Au lendemain de la conférence de presse donnée par le CHU de Dijon, les enfants de Claudette, la patiente décédée après quatre reports de son opération du fémur, témoignent. Ils doutent de la version avancée par l'hôpital.
C'est une fratrie fatiguée, endeuillée par la mort de sa mère et usée par le tourbillon médiatique déclenché la semaine dernière. Jean et Murielle sont les enfants de Claudette, décédée le 31 août dernier au CHU de Dijon. Admise pour une fracture du fémur, elle voit son opération reportée quatre fois d'affilée faute de place au bloc opératoire. Son état de santé se dégrade au cinquième jour, elle est admise en réanimation et meurt trois jours plus tard. Selon ses enfants, leur mère, âgée de 77 ans, a été placée à jeun et n'a rien mangé pendant plus de quatre jours. Ce mardi, le CHU de Dijon s'est défendu lors d'une conférence de presse, affirmant que, si des temps de jeûne ont bien été prononcés, Claudette a été alimentée chaque jour lorsqu'il était décidé qu'elle ne serait finalement pas opérée.
"Ils ont pu se tromper de chambre"
Mais les explications avancées par le CHU ne convainquent pas le frère et la sœur. Au lendemain des déclarations du CHU, Jean et Murielle restent sur leur version des faits. "Je n'ai jamais vu de plateau repas dans sa chambre", affirme Murielle, "alors que j'y suis allée deux fois en début d'après-midi, donc juste après l'heure du déjeuner". Jean renchérit : "Pourquoi elle nous aurait appelés X fois en disant qu'elle avait faim et soif si ce n'était pas vrai ?"
En outre, le frère et la sœur se souviennent des paroles du médecin qui les a reçus lorsque leur mère a été admise en réanimation. "Il nous a dit qu'elle était en déshydratation totale." Comment est-ce possible, alors que l'hôpital assure que des repas ont été commandés, distribués, et que c'est inscrit au dossier de Claudette ? "Ils ont pu se tromper de chambre", juge Murielle. Quoi qu'il en soit, les deux enfants attendent du CHU "qu'il amène des preuves de tout ce qu'il affirme".
La victime avait-t-elle pris son traitement habituel ?
Jean et Murielle ont également une autre hypothèse, qui n'a pas été abordée lors de la conférence de presse du CHU. Leur mère souffrait de plusieurs pathologies et prenait un traitement composé de plusieurs médicaments. "Peut-être qu'ils ne lui ont pas donné son traitement. Elle avait un traitement carabiné pour des problèmes de reins, de cœur et de sang : est-ce qu'ils lui ont donné ?" s'interroge Jean. "Si elle n'a pas eu ses médicaments, c'était un vrai risque pour sa santé."
Cette question, c'est l'autopsie qui pourra y répondre. Des analyses complémentaires ont été demandées par la justice, et leurs résultats ne sont pas encore connus. L'autopsie pourra également déterminer ce qu'a mangé Claudette avant son décès.
"On avait confiance en l'hôpital"
En parallèle de l'hospitalisation de leur mère, Jean et Murielle ont dû composer avec une autre contrainte : s'occuper de leur petite sœur, handicapée et non autonome, qui vivait avec Claudette. "Quand maman était avec elle, elle gérait tout. Quand maman est partie à l'hôpital, ce n'était pas facile de gérer à la fois le CHU et notre petite sœur qui n'était pas en sécurité. Elle ne pouvait rien faire toute seule, elle ne savait pas prendre une douche. Il y avait un risque de mort pour elle aussi."
"Pour nous, celle qui craignait le plus, c'était notre petite sœur. Notre maman, on pensait qu'elle était en sécurité à l'hôpital."
Le frère et la sœur affirment qu'ils avaient "confiance en l'hôpital" avant ce drame. Aujourd'hui, ils espèrent que leur voix portera et que d'autres familles de victimes trouveront le courage de parler si elles ont vécu la même chose. "Il faut faire réagir les gens", insiste Murielle. Jean confirme : "Il ne faut pas que les victimes restent dans l'ombre."