Robert Badinter s'est éteint dans la nuit du 8 au 9 février. Ancien ministre et avocat, il avait ardemment œuvré pour l'abolition de la peine de mort. En février 1979 à Dijon, il avait notamment sauvé la vie du dernier homme condamné à l'exécution. Retour en images.
Le 27 février 1979, Jean Portais arrivait à la Cour d’assises de Dijon. L’homme de 70 ans avait été condamné à mort pour les meurtres de la fille d’une bijoutière à Mâcon en 1968 et du sous-brigadier Pierre Prévost à Libourne (Gironde) en 1969.
"Un vieil homme sans avenir"
Rejugé, il est finalement sauvé de la guillotine, en grande partie grâce à son avocat : Robert Badinter. L'ancien garde des Sceaux présente à l'epoque son client comme "un vieil homme, sans avenir, sans espérance, un homme d'un autre temps". Grâce à ces circonstances atténuantes, la cour l'a finalement condamné à perpétuité.
"Monsieur Badinter avait triomphé de la peine de mort"
C'est dans les années 80, dans les couloirs des tribunaux parisiens que Maître Patrick-Victor Uzan, avocat au barreau de Dijon, croisait le chemin de Robert Badinter. Les yeux pétillants, il décrit l'aura qui entourait le juriste au micro de Yacine Arbaoui : "J’attendais qu’il prenne la parole pour m’imprégner de cet immense homme. Il avait un sens du verbe, une précision du mot, une gestuelle, des mains qui exprimaient autant que la voix… J’ai appris de lui la grande humilité, le savoir qui ne s’exprime pas, le souci du dialogue, du respect de l’autre. C’était un combattant, pas seulement d’audience, mais un combattant des idées et il imposait le respect."
C'est en tant que jeune avocat que le Dijonnais a assisté à l'abolition de la peine de mort. " J’en ai un souvenir très précis", se rappelle-t-il. "Il m’est arrivé au tout début de ma carrière de plaider sous l’égide de la peine de mort et d’entendre un avocat général requérir cette peine. Cet homme a été condamné, mais entretemps, Monsieur Badinter avait triomphé de la peine de mort. Mon client en question avait été rejugé et condamné à perpétuité."
Patrick-Victor Uzan se souvient avoir été marqué par les mots de Robert Badinter à l'époque, alors qu'il luttait pour l'abolition de la peine de mort : "Il nous a fait mesurer nos insuffisances et il nous a imposé le respect du métier et de l’homme quel que soit son crime. Il disait : "Je ne défends pas le crime, je défends l’homme qui a commis le crime"."
De quoi renforcer un peu plus l'image de modèle qu'a laissé Robert Badinter pour le monde de la justice, mais aussi pour la France.