Ralentisseurs illégaux ou abîmés : "une grande majorité des ralentisseurs sont trop hauts"

Avec plus de 450 000 ralentisseurs routiers en France, une majorité est considérée comme illégale par la Ligue de défense des conducteurs. D'autres associations effectuent des vérifications au niveau régional, comme la Fédération française des motards en colère de Saône-et-Loire. Ces dos-d'âne "illégaux" ou abîmés posent plusieurs problèmes, notamment pour la sécurité des usagers.

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Le ralentisseur fait partie du paysage des routes françaises. Si son efficacité pour faire ralentir les véhicules motorisés à une vitesse convenable n'est pas remise en cause, il est vivement critiqué pour d'autres raisons : dangereux, bruyant, pas écologique... Entre autres, c'est ce qu'on peut retrouver dans cette étude de la Ligue de défense des conducteurs (LDC) datant du 1er juillet 2022.

La cause de ces maux viendrait du trop grand nombre de dos-d'âne construits ou installés en désaccord avec les normes imposées.

Des décrets pas toujours respectés 

Pour établir un ralentisseur réglementaire il faut normalement respecter deux décrets que sont le numéro 94-447 datant du 27 mai 1994 et la norme NF P 98-300.
Ces règles établissent le fait qu’un dos-d'âne peut être considéré comme légal s’il respecte plusieurs critères. Ils doivent être situés en zone 30 km/h, avoir une longueur de plateau comprise entre 2,5 et 4 m. Les pentes ont l'obligation d'être comprise entre 1 et 1,4 mètre de long et ne peuvent pas dépasser 10 cm de haut.

Enfin, ils ne doivent pas être implantés sur des axes empruntés régulièrement par des transports publics, ni sur des axes où le trafic est supérieur à 3000 véhicules par jour en moyenne.

Or, ce que dénonce la Ligue de défense des conducteurs dans son étude, c’est que seulement 10 % des ralentisseurs de l’Hexagone peuvent être considérés comme légaux. Nathalie Troussard, secrétaire générale du collectif dépeint certaines infractions repérées : "Bien souvent, le premier problème est le fait que ces ralentisseurs soient implantés sur des passages très fréquentés. Ainsi, même s'ils sont réglementaires, ils vont s'user plus rapidement et devenir dangereux en perdant de l'adhérence. De plus, une très grande majorité des ralentisseurs sont illégaux car ils dépassent 10 centimètres de haut ou ils sont trop longs, c'est une aberration."

La secrétaire générale de la LDC reconnaît l'efficacité de ces installations pour diminuer la vitesse des usagers, mais selon elle, ce n'est pas toujours la solution : "Face au problème de la vitesse en France, les élus locaux optent souvent pour la solution du ralentisseur. Mais on préférerait voir plus souvent la police sur les routes et dans les villages plutôt que d'avoir recours aux ralentisseurs."

L'épineux coussin berlinois

Un panneau "limité à 30" et un pictogramme représentant une bosse précédent un ralentisseur. Il en existe différentes sortes, mais celui-ci est appelé un coussin berlinois. Reconnaissable à sa couleur rouge et sa taille permettant aux bus et vélos de le contourner, il devrait pourtant être interdit.

Ce dos-d'âne n'est normalement pas concerné par les décrets précédemment cités, mais s'il est fabriqué avec du caoutchouc vulcanisé, il est censé être prohibé si l'on en croit cette réponse de Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports en 2009 : "le caoutchouc vulcanisé ne répond pas aux exigences de la norme relative aux ralentisseurs, c'est pourquoi ce matériau n'est pas autorisé pour la conception de ces dispositifs."

Ainsi, Dominique Bussereau précise que "l'adhérence", "la tenue de l'ouvrage dans le temps" et la "solidarité de l'ouvrage avec la chaussée" sont des caractéristiques que ce type de ralentisseur ne peut assurer. Pourtant, notamment à Dijon, le coussin berlinois est toujours vissé sur le bitume des routes.

Les motards en colère

Si les voitures peuvent souffrir de dégradation en passant sur un dos-d'âne un peu trop haut ce n'est pas le cas des deux-roues. Ils n'en restent pas moins les premiers concernés face à certains ralentisseurs impossibles à éviter.

En effet, des chutes arrivent régulièrement pour les motos et les cyclistes à l'attaque des pentes qui peuvent s'avérer très glissantes. "Honnêtement, par temps de pluie ça fait peur", lance Marc Bivert, le coordinateur de la Fédération française des motards en colère 71 (Ffmc). "Surtout avec les ralentisseurs en matière plastique. Si en plus de ça, la surface est usée, c'est vraiment dangereux. Même par temps sec, ça secoue et il y a un vrai risque de déséquilibre."

"Quand ils ne prennent pas toute la route on peut passer à côté, s'il n'y a pas de poteau ou d'obstacle. Mais des fois on n'a tout simplement pas le choix."

Marc Bivert

coordinateur de la Ffmc 71

La Ffmc possède des antennes dans tous les départements de l'Hexagone. En Saône-et-Loire aussi, les motards ont mené leur enquête sur les fameuses bosses des routes. "On a effectué des mesures en 2020", se rappelle Marc Bivert. "On prenait une règle de maçon, on mesurait la hauteur et on calculait l'angle de la pente. Ce qui en était ressorti, c'est qu'une grande majorité des ralentisseurs ne sont pas aux normes."

Récemment, ce sont les dos-d'âne situés aux abords des ronds-points qui inquiètent les motards saône-et-loiriens. "On en voit à Chalon par exemple", assure le coordinateur de la Ffmc 71. "En sortie de giratoire on est un peu penchés et si en plus de ça on est déséquilibrés... c'est une aberration."

Un problème écologique et sonore

Dans son étude, la Ligue de défense des conducteurs avance que le fait de freiner à l'approche d'un ralentisseur et accélérer une fois passé engendre une surconsommation et a un impact écologique. Pour vérifier la théorie, le collectif a même construit deux ralentisseurs, un légal et un illégal, pour tester et comparer sous contrôle d'un huissier de justice.

Ainsi, ils ont enregistré jusqu'à 13% de carburant consommé en plus pour un ralentisseur légal par rapport au plat et 28 % pour l'illégal. Pour les émissions de CO2, les augmentations vont de 12,6 % à 27,5 % pour le plus gros modèle de voiture testé.

En plus de ce surcoût énergétique, l'étude révèle aussi un fort impact de l'implantation d'un dos-d'âne au niveau des nuisances sonores. Le bruit du passage d'un véhicule peut par exemple se chiffrer à 61 décibels (dBA) pour un ralentisseur normal et se multiplier par 8 au maximum pour un ralentisseur hors-norme.

Du nouveau avant juillet ?

Antonin Morel et son association 'Pour une mobilité sereine et durable' mènent une action pour faire agir le gouvernement sur ce sujet. Ils ont notamment rassemblé des victimes des ralentisseurs ou de leur installation. "On a des particuliers qui ont des ralentisseurs devant chez eux et qui, à cause des vibrations, ont des fissures grandissantes dans leurs habitations", explique-t-il.

L'association espère avoir des nouvelles de cette initiative à la fin du mois de juin pour pouvoir faire évoluer la situation des ralentisseurs en France.

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