Les droits d'alerte se multiplient au sein des entreprises toujours en activité. Confrontés à l'épidémie de Covid-19, beaucoup de salariés refusent de continuer à travailler, mettant en avant la santé publique avant l'économie.
Jeudi matin, Emmanuel Macron a exhorté les entreprises et leurs salariés à poursuivre leur activité, mais en sécurité sanitaire.
Contraints d'aller travailler, beaucoup de salariés s'interrogent sur l'utilité de leur activité. Quels sont les secteurs essentiels? Peut-on vraiment travailler en toute sécurité en pleine pandémie?
"Est-ce que ça vaut le coup de prendre des risques pour fabriquer des horodateurs ?" demande ainsi Marc Szabo, délégué CFDT à Flowbird à Besançon, où un droit d'alerte a été déclenché.
Il raconte: "Notre employeur n'a pas évalué les risques et s'est contenté de rappeler les gestes barrières. On est plusieurs sur un même poste, les tire-pales sont utilisés par différentes personnes. Ce sera à l'inspecteur du travail de trancher. On fait des horodateurs, c'est franchement pas essentiel, surtout que les techniciens qui font de la maintenance sur le terrain n'ont plus de travail: les villes ont mis les parkings gratuits et il n'y a plus de contrôles dans les transports en commun".
La ministre "scandalisée" par l'arrêt des chantiers de BTP
Un droit de retrait a également été actionné mardi par les quelque 300 salariés de Safran, à Besançon toujours. "L'entreprise a fermé pour tout désinfecter et définir les postes vraiment "essentiels" qui devaient continuer", relate Marc Szabo. Les salariés reprendront lundi, pour prendre connaissance des réflexions de la direction de ce site spécialisé dans les équipements électriques pour l''aéronautique.Le secteur du BTP, pointé du doigt par la ministre du Travail Muriel Pénicaud, se pose aussi beaucoup de questions. La ministre est "scandalisée" par les fédérations d'entrepreneurs du bâtiment, notamment la Capeb, qui voulaient stopper les chantiers.
Ce donneur d'ordre dans le BTP ne cache pas son agacement: sur les réseaux sociaux, il se dit "furieux" et promet de demander "aux entreprises de s'arrêter sur les chantiers. Il faut être sérieux et prendre ses responsabilités".
Cette impression d'être considéré comme de la "chair à canon" tenaille aussi ceux qui occupent des postes à responsabilité. Nous avons pu nous procurer le courriel envoyé à sa direction par un chef d'équipe d'une entreprise qui produit des résines pour les secteurs du transport ou de l'aéronautique.En tant que citoyen, père de famille, je ne peux pas faire comme si de rien n'était
Il dénonce "la situation ubuesque de maintenir du personnel en activité sur notre site (...) notre activité actuelle n'aide en aucun cas directement la population à (sur)vivre ou à lutter contre le virus. La seule aide que nous pouvons leur apporter, c'est de rester chez nous".
Quelques jours après ce courriel, le chef d'équipe est désormais en télétravail. Mais "la fermeture temporaire" qu'il demandait de ses voeux, "pour nous regarder dans un miroir", n'a toujours pas été actée.
"La vie prévaut sur l'économie" arguait-il dans son message. Pas une évidence apparemment. Malheureusement...