Le Préfet de la Haute-Saône Ziad Khoury fût directeur de la sûreté et de la sécurité pendant l'Euro-2016 en France. "La réussite" de l'organisation d'un grand événement sportif, comme la Coupe du Monde 2018 qui débute jeudi en Russie, "passe par l'anticipation" explique-t-il.
Combien de temps en amont se prépare-t-elle la sécurisation d'un événement sportif majeur, comme un Euro ou une Coupe du Monde ?
"Il faut d'abord préciser qu'aucun événement ne ressemble à un autre. En Russie, il y a une position géographique différente, des problématiques différentes. Mais de manière générale, la réussite de cette organisation passe par l'anticipation. Pour l'Euro, on avait commencé la préparation trois ans en amont sur les questions de sécurité. Une chose importante, c'est que cette question de la sécurité soit portée par l'ensemble de l'organisation, dès la conception de la candidature et même des stades. La clé est ensuite d'avoir une bonne coordination, puisqu'il y a à la fois des forces de sécurité publique, des forces privées... Chacun a un rôle à jouer, par exemple les volontaires ne sont pas chargés de mission de sécurité, mais s'ils remplissent bien leur tâche d'accueil du public, cela va décharger d'autant le personnel chargé de la sécurité ou les stewards."
Quelle différence voyez-vous entre l'Euro-2016 en France et le Mondial-2018 en Russie ?
"Pour le Qatar et pour la Russie, ce sont des pays qui ne sont pas au centre des flux de personnes, c'est plus facile de gérer les arrivées. La France est le premier pays touristique, avec une particularité aux frontières puisque nous sommes dans l'espace Schengen. Par exemple pour des engins pyrotechniques, vous allez avoir des supporters polonais qui viennent de chez eux en voiture. Alors que si vous devrez prendre un avion pour aller dans un pays, vous n'allez pas y aller avec votre valise bourrée de fumigènes. En Russie, on ne s'attend pas à beaucoup de flux du côté asiatique, et pour ce qui concerne les Européens ils ont besoin d'un visa pour franchir les frontières et vont le plus souvent y aller en avion. De manière plus générale, je n'ai pas d'éléments particuliers sur la façon dont sont organisés les Russes, on avait eu lors de l'Euro des délégations de la Fifa avec des Russes venus observer, comme nous-mêmes étions allés observer la Coupe du Monde au Brésil. C'est un pays qui est exposé, comme beaucoup d'autres, au risque terroriste, également aux questions de cybersécurité qui sont assez fortes là-bas. Point particulier: c'est un pays étendu, ce qui est à la fois un avantage et un inconvénient parce que d'un côté vous pouvez bien isoler les différents flux, mais de l'autre cela implique de mobiliser pas mal de forces de sécurité car la zone est étendue. Au Qatar, ce sera l'inverse, il y aura une seule zone à sécuriser massivement."
Quel rôle joue le renseignement dans la préparation d'un tel événement ?
"Le renseignement est essentiel au sens large, notamment au sens opérationnel et policier qui existe de toute façon. Pour chaque compétition, chaque pays envoie une délégation pour suivre ses supporters et aider le pays d'accueil à traiter d'éventuels hooligans. Cela commence dès le pays de départ, pour éviter la vente de billets à des fauteurs de troubles, avec une difficulté : il n'existe pas de fichier international ou même européen concernant ces fauteurs de troubles. Le renseignement s'opère aussi entre fédérations, cela avait très bien fonctionné pendant l'Euro. Pas si bien avec la Russie au début, ce qui nous a valu quelques difficultés, mais ensuite ça a mieux fonctionné."
La coupe du monde de football 2018 débute ce 14 juin en Russie. D'Ekaterinbourg, à Saint-Pétersbourg ou Sotchi, Vladimir Poutine a voulu les plus beaux stades pour sa Coupe du monde qui est d'ores et déjà la plus chère de l'histoire. La finale aura lieu le 15 juillet devant 80 000 personnes.