Du céréalier au consommateur, la filière brassicole propose aujourd'hui des produits 100 % francs-comtois, brassés et distribués sur place.
Qui dans une ancienne menuiserie (coucou la brasserie bière du Doubs), qui dans sa propre maison (salut les brasseurs du Pintadier) : la bière de Franche-Comté se brasse partout, pourvu qu'on ait la place, l'amour et l'envie. Et ce n'est certainement pas ce qui manque aux brasseurs du cru, une quarantaine aujourd'hui, répartis sur les quatre départements de la comté.
Linda Hemler et Alain Ramponi se sont lancés dans l'aventure depuis leur garage à Lachapelle-sous-Rougemont, tout près de la frontière alsacienne. « L'année dernière, on a fait la fête des voisins, se souvient Alain Ramponi. On s'est dit qu'on allait ramener un peu de bière, et tout le monde a adoré ! » Et voilà comment naît une micro-brasserie...
Leur expérience a permis, cerise sur le gâteau, de faire revivre le passé brassicole de Lachapelle-sous-Rougemont, où une entreprise de production de bière employait 40 salariés jusqu'à sa fermeture en 1962.
Cet exemple de micro-brasseries illustre une tendance lourde : le marché, longtemps trusté par les grands groupes, doit désormais compter avec de très nombreuses entreprises locales. La preuve avec cette carte exhaustive des brasseries de Bourgogne-Franche-Comté :
De la place pour tous ?
La multiplication des vocations a-t-elle alors engendré une concurrence féroce, comme c'est souvent le cas en matière d'entreprises ? Il semblerait que non. Au contraire, les brasseurs francs-comtois préfèrent avancer dans la même direction, n'hésitant pas à mettre leurs forces en commun pour la cause du houblon.
La filière bio... et belge
Dernier exemple en date : la création d'une filière bio 100 % comtoise. Désormais, quelques céréaliers de Haute-Saône produisent de l'orge brassicole, sur demande des brasseurs (180 tonnes en 2017). Une fois récolté, l'orge transite par voie fluviale vers la Belgique, où il est transformé en malt, avant son retour en Franche-Comté (c'est la seule entorse au principe de circuit court, mais il est aujourd'hui impossible de fabriquer du malt dans notre région).
« Une brasserie, c'est d'abord une fabrication locale, détaille Régis Barth, le père de la « Franche » depuis 2005, dans le Jura. Relocaliser nos sources d'approvisionnement, c'est faire le lien avec l'esprit de la brasserie. On distribue par exemple à 100 km de chez nous, pas plus. »
Pas étonnant alors de retrouver cette bière dans les bars tendance alternative (au hasard : le Tandem à Besançon, la Guinguette, Leonz café à Lons-le-Saunier), les festivals, ou même les épiceries en vrac. L'explosion des micro-brasseries correspond à notre nouvelle manière de consommer, davantage bio, éthique et locale. S'y convertir, c'est épouser l'esprit des temps ; à condition d'en consommer avec modération...