FEUILLETON (2/4). De Dijon à la frontière ukrainienne : "pourquoi quand on grandit, on aime la guerre ?"

L'opération de sauvetage continue. Genia Lychko et son compagnon Alexandre ont franchi la frontière polonaise. A Varsovie, ils retrouvent une partie de la famille, saine et sauve. Domir, 5 ans, s'interroge sur l'argent et la guerre.

Des heures que le convoi roule. La frontière polonaise vient d'être franchie. Genia Lychko, son compagnon Alexandre Bringia et Gérard Zurita, le retraité qui les accompagne, poursuivent leur périple en direction de l'Ukraine.

Encore trois heures avant d'arriver à Varsovie. L'équipe décide de faire halte dans un Burger King. "On va manger un truc chaud quand même. Puis comme ça, on va faire un point pour voir ils sont", souffle Alexandre.

À table, les visages sont marqués. Les époux échangent quelques gestes de tendresse. Mais Genia, préoccupée, peine à se rassurer. Elle attend des nouvelles de son père. "Il va passer la frontière la nuit, il n'est pas encore arrivé. Il va appeler le matin." La confiance du début du voyage paraît bien loin.

Plus ça avance, plus les autres soucis arrivent. Pour bien récupérer tout le monde, pour pas qu'ils se perdent... Je commence à angoisser un petit peu.

Genia Lychko

Personne, à ce stade, n'a encore passé la frontière. "Mais on va y arriver, on va y arriver", se répète Genia. Comme un mantra, pour se redonner espoir.

Et le convoi repart. En plein milieu de la nuit, arrivée à Varsovie. Malgré la fatigue, le repos sera bref.

Mercredi 16 mars. 7 heures du matin. Une capitale où l'impact de la guerre en Ukraine se voit à chaque coin de rue. Sur les trottoirs, des files de réfugiés qui attendent désespérément de l'aide.

Le convoi prend la direction de la gare. Ils partent chercher la mère de Genia, sa cousine, et la fille de celle-ci. Enfin, les trois rescapées sont arrivées.

À l'intérieur du bâtiment, Genia et Alexandre, main dans la main, fendent un océan de détresse. Des réfugiés qui fuient la guerre, avec seulement quelques sacs, quelques affaires.



Ce sont d'abord des retrouvailles avec la cousine de Genia et la petite Nikol, 2 ans, sonnée par l'attente et le voyage. Puis, plus loin, dans la foule, entre deux rangées de sièges, voilà Lina, la mère de Genia. "Mamouchka" ! 3 ans que mère et fille ne s'étaient plus vues. Des embrassades, peu de mots. Pour Alexandre, c’est aussi la première rencontre avec sa belle-mère.


Il faut aussi récupérer Zulfia et Domir, 5 ans. Son père et son oncle sont restés au combat.

Sur le parking de la gare, Genia et sa mère s'étreignent, en pleurs. "Elle ne sait pas quoi dire, sourit la Dijonnaise. Savoir qu'ils sont là, c'est ça qui fait du bien. Après, il reste beaucoup d'inquiétudes. Je n'ai pas réussi à joindre mon papa, on ne sait pas. Il faut trouver tout le monde".


A l'hôtel. Les rires des enfants contrastent avec les larmes des parents. "Je veux rentrer à la maison, explique Lina, effondrée. J’espère que ça se finira au plus vite, que je puisse retourner tranquillement là où j'ai construit ma vie. C’est très compliqué quand tu ne comprends pas les gens, où tu vas, quand tu ne connais pas le pays. Mais là j’ai de la chance, j’ai ma fille".



En Ukraine, Domir tentait d’échapper au bruit des bombardements. Mettre les mains sur ses oreilles, c'est un réflexe qui lui est resté. Tout comme cette inscription sur son bras.



"Regardez, montre sa mère. J’ai écrit au cas où son nom et le numéro de téléphone. Comme ça on ne le perd pas. Il doit comprendre ce qu'il se passe pour ne pas avoir trop peur". L'enfant sourit. "Pourquoi, quand on est enfant, on aime les jouets ? Des choses innocentes. Et quand on grandit, pourquoi on aime l'argent. Certains, la guerre. Pourquoi ça arrive ?" "Voilà la question que se pose mon enfant", sourit tristement Zulfia.


Une partie de la famille est à l’abri. A présent, direction la frontière ukrainienne et ces vies brisées par la guerre. Il y a encore tant de monde à aider.

Le prochain épisode sera publié jeudi. Retrouvez le premier épisode ici.

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