"Accompagner les femmes dans les bons moments comme les difficiles" : à l'hôpital, les sages-femmes autorisées à pratiquer l'IVG chirurgicale

L'IVG chirurgicale, auparavant réservée aux médecins, pourra désormais être pratiquée par les sages-femmes volontaires dans le milieu hospitalier, jusqu'à la 14e semaine de grossesse.

C'est une "réponse forte" face aux "difficultés d'accès" à l'avortement dans certains territoires français, s'est réjoui le ministre de la Santé Aurélien Rousseau dans un communiqué. Dans un décret à paraître au plus tard ce jeudi 14 décembre, les sages-femmes hospitalières vont être autorisées à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse (IVG) instrumentales, dites aussi chirurgicales. Elles ne pouvaient auparavant réaliser que des IVG par voie médicamenteuse, ce depuis 2016.

Les sages-femmes "accompagnent les femmes dans tous les temps de leur vie génésique, dans les bons moments comme les difficiles", "c'est une bonne chose de leur permettre de passer du côté 'technicien'", déclare Caroline Combot, présidente de l'Organisation nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF) et sage-femme à Belfort.

Comme les médecins, elles pourront pratiquer ces IVG instrumentales jusqu'à 16 semaines d'aménorrhée, soit la 14e semaine de grossesse. Cette extension des compétences était prévue dans la loi de mars 2022 visant à renforcer le droit à l'avortement et a été expérimentée pendant un peu plus d'un an dans une vingtaine d'établissements partout en France. 

Des gestes "qui ne sont pas nouveaux" pour les sages-femmes

L'IVG médicamenteuse implique la prise de deux médicaments en l'espace de 48 heures maximum : une antiprogestérone qui interrompt la grossesse, et une prostaglandine, qui provoque des contractions pour expulser l'embryon. L'IVG instrumentale est, elle, une intervention chirurgicale, pratiquée sous anesthésie locale ou générale. Après dilatation préalable du col de l'utérus, le praticien introduit dans l’utérus un tube permettant d'aspirer le contenu utérin. 

Une formation sera nécessaire pour les sages-femmes souhaitant pratiquer cet acte. Pour autant, "la pratique de l'IVG instrumentale n'est pas très éloignée de ce que nous avons l'habitude de faire", assure Caroline Combot, "tous ces gestes réalisés à l'intérieur de l'utérus ne sont pas nouveaux pour nous". Selon les retours des expérimentations, les IVG chirurgicaux réalisés par des sages-femmes n'entraînaient pas plus de complications que celles réalisées par des médecins. "Ça se passe bien partout où je vais", et sur le terrain les professionnels "sont prêts", abondait à l'AFP la ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, Bérangère Couillard. 

La méthode médicamenteuse reste la plus utilisée, même dans les établissements de santé. Selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), elle représente 78 % des IVG réalisées sur l'ensemble du territoire français. Même si la demande d'IVG chirurgicale est beaucoup plus faible, concède Caroline Combot, l'extension de la pratique aux sages-femmes permet de conforter la liberté de choix des femmes souhaitant avorter – certains établissements pourraient, par exemple, ne pas proposer d'IVG instrumentale à cause d'un manque de professionnels. 

L'idéal, c'est que les femmes aient le choix dans leur méthode d'avortement. Et pour qu'elles aient ce choix, il faut qu'il y ait plus de praticiens formés.

Caroline Combot, présidente de l'Organisation Nationale Syndicale des Sages-Femmes

à France 3 Franche-Comté

"Maintenant, il va falloir que les établissements hospitaliers s'emparent de cette question" dans un contexte de pénurie de soignants, soulève-t-elle. "Est-ce qu'ils voudront libérer des sages-femmes pour ces pratiques quand il manque déjà des sages-femmes ?" Caroline Combot espère que les sages-femmes libérales volontaires pourront, elles aussi, réaliser des IVG chirurgicales dans des établissements de santé pour assister les sages-femmes hospitalières.

Le ministère de la Santé a par ailleurs prévu "une revalorisation de 25 % des tarifs versés aux établissements de santé pour la réalisation des IVG, qui n'avaient pas été revus depuis 2016 et étaient significativement inférieurs aux coûts supportés par les établissements pour cette activité", a-t-il expliqué dans son communiqué. 

En Bourgogne-Franche-Comté, un recours à l'IVG inférieur à la moyenne française

En 2022, une augmentation des avortements a été observée sur la quasi-totalité du territoire français par la DREES. Des "disparités territoriales" "demeurent" néanmoins, avec un taux de recours à l'IVG qui varie parfois du simple au double selon les régions – de 11,6 % en Pays de la Loire à 22,6 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Avec 13,6 % de recours à l'IVG, la Bourgogne-Franche-Comté se situe en dessous de la moyenne française (16,1%). En Franche-Comté, plus précisément, ces taux ont compris entre 12,7 % pour le Jura et 15,3 % pour le Territoire de Belfort. Sur les 7 191 avortements réalisés dans la grande région en 2022, près de 64 % ont été pratiqués en établissements hospitaliers. 

L'Agence régionale de santé (ARS) Bourgogne-Franche-Comté assure que "la région ne souffre pas d’un manque de ressources pour accéder à l’IVG", à l'exception de la Nièvre, en Bourgogne. Le Dispositif Spécifique Régional en Périnatalité (DSRP) de Franche-Comté confirme ce constat. "S'il y a des difficultés d'accès à l'IVG sur le territoire, elles ne sont pas remontées", affirme Blandine Mulin, médecin membre du dispositif. Une large étude concernant l'accès à l'IVG, à laquelle participeront notamment l'ARS et le DSRP, sera menée sur le territoire en 2024.  

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