Alors qu'il vient d'obtenir son CAP après deux années d'apprentissage, le jeune Guinéen Lamine Diaby a reçu une obligation de quitter le territoire. A Besançon, son patron, le maître boulanger Alexandre Figard veut se battre pour le garder. Un cas loin d'être isolé.
A Besançon, le jeune Lamine Diaby est pétri d'inquiétudes. A 18 ans, il a reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Pourtant, le Guinéen vient de terminer deux années d'apprentissage chez un maître artisan de renom, Alexandre Figard, meilleur boulanger de France 2011. En outre, son parcours sans faute vient d'être couronné par l'obtention d'un CAP. Dans l'incompréhension, Lamine et son maître d'apprentissage sont dévastés. "Aujourd'hui je travaille, mon patron est content de moi, j'ai de bonnes notes et des félicitations partout où je suis passé, je suis bien intégré..", insiste Lamine Diaby.
Empêché de poursuivre son cursus par une obligation de quitter le territoire français
Lorsqu'il était encore mineur, Lamine Diaby a fui la Guinée où son père était emprisonné. Aujourd'hui il a pour projet de poursuivre ses études. Dès ce lundi matin 12 juillet son patron Alexandre Figard lui fera signer son nouveau contrat, une mention complémentaire au centre de formation d'apprenti. Le jeune apprenti rêve de passer son brevet professionnel, un diplôme de niveau 5. Un avenir tout tracé et pourtant interrompu. Cette obligation de quitter le sol français anéantit tous ses espoirs.
J'espère rester à Besançon, j'aime mon métier, je me suis fait des amis et je suis fier du parcours que j'ai réalisé.
La préfecture estime que les documents d'identité du jeune homme ne sont pas authentiques. La police aux frontières fait état d'irrégularités dans ses actes d'état-civil. Pourtant, Lamine assure que l'ambassade de Guinée a validé son extrait de naissance, lui fournissant une carte consulaire.
De son côté le patron boulanger a écrit en début d'année 2021 à la préfecture, à l'aube des 18 ans de son apprenti, anticipant cette situation. Une lettre restée sans réponse. "Nous avons rencontré une avocate pour faire un recours, nous croisons les doigts", se console-t-il. Sollicitée, la Préfecture du Doubs n'a pas souhaité s'exprimer.
S'inspirer du combat de Stéphane Ravacley
Alexandre Figard peut compter sur le soutien d'un autre artisan boulanger passé par les mêmes difficultés. Stéphane Ravacley avait mené une grève de la faim pour obtenir la régularisation de son apprenti Laye Fodé Traoré.
Le boulanger bisontin a crée l'association "Patrons solidaires" en janvier 2021 pour aider d'autres patrons à obtenir la régularisation de jeunes comme Laye Fodé Traoré. L'association reçoit chaque jour au moins un appel de chefs d'entreprise dans la même situation qu'Alexandre Figard. "On va se battre, monter des dossiers, monter à Paris pour démontrer que ce jeune Guinéen est indispensable à l'entreprise", répète Stéphane Ravacley. "L'artisanat traverse une crise de main d'oeuvre, nous sommes obligés de faire appel à ces jeunes hors d'Europe, face à cette pénurie on a besoin d'eux" répète-t-il. Il assure que si les CFA sont pleins, à la fin du cursus 60 à 70 % des effectifs partente et se réorientent. "Ces jeunes migants sont souvent très motivés et finissent premier car ils savent qu'ils n'ont droit qu'à une seule chance" rappelle-t-il.
Une proposition de loi
Stéphane Ravacley souhaite proposer un texte de loi devant l'Union Européenne avec le député européen (Place Publique) Raphaël Glucksmann pour que les jeunes migrants en formation puissent aller au bout de leurs études même après 18 ans.