Un père de famillé tué dans l'incendie mais peu de certitudes au procès : "il y a trop de doutes dans le dossier"

Ce mercredi 11 septembre, la vice-procureure de la République de Dijon a requis la relaxe pour Steve L. Il est mis en cause dans un incendie qui a touché un immeuble situé dans le centre-ville de Dijon en janvier 2021. Un homme y est mort et une autre personne blessée. La décision a été mise en délibéré au 18 novembre prochain

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Ce mercredi 11 septembre, la vice-procureure de la République de Dijon a requis la relaxe pour Steve L. Cet homme de 40 ans est poursuivi pour homicide involontaire, dans l'incendie mortel d'un immeuble situé rue du Bourg, dans le centre-ville de Dijon. La décision a été mise en délibéré au 18 novembre prochain.

Dans ses réquisitions, Marie-Pierre Bouhey a estimé "qu'il y avait trop de doutes dans ce dossier," pointant du doigt un autre habitant, debout au moment des faits, et fumeur. "C'est possible que Steve L. ait déclenché l'incendie. C'est tout aussi possible que ce soit quelqu’un d’autre," a-t-elle déclaré.

La vice-procureure a d'ailleurs ajouté une autre question, cruciale selon elle, à ce dossier : "Est-ce que l'incendie a été réellement déclenché par une cigarette ?"

Un point repris par Bruno Nicolle, l'avocat de la défense. En effet, un des experts en incendie mandatés par l'instruction a estimé qu'une "énergie d’activation volontairement apportée est retenue." "Il ne s'agit donc pas d'un mégot de cigarette," a-t-il lancé.

Il a également ajouté que l'heure à laquelle une fumée blanchâtre a été repérée pour la première fois, 4h37, "nous indique un départ de feu dans les minutes précédentes." D'après Bruno Nicolle, son client pourrait donc être l'homme qui a provoqué cet incendie mortel. Mais d'autres habitants peuvent également l'être. Donc, "vous ne savez pas, et si vous ne savez pas, vous ne pouvez pas condamner."

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Steve L. conteste les faits

Durant son audition, Steve L. conteste toujours les faits. Il se rappelle d'ailleurs de manière très précise sa soirée du 1er janvier 2021 : il jouait aux jeux de société avec ses amis. La fête se passe bien. Il consomme plusieurs verres de rosé et fume "une dizaine de joints." Mais, à un moment, une dispute éclate avec son ex-femme, Florence. Quelques secondes plus tard, elle lui donne une gifle.

Cet ancien employé de cuisine quitte alors la fête. "Je ne ressentais pas de tristesse, j'étais juste déçu de son comportement," estime-t-il à la barre. L'homme va alors parcourir environ trois kilomètres à pied pour rentrer chez lui. Les caméras de surveillance de la rue le montrent avec une cigarette à l'oreille. Mais il ne l'allume pas, déclarant aux magistrats qu'il "n'avait pas de briquet."

L'homme arrive chez lui à 3h38, puis reste quelques minutes près de la porte pour prendre l'air. Le débat s'est alors tourné vers son état de conscience au moment des faits, le président de la Cour se demandant : "Comment, en ayant bu et fumé autant, pouvez-vous dire que vous étiez conscient de vos faits et gestes ?"

Mais Steve L. continue d'assurer que c'était le cas. Ensuite, il entre dans son appartement et envoie plusieurs messages à son ami, dont un où il écrit : "Dis bien à Flo qu’elle n***e sa mère et qu’on se reverra." Il explique ensuite s'être endormi avec son téléphone et ne se réveiller que lorsque les pompiers sont venus toquer à sa porte.

Des victimes avec des séquelles encore importantes.

Une seule question a été posée par les quatre avocats qui représentent les 17 victimes de ce sinistre. Valentine Gandois a demandé à Steve L. s'il avait allumé une cigarette avant d'arriver sur les lieux du crime. En effet, lors d'une première audition, il avait précisé s'être arrêté pour en prendre une. Mais l'homme a réitéré qu'il n'avait pas de briquet pour pouvoir l'allumer.

L'une des 17 victimes a ensuite pris la parole à la barre. Caroline G. était résidente au numéro 50 au moment des faits. Elle a réussi à échapper aux flammes, mais depuis, elle souffre de "nombreuses séquelles psychologiques à long terme." Elle a par exemple relaté un moment où elle a été prise de panique à cause de l'odeur de fumée après un incendie à Chenôve.

Les avocats des parties civiles ont également relaté le témoignage d'autres survivants de l'incendie. La plupart ont énormément de mal à dormir, "comme si le cerveau était en état d'alerte permanent," explique Nathalie Minel-Pernel. D'autres n'arrivent pas à supporter la vue de bougies allumées. Certains n'arrivent même plus à vivre et à dormir avec les rideaux fermés ou en présence de barrières.

La majorité des affaires présentes dans l'immeuble ne sont également plus récupérables. Durant le procès, elle a également relaté l'histoire d'un étudiant qui vivait au numéro 48. Quelques jours après l'incendie, il s'est rendu compte qu'il avait perdu "la seule photo disponible de son grand-père paternel."

"On aurait voulu avoir plus de réponses."

Caroline G. a accueilli cette réquisition avec déception. "C'est compliqué de ne pas avoir de réponses mais, bon, on fait avec," estime-t-elle. Même sentiment du côté de Valentine Gandois, l'une des avocates des victimes. "On ne saura pas ce qui s'est passé ce jour-là. Ce que l'on voulait, c'était la vérité judiciaire."

"S'il y a une relaxe, c'est très difficile pour les victimes de faire tout ce parcours. On aurait pu imaginer que monsieur ne soit pas renvoyé devant le tribunal correctionnel. C'est difficile d'accepter la position du ministère public."

Le rappel des faits

Tout commence dans la nuit du 1er au 2 janvier 2021. À 4h00 du matin, les résidents des immeubles du 48 et du 50, rue du Bourg, à Dijon, sont réveillés par une odeur de brûlé et par des bruits de crépitements venant du toit. Certains regardent par la fenêtre et se rendent compte qu'un incendie s'est déclenché.

Soixante-dix pompiers arrivent rapidement sur place et parviennent à secourir la quasi-totalité des résidents. Mais, au petit matin, ils constatent qu'un corps est encore dans les débris. Il s'agit de Joël Basula Domingos, âgé de 26 ans au moment des faits. D'après les expertises, il a été découvert sur le dos, sur un matelas, situé dans les parties communes de l'immeuble.

Les enquêteurs découvrent qu'il est venu voir une femme, qui, après l'incendie, est en urgence absolue. Placée un mois et demi dans le coma, elle s'en sortira avec 100 jours d'incapacité totale de travail (ITT). Dix autres victimes sont recensées, toutes ayant des blessures plus légères.

Le 8 janvier, le parquet de Dijon ouvre une enquête pour "homicide involontaire par violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence." Un homme de 40 ans est alors arrêté et mis en examen : Steve L. Depuis le début de la procédure, il conteste les faits qui lui sont reprochés.

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