Le groupe d'investissement allemand Mutares a officialisé son rachat de l'entreprise Vallourec à Montbard mercredi 1er juin. Vallourec Bearing Tubes emploie 200 personnes et fabrique des tubes en acier sans soudure. Mais difficile de dire de quoi demain sera fait.
Le groupe d'investissement Mutares est une holding possédant différents segments de l'industrie, dans l'ingénierie, la technologie et l'automobile. Sa proposition de rachat arrive à un moment important pour le groupe Vallourec, lancé dans un plan de suppressions d'emplois à travers le monde.
320 postes supprimés en France
Le groupe Vallourec cherchait à se séparer de Vallourec Bearing Tubes (VBT) déficitaire, qui réalise un chiffre d'affaires d'environ 50 millions d'euros. Cette division est le deuxième acteur européen sur le marché des tubes pour l'industrie de roulement, en particulier pour l'automobile, secteur en pleine mutation avec le développement des véhicules électriques.
La suppression de 2950 postes à travers le monde inclut 320 postes en France, mais uniquement sur les sites de Paris au Siège et dans le Nord (près de Valenciennes).
Le rachat de VBT se fait par une holding financière allemande. Pour Franck Chesseron, délégué syndical CGT à Montbard, "ils arrivent sans commandes, avec notre carnet de commandes à nous. Ca fait 8 ans qu'on n'arrive pas à dégager de l'argent. On ne sait pas quelle est leur stratégie pour retourner la situation."
"On est dans le doute"
Franck Chesserondélégué CGT à Vallourec Montbard
Le syndicaliste demeure plutôt dans l'expectative : "Ils ont présenté une équipe de consultants, qui seront présents dans tous les services de l'entreprise : la production, la maintenance, l'informatique, le commercial, les ressources humaines. Ils ont décidé une période de 100 jours au bout desquels ils nous diront comment ça va se passer. On est dans le doute."
Une forme d'audit qui permettra au repreneur de définir les orientations du site de Montbard, mais qui laisse les partenaires sociaux plutôt réservés : "On va revenir au mois de septembre, on en saura plus sur l'orientation stratégique. Pour l'instant, il y a 3 gros fournisseurs de tubes pour roulements en Europe, il n'y aura pas assez de boulot pour les 3 ! Ça n'est plus rentable de fabriquer des tubes en France."
Vallourec, un passé industriel important dans la vallée de Montbard
Les origines industrielles de ce qui va devenir le groupe Vallourec remontent à la fin du XIXè siècle et la découverte par les frères Mannesmann en Allemagne du procédé de laminage des tubes en acier sans soudure.
Les fabricants de tubes français commencent à adopter ce procédé de fabrication et des sites industriels sont créés dans le Nord et en Bourgogne : la Société française des corps creux, située à Montbard, constitue l’un des piliers historiques du groupe. Elle est rebaptisée Société métallurgique de Montbard et introduite à la Bourse de Paris en 1899.
Entre 1920 et 1930, une concentration s'effectue autour du secteur de l'industrie du tube d'acier. Les établissements de Valenciennes, Louvroil et Recquignies créent un partenariat commercial du nom des trois premières syllabes de ces trois villes : Vallourec. La fusion de la Société des tubes de Valenciennes et de la Société Louvroil-Montbard-Aulnoye va s'opérer.
Ce groupe devient le deuxième fabricant de tubes en acier en France et est introduit à la Bourse de Paris en 1957 sous le nom Vallourec.
En 1967, Vallourec reprend l’ensemble des activités tubes de son principal concurrent, Lorraine-Escaut. Dans les années 80, plus de 1000 employés sont présents sur le site de Montbard.
En 2009, le redémarrage de l'industrie nucléaire en France et dans le monde relance la fabrication de tubes en inox par la filière Valinox et le site de production Valtimet de Vénarey-lès-Laumes (Côte-d'Or).
Au printemps 2015, Vallourec annonce la suppression de deux mille postes dans le monde, du fait du contexte de baisse d'investissement dans l'industrie pétrolière et gazière lié à la baisse des cours dont plusieurs centaines en France.
Les 6 dernières années plus chaotiques
Franck Chesseron, délégué syndical CGT, se rappelle : "On a eu un PSE en 2017 qui n'a pas permis de redresser les comptes à l'équilibre. On était calibrés pour faire 60 000 t à l'année, et après ils ont recalibré l'usine à 256 personnes pour faire 30 000 t et pour être à l'équilibre. On est bien descendus à 30 000 tonnes mais on n'a jamais été à l'équilibre. Mais depuis 2014, on perd entre 5 et 8 millions d'euros tous les ans."
C'est dans ce contexte de pertes successives que le groupe recentre son activité sur des sites mondiaux plus rentables, notamment localisés en Amérique du Sud et en Asie. En une quinzaine d’années, Vallourec a accru sa présence industrielle en Asie (Chine et Indonésie), au Brésil et au Moyen-Orient au détriment de l'Europe par l’augmentation de la part locale de la production.
Concernant la filiale nucléaire, Vallourec Nucléaire a été vendu à Framatome l'année dernière. Puis l'annonce a été faite fin octobre 2021 pour trouver un repreneur du site de Montbard, maintenant identifié avec la holding allemande Mutares.