Après avoir tenu un espace de loisirs pour enfants, Julie Jeanpierre et Julien Louis se sont lancés dans la fabrication de pâtes italiennes biologiques ... et comtoises !
Au milieu des champs, traverse une route. Par-ci, par-là, quelques maisons sont clairsemées, dans cette étendue de céréales, à Torpes, non loin de la capitale comtoise. L’une d’elles jouxte une grange ouverte. La devanture porte encore les vestiges de l’ancienne activité : un laboratoire qui préparait les grenouilles. Il s’agit pourtant d’une fabrique de pâtes, celle de Julie Jeanpierre et de Julien Louis nommée les « Juju pasta ».
Fabriquer des pâtes italiennes, sur les terres comtoises, une drôle de reconversion pour les deux amoureux. Le couple tenait auparavant un espace de jeux pour enfants, dans une zone commerciale à Besançon, mais au bout de dix ans, la lassitude et la quête de sens prennent le pas. « Notre ancienne activité ne correspondait plus à nos valeurs », justifie Julie Jeanpierre, enfilant sa combinaison d’usine. Un coup de fil au beau-frère, agriculteur, et l’idée d’une usine à pâtes germe.
Le tour de France des pastiers
« Quand on a su qu’on pouvait faire de nos valeurs, notre métier, on a foncé », reprend la presque trentenaire. Le fonds de commerce est vendu. Le couple fait le tour de France des « pastiers », ou fabricants de pâtes sèches, pour apprendre à leurs côtés. Puis, après plusieurs essais et différentes recettes, le couple choisit de travailler avec des farines biologiques du Moulin du Val d’Amour, dans le Jura.Lancés deux semaines avant le confinement, les JuJu Pasta n’ont pas pu bénéficier de l’effet « ruée sur les pâtes », car personne ne les connaissait vraiment. Alors, quelques semaines avant la levée de l’isolement, Julie et Julien exposent leurs étals sur les marchés pour rencontrer les quelques passants qui font leurs courses. Un démarrage difficile pour les deux reconvertis, mais depuis, des partenariats se sont noués avec des magasins bio de la région, et des restaurants. Leurs paquets de pâtes sont exposés dans près de 60 points de vente, et Julie et Julien se relayent dans plusieurs marchés.
100% Comtois, ou presque
Charlotte sur la tête, protèges-pieds et blouse… L’uniforme est de rigueur pour la fabrication des pâtes. Ce jour-là, la machine, bruyante, mélange la farine de petit épeautre et l’eau, et coupe les crêtes de coq. Les Juju pasta ne bénéficient pas de l’appellation « pâtes », et n’écrivent pas ce mot sur tous leurs paquets, parce que c’est réservé aux recettes avec du blé dur. Or, le blé dur ne pousse pas en Franche-Comté…« On a toujours été dans le "consommer local", confie Julie Jeanpierre, et aujourd’hui, on travaille pour la région ». Car presque tout vient de la région, même les étiquettes. Seul l’emballage en cellulose de bois est fabriqué en Alsace. Un moyen de ne pas utiliser de plastique, et de trouver un sachet compostable. « On a même fait le test, parce qu’on était sceptiques ! », rigole Julie Jeanpierre. Au bout de quelques semaines au compost, l’emballage ressemble à une feuille morte.
Une fabrication dans les règles de l’art
Les amoureux des pâtes, sont tombés dans les plâtrées de pâtes lors d’un voyage à Rome, il y a trois ans. Depuis, difficile de s’en passer. « Mais on en mange en moins grande quantité, depuis qu’on les fabrique … Les nôtres sont plus consistantes ! », réplique Julie Jeanpierre. Malgré la machine dernier cri importée d’Italie, la fabrication de « la pasta » reste ancestrale. Les moules en bronze permettent de réaliser des pâtes plus rugueuses, striées, qui accrochent la sauce. Puis, le séchoir pendant 12 heures, à basse température, conserve les qualités nutritives.Le temps de fabrication est donc beaucoup plus étendu que pour les pâtes dans les grandes surfaces. La qualité a cependant un coût : entre 2,20 et 3,70 euros, le paquet de 250g. A ce prix-là, ce n’est pas donné, certes, mais c’est toujours moins cher que d’aller en Italie.