Procès du maire d'Echenon pour pédopornographie : "Ces enfants sont violés, même si ce n'est pas par vous"

Dominique Lott, ancien maire d'Echenon en Côte-d'Or, était jugé ce mercredi 26 avril au tribunal correctionnel de Dijon pour acquisition, détention et diffusion d'images pédopornographiques.

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MISE À JOUR 14h30 : L'audience est terminée, la décision est mise en délibéré au 2 mai à 13h30.

C'est la première fois qu'il aura pu s'exprimer publiquement sur cette affaire. Dominique Lott, qui était maire jusqu'à son arrestation en novembre 2022, était convoqué ce mercredi 26 avril au tribunal correctionnel de Dijon. Il lui était reproché d'avoir téléchargé, consulté et diffusé des milliers (plus de 10 000) photos et vidéos à caractère pédopornographique.

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10 200 fichiers à caractère pédopornographique

Fait notable, Dominique Lott est arrivé entouré de ses proches. L'ex-maire de 63 ans est représenté par maître Elodie Mifsud. Les faits qui lui sont reprochés s'étendent de mai 2021 à juillet 2022. Il est, depuis, placé sous contrôle judiciaire avec interdiction, notamment, de travailler avec des enfants, et une obligation de soins.

L'audience commence par le résumé des faits. Dominique Lott s'exprime d'une voix faible, difficile à entendre même pour le président du tribunal.

Entre le 18 et le 24 mai 2022, l'OCRVP repère l'adresse IP de Dominique Lott après qu'il a téléchargé deux vidéos à caractère pédopornographique. Les enquêteurs découvriront, au total, environ 10 200 fichiers de ce type. 

Lors de l'audience ce mercredi, Dominique Lott explique : "J'ai moi-même demandé à l'officier comment c'était possible d'avoir autant de fichiers, je voyais pas comment c'était possible." En effet, comme le reconnaît la cour, le système de téléchargement "peer-to-peer" fait que certains fichiers peuvent être téléchargés sans intention de la personne (on télécharge un fichier volontairement, et plusieurs autres fichiers s'y ajoutent automatiquement). Pour autant, les faits restent caractérisés, selon le président. "Effectivement, vous n'en avez peut-être pas téléchargé 10 200, mais vous en avez téléchargé une énorme quantité."

"Chinoise de neuf ans"

Au départ, rappelle le président, Dominique Lott nie les faits face aux enquêteurs. Mais, acculé par les preuves, il finit par reconnaître qu'il regarde ces images depuis "environ cinq ans", il décrit au moment des investigations une "simple curiosité" au départ qui s'est transformée en "engrenage". Face au tribunal, Dominique Lott explique qu'il consultait beaucoup ces fichiers à certaines périodes, puis qu'il s'arrêtait, et recommençait.

Le président liste certaines recherches qui ont été faites sur internet par Dominique Lott : "Nine years chinese girl" (chinoise de neuf ans), "pedogirl", "13 years asian girl". "Pas besoin de bien parler anglais pour comprendre", tance le président.

"Si des gens font ça sur ces enfants et les filment, c'est pour apporter ce "produit" à vous, pardon, vous les lâches derrière leurs ordinateurs. S'il n'y a pas de gens qui regardent des films pédoporno, il n'y a pas de "réalisateurs" de films pédoporno. Et les enfants qui sont derrière ça, ce sont des acteurs ? Ils ont l'air heureux ?" interroge avec véhémence le président.

Dominique Lott répond d'une voix faible, acquiesce. Le président lit les déclarations de l'expert qui a examiné l'ancien maire. Cet expert explique que le prévenu a du mal à verbaliser et à parler des faits, qu'il a même "un certain détachement" sur le plan sexuel et évoque une "pauvreté du discours" du prévenu sur ce qui lui est reproché. L'expert ne pointe pas de "dangerosité psychiatrique" mais pointe la nécessité d'un suivi.

Depuis novembre 2022, Dominique Lott a respecté son contrôle judiciaire et notamment ses rendez-vous avec un psychologue. Grand-père de plusieurs petits-enfants, il continue à voir ces derniers.

"J'aime bien l'Asie"

"Vous êtes d'accord avec le fait que vraisemblablement vous avez une attirance pour les mineurs ?" interroge la procureure de la République de Dijon. Dominique Lott répond, toujours d'une voix faible en marmonnant. Sa réponse est inaudible pour le public.

La cour interroge le prévenu sur une déclaration faite par son fils lors de son audition par les enquêteurs. Il rapportait alors (en novembre) que Dominique Lott entretenait une relation sentimentale, depuis environ deux mois, avec une personne vivant aux Philippines.

"Pourquoi les Philippines ?" demande la cour. "J'aime bien l'Asie", répond Dominique Lott. Une déclaration qui fait lever un sourcil à l'un des assesseurs, au vu de l'intitulé des recherches menées par le prévenu sur internet évoquées plus tôt dans l'audience. Dominique Lott indique que cette femme avec qui il correspondait avait 31 ans, et qu'il avait auparavant eu une autre relation à distance avec une Philippine de 36 ans.

Un discours "qui reste inabouti" pour la procureure

Au bout de 45 minutes d'audience, la procureure prend la parole pour ses réquisitions.

"Ce qui m'interpelle, c'est ce discours qui reste à mon sens inabouti", regrette la procureure. "Ces enfants, ils sont violés, même si ce n'est pas par vous", rappelle-t-elle. Elle demande une peine de prison de 12 mois avec deux ans de sursis probatoire, obligation de soins et interdiction de paraître dans tout lieu fréquenté par des mineurs.

La procureure demande deux peines complémentaires : l'interdiction définitive d'exercer une profession au contact des mineurs, et l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans. Cela concerne plus nommément l'interdiction du droit de vote et le droit d'être élu.

"Monsieur Lott, ce n'est pas le grand méchant loup", défend son avocate

Maître Mifsud, l'avocate de Dominique Lott, prend ensuite la parole pour défendre son client. "Au départ, il vous l'a dit, c'est de la curiosité. Ca commence sur Google, avec des sites référencés, des actrices majeures et consentantes, mais qui se font passer pour des mineures. Et après, ça passe en peer-to-peer."

"Monsieur Lott ne vous l'a pas dit parce qu'il est pudique, parce qu'il y a du monde dans cette salle, des journalistes, des enfants (des scolaires sont en effet présents pour suivre l'audience). Mais ce qu'il ne vous a pas dit, et ce dont il a discuté avec son psychologue, c'est que peut-être ces images le renvoient à sa propre enfance."

"Peut-être que derrière ces images dégueulasses, il faut le dire, monsieur Lott cherche à caresser toute cette jeunesse, tout ce qu'il n'a plus aujourd'hui. Et il ne voit pas, ou ne veut pas voir, que c'est lui le danger. Il est là, devant son écran où tout n'est que plaisir, il se dit que ce n'est pas si grave. Pourtant ça l'est."

Maître Elodie Mifsud

"Monsieur Lott, il a téléchargé de la pédopornographie. Et il en a oublié la loi, la souffrance des enfants, cette exploitation. Il s'est enfermé lui-même dans un beau rêve, dans un beau mensonge, et pour lui le réveil a été particulièrement brutal", poursuit son avocate.

L'avocate rappelle la médiatisation de l'affaire. "On a affiché sa tête dans la presse. Pourtant, on a vu tellement pire !" affirme maître Mifsud. "10 000 fichiers, c'est rien, on a vu pire ! Vous avez vu pire !" lance-t-elle en interpellant le jury. "C'est une affaire tristement banale. Pourtant, pour d'autres, ça a moins de conséquences que pour monsieur Lott."

"Monsieur Lott, c'est pas le grand méchant loup", affirme son avocate. Elle rappelle qu'aujourd'hui, il n'a plus d'emploi et s'occupe régulièrement de ses petits-enfants. Elle demande ainsi à ce que la cour ne retienne pas l'interdiction de paraître dans des lieux fréquentés par des mineurs. "La famille a tenu bon, aujourd'hui c'est laseule chose qui lui reste. Il a perdu son statut, son confort financier et surtout sa maison. Il a déménagé d'Echenon."

La décision de justice est placée en délibéré. Elle sera rendue le mardi 2 mai, à 13h30.

Des images avec des "poses suggestives" ou des "rapports sexuels"

Mi-novembre 2022, l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) interpelle dans toute la France 48 hommes soupçonné d'avoir téléchargé et consulté massivement des photos et vidéos sexuelles mettant en scène des enfants. Dominique Lott en fait partie : il est alors maire d'Échenon (Côte-d'Or), un village d'environ 800 habitants près de Saint-Jean-de-Losne. 

Le procureur de Dijon, Olivier Caracotch, explique alors : "L'exploitation du matériel informatique de la personne mise en cause faisait apparaître des fichiers images et vidéo mettant en scène des mineurs de 5 à 15 ans, dans des poses suggestives, ou ayant des rapports sexuels entre eux ou avec des adultes."

Au moment de son arrestation, Dominique Lott a reconnu "une partie des faits". Il encourait une peine maximale de 7 ans de prison et 100 000 euros d'amende pour détention, acquisition et diffusion de l'image d'un mineur représentant un caractère pornographique. 

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