Guetteurs, nourrices, banquiers... Nous avons suivi une patrouille de police qui nous détaille les méthodes des trafiquants de drogue au quartier des Grésilles, à Dijon. Un commerce aux méthodes bien rôdées qui rend la tâche difficile pour les forces de l'ordre.
20 millions d'euros de stupéfiants ont été saisis sur l'agglomération dijonnaise depuis le 1er janvier 2022. Cette somme, c'est le résultat d'un travail quotidien des forces de police. Une tâche loin d'être évidente, les forces de l'ordre faisant face à un trafic de drogue bien organisé.
Guetteurs et tags hostiles
Chaque jour, une brigade de police se rend aux quartiers des Grésilles à Dijon, ou au quartier du Mail, à Chenôve. Là, des trafiquants de stupéfiants font leur commerce, bien installés dans leur zone de bâtiments.
Les policiers sont accueillis par des tags hostiles qui menacent les forces de l'ordre, ainsi que des jeunes peu impressionnés par leur présence. "Je ne sais pas pourquoi ils sont ici, on est des gens bien mais en tout cas, bienvenue à vous mesdames et messieurs les policiers !", ironise l'un d'entre eux.
Le trafic de stupéfiants est un commerce très bien organisé où chacun connaît son rôle. Un policier explique la difficulté de l'intervention. "Des guetteurs sont posés un peu partout et crient lorsqu'on arrive. Dès qu'on est à proximité, beaucoup viennent s'interposer pour retenir ceux qui s'enfuient avec les stupéfiants. Cela peut alors arriver qu'il y ait des affrontements."
Les bâtiments où les dealers sont installés sont de vraies souricières
Un policier dijonnais
Difficile d'arrêter les dealers avec des substances illicites tant les moyens de s'échapper sont importants. "Ils fuient ou ils s’enferment chez des gens contre une rémunération pour se cacher. Il y a aussi des nourrices, des personnes qui cachent chez elle de la résine, de l'herbe ou de la cocaïne", détaille le policier.
Pour les clients également, rien n'est laissé au hasard. Les prix sont affichés sur les murs, à l'abri des regards. Lorsque les policiers sont repérés par les guetteurs, les consommateurs sont amenés à attendre à un endroit précis et toute transaction est suspendue, en attendant que ça se calme. "Sur place, un vendeur sert, puis un banquier récupère l’argent des clients. Après cela, tout le monde part dans tous les sens. Les groupes de bâtiments où ils sont installés sont de vraies souricières", fait savoir le policier.
Qui sont-ils et quelles sont les solutions ?
Certains sont pourtant souvent bien connus des services de police. "On a leur nom, leur prénom et leur adresse. Ce sont pour beaucoup des jeunes mineurs ou majeurs, qui viennent de la banlieue parisienne. Ils peuvent aussi venir de la cité de Nice ou de Toulouse", signale le policier.
Face à cette minutieuse organisation, la brigade doit trouver des alternatives. "On essaie d'être le plus discret possible. On peut par exemple venir très tôt le matin avant qu'ils soient placés. On élabore des techniques après avoir déterminé où étaient les produits ainsi que les trafiquants. On attend la transaction pour interpeller les personnes pour avoir un maximum de stupéfiants et de preuves contre eux", raconte-t-il.
60 policiers en renfort cette semaine
Depuis quelques jours, 60 policiers sont arrivés en renfort dans l'agglomération dijonnaise, avec l'objectif de stopper le trafic de stupéfiants. Le préfet Fabien Sudry se réjouit de leur présence et espère mettre fin au réseau. "Nous souhaitons éradiquer les points de deal enracinés sur l’agglomération, harceler ceux qui s’adonnent à cette activité et qui perturbent la vie et la tranquillité de nos concitoyens. Pendant une semaine, nous allons en profondeur pouvoir mobiliser les CRS à ce sujet", déclare-t-il.
Si Fabien Sudry se veut optimiste sur le démantèlement du réseau, les renforts ne resteront que quelques jours en terre bourguignonne, avec la menace de voir des stupéfiants à nouveau circuler après leur départ. "La circonscription bénéficie de moyens de renfort depuis deux ans, puisqu’une cinquantaine de policiers supplémentaires ont débarqué et nous avons mené 250 interpellations depuis le début de l’année", répond le préfet.
Les habitants divisés sur l'arrivée des CRS
Les habitants, eux, ont des avis plutôt partagés sur leur arrivée. Certains voient la présence des agents d'un bon œil et espèrent avoir un peu plus de tranquillité. "Cela fait deux jours que je les vois faire le tour dans le quartier. C’est rassurant, on ne se sent pas en danger. Ici, il y a beaucoup de personnes âgées et des gens qui ont besoin de se sentir en sécurité", reconnaît une passante.
Mais d'autres sont plus sceptiques. "Ils vont venir et tourner, mais on a toujours du bruit avec des rodéos dans la rue la nuit. Si c'est un coup de communication pour rassurer les gens, ça va tenir cinq minutes".