.
"Il restait 4 ou 5 poules qui ont été prises en pension, détaille l'élu. On va repartir sur une dizaine de poules, mais pas de coq, pour ne pas déranger les voisins." Ce sont les jeunes du village qui prendront soin des volailles. Quand une poule pond sur une année plus de 200 œufs, il y a de quoi faire une belle omelette.