Nombreux sont ceux qui se sont posés la question d'une intervention des pompiers par les airs en découvrant les images de l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Certains sont allés jusqu'à souffler l'idée aux pompiers (de Côte-d'Or) en leur téléphonant.
Les pompiers de Côte-d'Or en ont assez de recevoir des appels abusifs sur leur ligne d'urgence. Ils ont partagé ce vendredi 19 avril sur les réseaux sociaux un exemple très récent d'un appel parvenu au centre de traitement de l'alerte du département.
Lundi soir, alors que la cathédrale Notre-Dame de Paris est en feu, une habitante de Côte-d'Or croit bon d'appeler les services d'urgence en suggérant d'utiliser un Canadair pour éteindre les flammes. L'opérateur à l'autre bout du fil semble exaspéré et mais répond tout de même très cordialement (avec une pointe d'ironie) à l'appel inopportun.
Écouter la bande-son de l'appel, diffusée par les pompiers
Voici la transcription de cette conversation surréaliste :
– Les pompiers j'écoute.
– Oui, bonjour. Je vous appelle à propos de la cathédrale de Paris. Pourquoi est-ce qu'ils ne mettent pas un avion, un Canadair ? Voilà.
– Ah oui. C'est pas bête oui.
– Il faut que vous leur fassiez penser parce que…
– Je vais les appeler oui. Un Canadair oui.
– Avec un Canadair, il y aurait longtemps que ça aurait été réparé.
– C'est vrai. Oui, ils n'y ont pas pensé à mon avis.
– Ils n'y ont pas pensé, alors c'est les Dijonnais qui y pensent ! Voilà merci.
– Je les appelle tout de suite pour leur dire. Merci.
– C'est gentil, merci au revoir.
Au delà de cet appel qui prête à sourire, "un appel sur deux reçu par les sapeurs-pompiers de Côte-d'Or ne nécessite pas le départ des secours", rappellent les pompiers. "Les appels abusifs au 18-112 pénalisent gravement le quotidien des sapeurs-pompiers. Aidez-nous à sauver des vies : n’abusez pas des numéros d’urgence."
Pourquoi l'intervention d'un Canadair était impossible ?
Un Canadair, c'est 6 300 litres d'eau embarqués. Au moins 3 000 litres en ne larguant qu'une des deux soutes. "L'équivalent d'un bloc de béton de 3 tonnes, lancé à 250 km/h, explique le lieutenant-colonel Michaël Bernier, porte-parole de la Sécurité civile. Et là, ce sont les deux tours qui risquaient de s'effondrer"."C'est techniquement impossible, irréalisable, et surtout ce serait totalement inutile", insiste ce gradé des sapeurs-pompiers, encore étonné qu'une proposition aussi "risible" ait pu être reprise et envahir les réseaux sociaux lundi soir, alors que les soldats du feu luttaient contre le sinistre.
Réservés aux zones non habitées, de tels largages d'eau sont impossibles dans des secteurs urbanisés, et encore plus sur une ville d'une densité telle que Paris. "Les immeubles voisins seraient touchés par les blocs de pierres projetés, sans compter qu'il faudrait au préalable évacuer la totalité du site", insiste Michaël Bernier. Impossible donc lundi soir à Notre Dame, avec 500 sapeurs-pompiers mobilisés, dont certains sur l'édifice lui-même.
Même avec un hélicoptère bombardier d'eau qui ne transporte que 1 500 litres d'eau, loin donc des volumes embarqués par les Canadair, les Tracker (3 600 litres) ou les Dash (10 000 litres largables en quatre fois si nécessaire), les dégâts seraient considérables : "C'est la nef qui s'effondrerait, il n'y aurait plus d'arcboutants".
"Le largage d'eau par avion sur ce type d'édifice pourrait entraîner l'effondrement de l'intégralité de la structure", avait tweeté dès lundi soir la Sécurité civile. Aux Etats-Unis, l'idée de tels largages d'eau a été testée sur un camion en feu, sur une route, raconte le lieutenant-colonel Bernier : "Après, il ne restait plus rien, tout était broyé".
Autre paramètre qui rendait impossible lundi soir l'intervention de tels bombardiers d'eau, l'interdiction en France de largages de nuit, contrairement à ce qui se pratique en Australie par exemple : "Là bas, ils vont intervenir dans des secteurs à 100 km de la première maison. Au pire, ils tuent un kangourou !"
La flotte française de bombardiers d'eau - 12 Canadair, 8 Tracker et 2 Dash - est stationnée sur la base de Nîmes-Garons dans le Gard. Les Tracker qui partent peu à peu à la retraite, seront progressivement remplacés par des Dash, dont six nouveaux exemplaires vont arriver d'ici 2022.
(avec AFP)